Les laboratoires en embuscade

L'éducation thérapeutique est dans l'air du temps. Et pour cause : l'essor de maladies chroniques, comme le diabète ou l'asthme, ne laisse pas d'autre choix que d'armer au mieux le patient, afin qu'il puisse « gérer » son affection au quotidien et éviter une aggravation de son état. Il est donc logique que la loi « Hôpital patient santé territoire », actuellement examinée par l'Assemblée nationale, tente d'encadrer et de mettre en pratique cette notion. Mais le tour pris par la discussion laisse perplexe. Car jeudi, tard dans la soirée, les députés ont opté pour une solution étonnante. Soucieux de ne pas laisser le champ libre aux firmes pharmaceutiques, ils ont décidé que ces dernières ne pourraient ni « élaborer, initier ou mettre en oeuvre » les programmes, ni établir de « contact direct avec le patient ». Mais ils n'ont pas interdit l'implication financière de l'industrie du médicament !

Donnant-donnant

Si elle reste telle quelle, la loi laisse donc une marge de manoeuvre considérable aux laboratoires. Car nul doute qu'ils s'intéresseront peu aux programmes qui ne font pas la promotion de leurs produits et qu'ils préféreront, de loin, apporter leur soutien à ceux qui font la part belle à une prise en charge médicamenteuse. Le financement public n'étant même pas évoqué par la loi, on aboutira donc à une situation proche de celle qui prédomine dans la formation médicale continue : une majorité écrasante de programmes payés, et donc orientés par l'industrie, et une infime minorité de programmes indemnes de toute influence. Reste à espérer que les sénateurs profiteront de leur droit de regard pour changer la donne !