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Eaux en bouteille

La qualité sanitaire des eaux du groupe Nestlé n’est pas garantie

Un rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, dévoilé le 4 avril par Le Monde et France Info, pointe « le niveau de confiance insuffisant » de la qualité des sources utilisées par Nestlé pour produire ses eaux en bouteille dans les Vosges et le Gard.

Nestlé s’enfonce dans la tourmente. Un rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), remis au ministère de la Santé mi-2023 mais dévoilé par Le Monde et France Info (1) le 4 avril 2024, estime que la qualité des eaux du groupe (Perrier, Contrex, Vittel, Hépar…) n’est pas respectée et qu’une surveillance élargie est nécessaire.

Le 30 janvier déjà, les deux médias révélaient un autre rapport, celui-ci de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), rendu au gouvernement en juillet 2022. Il alertait sur l’utilisation de traitements interdits par des industriels (2) pour masquer la contamination des eaux de source et minérales qu’ils mettent en bouteille. Des eaux pourtant théoriquement protégées des risques de contamination et de pollution, car puisées profondément dans les nappes souterraines.

Soupçons confirmés

Ces producteurs d’eau en bouteille jouent d’ailleurs sur ces arguments pour les vendre en moyenne 100 fois plus cher que l’eau du robinet. Au moins 30 % des marques avaient eu recours à ces traitements interdits par la réglementation, estimait l’Igas. Dont toutes celles de Nestlé Waters.

Le rapport de l’Anses révélé le 4 avril par Le Monde et France Info s’est penché plus particulièrement sur la qualité des eaux que puise Nestlé Waters pour remplir ses bouteilles. Les agences régionales de santé (ARS) du Grand Est et d’Occitanie, où Nestlé possède deux usines d’embouteillage, ont sollicité l’agence en ce sens. Dans un courrier de juin 2023, le directeur de l’ARS Occitanie justifiait cette sollicitation « au regard de la vulnérabilité » des ressources en eau du site de Vergèze (Gard), indique France Info. Il évoque la « présence de traitements interdits » dans l’usine, « une contamination régulière des eaux brutes sur au moins cinq des sept forages » et « la présence de micropolluants ».

Bactéries, PFAS et pesticides

Le rapport de l’Anses confirme ces doutes en pointant la contamination généralisée des sources d’eau minérale du groupe Nestlé en France. Que ce soit en Grand Est (Hépar, Vittel et Contrex) ou en Occitanie (Perrier). Il fait état notamment de contaminations microbiologiques régulières, révélatrices d’une contamination par des matières fécales (bactéries coliformes, Escherichia coli, entérocoques) sur de nombreux puits pouvant atteindre à plusieurs reprises une concentration élevée, précise France Info. Pour rappel, la réglementation sur les eaux minérales naturelles ne tolère la présence d’aucune bactérie dans l’eau, après comme avant l’embouteillage.

L’Anses pointe également la présence de traces de PFAS, appelés « polluants éternels », mais aussi d’autres micropolluants et pesticides. Concernant ces derniers, « les sommes sont variables mais peuvent dépasser 0,1 microgramme par litre pour certains captages », précise le rapport. Au-delà donc du seuil réglementaire pour les eaux minérales naturelles.

Des sources qui ne devraient plus être utilisées l’embouteillage

L’Anses conclut à « un niveau de confiance insuffisant concernant l’évaluation de la qualité des ressources, notamment en ce qui concerne la variabilité des contaminations et leur vulnérabilité microbiologique et chimique ». Elle recommande aux autorités de mettre en œuvre un plan de surveillance renforcé des usines Nestlé. Surtout, l’Anses estime que ces non-conformités détectées ne devraient pas conduire à la production d’eau en bouteille. Autrement dit : Nestlé ne devrait plus exploiter ces sources pour produire de l’eau minérale naturelle, mais seulement des eaux rendues potables par traitement ou d’autres boissons. À des prix bien plus abordables pour les consommateurs, donc.

Contacté par nos soins, Nestlé Waters France explique continuer à produire de l’eau estampillée minérale naturelle depuis ses sites de Vergèze et des Vosges, mais « avec les forages répondant aux normes strictes définies pour une eau minérale naturelle et conformément aux arrêtés préfectoraux régissant l’exploitation de nos sites ». Sur les six forages utilisés pour produire Hépar, une des eaux en bouteille du groupe, deux sont par exemple actuellement fermés.​​​​​​


(1) L’article du Monde et celui de France Info.
(2) Injection de sulfate de fer, utilisation de charbon actif, d’ultraviolets, microfiltration inférieure aux seuils autorisés…

Fabrice Pouliquen

Fabrice Pouliquen

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