BILLET DE LA PRÉSIDENTE
Jouets connectés

Quand le Père Noël se transforme en mouchard

Quoi de plus inoffensif qu’un jouet ? C’est certainement ce que se disent beaucoup de parents au moment de choisir les cadeaux de leurs progénitures. Pourtant, faisant suite à notre saisine de l’année dernière, la CNIL vient de confirmer que les jouets de nos chères têtes blondes pouvaient parfois se transformer en de bien vilains mouchards.

La CNIL vient en effet de mettre en demeure la société GENESIS qui commercialise la poupée « My friend Cayla » et le robot « I-QUE ». La société a désormais deux mois pour se mettre en conformité avec la loi, et vous plus que quelques jours pour redoubler de vigilance à l’approche des fêtes de Noël. Les vérifications de l’autorité ont permis de confirmer nos inquiétudes relatives au fait que l’entreprise relevait, à l’aide des jouets, une multitude d’informations personnelles sur les enfants et leur entourage telles que leurs voix, les conversations échangées avec les jouets ainsi que les informations renseignées dans le formulaire de l’application nécessaire à l’utilisation du jouet.

Par ailleurs, la faille de sécurité que nous avions relevée a été confirmée par la CNIL. Ainsi, n’importe quelle personne située à 9 mètres des jouets, et ce même à l’extérieur du bâtiment, peut se connecter au jouet sans qu’aucun code d’authentification ne soit demandé. Résultat ? Cette même personne peut entendre et enregistrer les paroles échangées entre le jouet et l’enfant. Plus grave encore, il est possible de communiquer avec l’enfant en diffusant des sons via l’enceinte du jouet. Sommes-nous au moins informés de ce traitement de données personnelles par la société au moment de l’achat ? Là encore, en violation de la législation applicable, les consommateurs ne sont pas mis au courant de ce traitement et encore moins du transfert de ces données hors de l’Union européenne.

En tant qu’association de défense des consommateurs, cette mise en demeure est bien évidemment une victoire en ce que nous avons réussi à alerter sur les dangers d’un produit ayant vocation à être largement répandus dans les foyers. Et là est toute notre difficulté actuellement : faire comprendre que le sujet des données personnelles, au-delà de l’inquiétude légitime qu’il répand, est déjà un danger présent chez nous. Pas que l’« économie de la donnée » ne représente qu’un danger, mais il s’agit d’être conscients des dérives qu’elle peut impliquer, en termes de sécurité, de violation de la vie privée ou encore de ciblage marketing. « Comme ces jouets, connectés à Internet, partagent probablement le même réseau Wi-Fi que votre ordinateur portable […] les pirates peuvent non seulement vous moucharder, mais aussi installer des ransomware ou compromettre votre réseau domestique » rappelle un analyste spécialisé dans les questions de sécurité pour Bitdefender. La preuve que tout objet potentiellement connectable peut représenter un danger pour un consommateur non averti… Pour y réfléchir ensemble, l’UFC-Que Choisir organisera la semaine prochaine un colloque sur le sujet. Affaire à suivre…

Alain Bazot

Alain Bazot

Président de l'UFC-Que Choisir

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