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Bisphénol A

Les autorités sonnent l’alerte

Deux rapports de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation), rendus publics le 28 septembre, mettent en évidence la toxicité du bisphénol A, même à faible dose.

Depuis plusieurs années, le bisphénol A (BPA) est sur la sellette. Alors que de nombreux scientifiques alertent sur les risques pour la santé humaine de ce composant des plastiques, d’autres jugent encore trop minces les preuves de sa toxicité. Sans trancher définitivement la question, les deux rapports que l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) a rendu publics le 28 septembre marquent une étape décisive dans l’appréciation des risques sanitaires liés au bisphénol A. Après avoir passé au crible toute la littérature scientifique disponible, les experts de l’Anses concluent à l’existence d’effets avérés chez l’animal (effets sur la reproduction, sur la glande mammaire, sur le métabolisme, sur le cerveau et sur le comportement) et d’autres suspectés chez l’homme (effets sur la reproduction, diabète, pathologies cardiovasculaires). Mais la grande nouveauté, c’est que cette substance peut « avoir des effets plus importants à très faible niveau d’exposition qu’à haut niveau ». La toxicité du BPA varie aussi fortement selon les individus et la période de leur vie durant laquelle ils sont exposés. L’Anses considère donc qu’il n’y a pas lieu d’attendre la fin de son travail d’expertise en 2012 pour réduire les risques d’exposition des populations sensibles que sont les nourrissons, les femmes enceintes et allaitantes et les jeunes enfants. En 2010, la France avait déjà interdit la fabrication et la commercialisation de biberons contenant du BPA bisphénol A. On sait en effet que la migration de la substance chimique vers les aliments est favorisée par le chauffage du contenant. L’interdiction des biberons contenant du BPA était d’autant plus aisée qu’ils pouvaient, sans problème, être remplacés par des biberons en verre.

Aller plus loin

Mais il faut aller plus loin et remplacer le bisphénol A contenu dans les objets destinés aux populations sensibles par des substances dont l’innocuité est démontrée. Il s’agit principalement des matériaux en contact avec des denrées alimentaires mais aussi des jouets et des articles de puériculture.

Aussi l’Anses a-t-elle lancé un appel aux industriels afin de recueillir toutes les données concernant les produits de substitution disponibles dont l’innocuité est prouvée. Ce qui n’est pas le cas de certains substituts comme le bisphénol S, encore plus dangereux que le BPA et pourtant utilisé par certains fabricants de plastiques.

Par ailleurs, l’Agence réitère sa recommandation datant de 2010 et jusqu’ici restée sans effet qui visait à étiqueter tous les produits contenant du BPA. Mais seuls les pouvoirs publics peuvent rendre cet étiquetage obligatoire. Un travail de titan, car le BPA est partout : des bonbonnes à eau aux boîtes de conserve, en passant par les canettes, le petit matériel électroménager, les CD ou les amalgames dentaires.

Enfin, l’Anses devrait aussi transmettre le résultat de ces premiers travaux aux instances européennes concernées en vue d’une éventuelle révision de la DJA (dose journalière admissible) qui sert de base à la réglementation.

« Changement de doctrine »

De son côté, le Réseau Environnement Santé (RES) qui avait, le premier, tiré la sonnette d’alarme « se félicite du changement de doctrine de l’Anses » et demande aux autorités publiques de tirer toutes les conclusions de ces nouveaux rapports, notamment « l’extension de l’interdiction du BPA à échéance d’un an ». Pour l’instant, on n’en est pas encore là, l’Anses ne devant rendre ses conclusions définitives que fin 2012. « Les effets du BPA sur l’homme sont suspectés mais non avérés », a insisté Dominique Gombert, directeur aux Risques de l’Anses, tout en soulignant l’extrême difficulté de prendre la mesure de toutes les expositions possibles au BPA et de ses effets cumulés avec d’autres substances.

L’Agence n’est donc pas au bout de ses peines. D’autant que ses travaux s’inscrivent dans le cadre d’une saisine plus large portant sur cinquante perturbateurs endocriniens (phtalates, parabènes, perfluorés, composés bromés, etc.) qui polluent notre environnement depuis un demi-siècle.

Florence Humbert

Florence Humbert

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