par Elsa Casalegno
par Elsa Casalegno
Alerte, pénurie d’œufs dans les rayons ! Depuis quelques mois, les consommateurs constatent des ruptures de stock régulières au rayon des œufs frais. Rien de dramatique : la production augmente, mais elle peine à s’aligner sur la forte hausse de la demande.
Les œufs, victimes de leur succès ? À la faveur du Covid en 2020, puis de la crise inflationniste de 2022-2023, les Français se sont rués sur la moins chère des sources de protéines. Et ils y ont pris goût : en 2024, ils en ont englouti 226 par personne ! Et en 2025, « la consommation globale devrait même progresser de façon record : + 5 % », souligne l’interprofession de la filière, le CNPO. Conséquence de cet engouement, des ruptures de stock se produisent régulièrement dans les grandes surfaces. Selon le panéliste Nielsen IQ, le taux actuel de rupture serait de 13 %, « c’est-à-dire que sur 100 références d’œufs, il en manque en moyenne 13 dans les rayons », précise Alice Richard, directrice du CNPO. Pas de quoi paniquer pour autant : « Les magasins sont livrés tous les jours ou tous les deux jours, et les rayons sont donc vite réapprovisionnés », complète-t-elle.
Cette demande soutenue dure depuis déjà 3 ans. L’œuf est porté par son prix modéré dans un contexte d’inflation persistante, mais aussi « par une évolution des messages santé sur le cholestérol, par un plébiscite de la part des sportifs pour son apport protéique, et par un temps de préparation simple et rapide », explique Alice Richard.
En face, la filière n’arrive pas à suivre le rythme, malgré les 15 milliards d’œufs pondus chaque année (dont la moitié sont écoulés en grande surface). En effet, les élevages de poules pondeuses ont été affectés, comme l’ensemble des élevages avicoles, par les épidémies de grippe aviaire en 2022-2023, et le volume d’œufs a reculé de 3 à 4 %, suffisamment pour déséquilibrer un marché sous tension.
En parallèle, la suppression progressive des cages (qui concernent encore un quart des élevages) au profit de l’élevage au sol nécessite davantage de surface, induisant une baisse de près de 20 % du nombre de poules – donc d’œufs – dans les bâtiments.
« Pour répondre à la demande, il faudrait 1 million de poules en plus par an. Ce qui nécessiterait de construire 300 nouveaux poulaillers d’ici à 2030 », précise Alice Richard. Mais cela demande du temps : « Il y a des difficultés à faire accepter de nouvelles constructions. Même construire un poulailler bio de 12 000 poules reste compliqué, alors que la taille moyenne en France est de 16 000. » Ce type de projet exige plusieurs années de préparatifs, demandes d’autorisations, informations et négociations avec les riverains pour faire accepter le bâtiment, etc. Et les recours en justice restent nombreux.
La France est donc contrainte d’importer pour répondre à ses besoins. Ainsi, le pays est passé d’un taux d’autosuffisance de 99 % en 2024 à 96 % prévu en 2025. Rien de dramatique, mais il s’agit d’une dégradation régulière de notre autonomie alimentaire. Et d’où viennent ces œufs ? Parmi les principaux fournisseurs figurent l’Espagne, la Pologne et les Pays-Bas. Or, dans ces pays, les tailles d’élevage sont plus élevées, dépassant les 20 000 pondeuses. De plus, les Pays-Bas pratiquent beaucoup d’import-export, avec un risque de perte de traçabilité sur les produits. Patienter un jour ou deux et acheter tricolore, et de préférence sous signe de qualité, apporte davantage de garanties.
Près de la moitié (45 %) des œufs consommés en France sont vendus en magasin (le reste étant utilisé par la restauration hors domicile ou par l’industrie agroalimentaire), dont ceux produits en cage sont très minoritaires. En 2024, les parts de marché des différentes catégories sont :
Source : CNPO d’après Itavi, FranceAgriMer.
Le virus de la grippe aviaire a fait des ravages dans les élevages avicoles entre 2022 et 2023, sur tout le continent européen. Depuis, la France a mis en place un certain nombre de mesures de biosécurité, comportant la vaccination des canetons, le confinement des volailles sous bâtiment en cas de risque élevé, des mesures de prophylaxie en élevage, etc. Avec un certain succès : cette année, l’influenza aviaire semble épargner l’Hexagone, contrairement à ce qui se passe chez nos voisins espagnols, allemands et polonais.
Elsa Casalegno
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