Condamné pour avoir évincé un concurrent

Novembre 2008, les amateurs d’infos sportives voient, enfin, arriver dans les kiosques un quotidien autre que L’Équipe. Le journal du groupe Amaury (Le Parisien, Aujourd’hui en France mais aussi Tour de France, Rallye Paris-Dakar…) règne en effet en maître monopolistique depuis des décennies sur la presse d’information sportive.

Le nouveau venu se nomme Le 10 Sport. Il est le fruit d’un partenariat entre l’homme d’affaires Michel Moulin (créateur du journal de petites annonces Paru Vendu et dirigeant de plusieurs clubs de football) et le groupe NextRadioTV (RMC, BFM, BFM TV…). Le premier numéro est mis en vente le 3 novembre 2008. L’exact même jour, le groupe Amaury lance un autre quotidien sportif, Aujourd’hui Sport, en plus de L’Équipe donc, avec un positionnement à tout point équivalent au 10 Sport (prix, format, ligne éditoriale…).

Logiquement, les éditeurs du 10 Sport saisissent l’Autorité de la concurrence, qui, au long d’une longue instruction arrive à des conclusions guère surprenantes. Le groupe Amaury a bien mis en place une stratégie avec pour unique objectif de « tuer 10 Sport ». Un choix selon l’Autorité de la concurrence qui n’était même « pas rationnel d'un point de vue économique pour le groupe Amaury puisqu'il générait un sacrifice financier important du fait de l'effet de cannibalisation des ventes de L'Équipe par le nouveau quotidien. »

Retour à la case départ

Le pari des dirigeants de L’Équipe fonctionne on ne peut mieux : Le 10 Sport ne résiste pas à cette concurrence frontale et cesse de paraître à partir de mars 2009 (il survivra encore quelques mois au rythme hebdomadaire et non plus quotidien). Le groupe Amaury décide en juin 2009 de stopper à son tour la diffusion de son nouveau quotidien, qui n’a plus de raison d’être, laissant à nouveau le lectorat face à une seule alternative en kiosque : L’Équipe ou L’Équipe.

Selon l’Autorité de la concurrence, « le groupe Amaury a lancé artificiellement un journal dans le seul but de protéger le monopole de L'Équipe ». La sanction est à la hauteur de la pratique anticoncurrentielle : 3,5 millions d'euros. Et encore, cette condamnation a été réduite de 60 %, l’Autorité prenant en compte les difficultés actuelles du groupe Amaury.

Aujourd’hui l’état de la presse « papier », surtout quotidienne, est tellement déplorable qu’une telle pratique semble économiquement impossible. La concurrence s’est en grande partie déportée sur Internet où L’Équipe.fr est bien obligé de faire avec d’autres acteurs comme Sports.fr ou Eurosport.fr.