Plainte pour non-respect du DSA
Après avoir constaté que la plateforme Temu ne garantit pas à ses utilisateurs un environnement en ligne sûr, prévisible et digne de confiance, l’UFC-Que Choisir, sur la base du Digital Service Act (ou « DSA »), nouvel outil réglementaire, dépose plainte contre cette dernière devant l’ARCOM. L’objectif est bien que cette plateforme respecte pleinement ses obligations légales et gagne en transparence.
Lancée en Europe en 2023, la plateforme chinoise Temu concurrence aujourd’hui des géants du e-commerce mais fait actuellement l’objet de nombreuses critiques. Temu est une plateforme en ligne où la plupart des produits vendus sont expédiés aux consommateurs directement depuis des usines ou des entrepôts chinois à des prix très bas avec une expérience utilisateur biaisée et une forte présence de publicités.
L’UFC-Que Choisir, avec l’appui de 16 autres associations européennes membres du Bureau européen des Unions de Consommateurs (BEUC) (1), utilise aujourd’hui le DSA pour remédier aux dysfonctionnements constatés préjudiciables aux intérêts et droits des consommateurs.
En effet, la plateforme Temu présente de nombreuses incompatibilités avec le DSA, réglementation applicable qui définit ce que les plateformes et les marchés en ligne doivent faire pour protéger les contenus et leurs utilisateurs (tels qu’assurer l’identité du vendeur dans les marchés en ligne, analyser les risques liés auxdits services et mettre en place les moyens pour les atténuer etc.).
Concrètement, l’UFC-Que Choisir ainsi que le BEUC et ses membres, ont constaté entre autres que :
- Temu ne fournit pas une traçabilité suffisante des professionnels qui vendent des produits sur la plateforme. Il s’agit d’une infraction majeure car les consommateurs doivent savoir à qui ils achètent et qui contacter en cas de problème, notamment pour obtenir un remplacement, une réparation ou un remboursement de leur produit ;
- Temu est tenue d’expliquer le fonctionnement de ses systèmes de recommandation et la valeur des critères de sélection pour l’affichage des produits individuels. Cependant, Temu ne le fait que de manière très rudimentaire, ce qui ne répond pas aux normes ;
- Temu ne fournit pas de hauts niveaux de sécurité aux mineurs en ne conditionnant pas l’accès au service à une vérification d’âge ;
- Temu utilise un certain nombre de techniques de manipulation, appelées « dark patterns », notamment par l’utilisation de faux compteurs de temps ou en créant un prétendu stock limité créant un sentiment d’urgence.
Ainsi, pour la toute première fois au titre du DSA, l’UFC-Que Choisir dépose plainte auprès de l’ARCOM afin de faire cesser les infractions de Temu par rapport à la réglementation européenne.
Moins de deux mois après le dépôt de plainte par l’UFC-Que Choisir et ses homologues européens, la Commission européenne a réagi en adressant à Temu, le 28 juin 2024, une demande d’informations en vertu du DSA. La plateforme est tenue de fournir des explications détaillées sur les mesures prises pour se conformer au DSA, notamment en ce qui concerne ses mécanismes de signalement de produits illicites, la conception de ses interfaces (en particulier concernant les interfaces trompeuses, ou « dark patterns »), la protection des mineurs, la transparence des systèmes de recommandation, et la traçabilité des vendeurs. Cette enquête pourra donner lieu à l’ouverture d’une procédure formelle et, éventuellement, des sanctions si les réponses fournies par Temu sont jugées insatisfaisantes.
Retrouvez la réaction de Marie-Amandine Stévenin en cliquant ici.
(1) Testachats/Testaankoop (Belgique), BNAAC (Bulgarie), dTest (Tchéquie), Forbrugerrådet Tænk (Danemark), Kuluttajaliitto ry (Finlande), EKPIZO and KEPKA (Grèce), Federacja Konsumentow (Pologne), DECO (Portugal), Spoločnosť ochrany spotrebiteľov (S.O.S.) Poprad (Slovaquie), CECU and OCU (Espagne), Sveriges Konsumenter (Suède), Altroconsumo (Italie), Consumentenbond (Pays-Bas) et ULC (Luxembourg). Le BEUC a, quant à lui, déposé plainte auprès de la Commission européenne.