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Juul

Une cigarette électronique fortement dosée arrive en France

Aux États-Unis, Juul Labs a supplanté ses concurrents en un temps record. La start-up californienne se tourne maintenant vers la France avec un objectif : conquérir le cœur des fumeurs, et les convaincre de raccrocher avec sa cigarette électronique. Mais hormis le marketing, elle n’apporte pas d’innovation majeure et surtout, elle est fortement dosée en nicotine.

Visuellement, cette e-cigarette est un pur produit de la Silicon Valley. Ses lignes sobres et épurées ne sont pas sans rappeler les courbes si chères à Apple. De fait, la Juul a su se rendre plus légère et fine que ses concurrentes, volumineuses et pataudes. Aux États-Unis, elle a su convaincre. À présent, la start-up vise la France et ses 16 millions de fumeurs. Pour y parvenir, Juul Labs prépare une arrivée plus discrète, sans tapage sur les réseaux sociaux.

Depuis le 6 décembre, sa vapoteuse est disponible au prix de 39,99 € pour un « pack premium » (contenant un appareil, un socle de recharge et quatre e-liquides appelés Juulpods). Assez bon marché, elle est simple à utiliser. Pour l’heure, sa vente se limite à quelques boutiques de la région parisienne et au site Internet du fabricant, où une double vérification d’identité est réalisée. Conformément à la loi, la vente des produits est interdite aux mineurs. Des appareils contrefaits sont aussi proposés sur de nombreux sites de e-commerce.

La cigarette électronique Juul accompagnée de ses recharges aux faux airs de clé USB.

Des arguments exagérés

Pour son arrivée en France, la start-up joue la carte du sevrage. Quitte à tordre un peu la réalité. La Juul est « une véritable alternative à la cigarette », qui plus est « efficace », répète à l’envi le fabricant. Interrogé par Que Choisir, il cite « une étude indépendante » menée par un cabinet de consultants, le CSUR (1). Il s’agit en fait d’un sondage réalisé auprès de ses clients. « 64 % des adultes américains (âgés de 21 ans ou plus) interrogés sur un échantillon de 19 000 personnes ne fumaient plus après avoir utilisé Juul pour la première fois », avance Juul Labs qui indique aussi relayer des témoignages de clients « afin d’aider d’autres personnes à arrêter de fumer ».

À l’heure actuelle, aucune e-cigarette n’a montré son efficacité dans le sevrage tabagique. Seule leur moindre nocivité est sûre. Selon l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), 2,5 % de la population française vapote chaque jour, dont 59 % fument en même temps… Voilà qui remet en question le concept d’alternative. 

« Nous ne prétendons pas être une solution d'arrêt du tabac, simplement une solution alternative permettant d'abandonner plus facilement la cigarette », rétorque Juul Labs. Mais pas la nicotine donc. C’est un problème, dans la mesure où le produit est fortement dosé : 20 mg/ml, la dose maximale autorisée. Ce seuil est censé « reproduire au mieux le pic de sensation attendu par les fumeurs adultes, les aidant ainsi à arrêter plus facilement ». Mais il s’agit d’une substance très addictive. Ces seuils risquent d’entretenir une réelle dépendance à l’égard de la Juul… au lieu d’encourager son arrêt.

Une success story à l’américaine

Juul Labs n’a de cesse de le répéter. Son produit n’est pas destiné aux personnes n’ayant jamais fumé ou aux jeunes. En cela, la firme semble avoir appris de ses erreurs. Car aux États-Unis, une toute autre histoire s’est écrite. La compagnie s’est lancée en 2017 à grands renforts de campagnes sur les réseaux sociaux. En moins d’un an, elle a raflé les trois quarts du marché de la cigarette électronique. Ce succès inédit a touché une cible inattendue : les jeunes, dont des lycéens qui n’avaient jamais touché une cigarette de leur vie.

Ce dérapage a attiré l’attention de la sourcilleuse FDA (Administration des denrées alimentaires et médicamenteuses), autorité américaine de tutelle des e-cigarettes. Après une première saisie de documents commerciaux, l’agence a lancé une inspection surprise au siège social de Juul Labs en octobre dernier. Elle a aussi demandé au fabricant d’agir pour décourager l’utilisation de ses produits par les jeunes. Aux États-Unis, ne restent que les saveurs menthol et blond royal. En France, l’ambiguïté risque de persister. Les saveurs proposées (vanille, menthe, mangue, pomme, blond royal) sont plutôt attractives.

(1) Transitions in Cigarette Smoking Associated with Use of the JUUL Vaping Device Among 18,799 Adults in the United States, Centre for Substance Use Research 2018

Audrey Vaugrente

Audrey Vaugrente

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