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Morgan Bourven
La Cour de cassation, dans une décision récente, a libéré une compagnie aérienne de son obligation d’indemniser des passagers à la suite du retard d’un de ses vols. Elle a estimé que les passagers n’avaient pas apporté la preuve qu’ils étaient effectivement à bord de l’avion. Et pour cause : une telle preuve n’existe pas !
Le scénario est classique. La famille X achète trois billets d’avion auprès de la compagnie XL Airways France pour un aller-retour Paris-Miami. Le vol de retour arrive à Paris avec un retard de plus de 5 heures. La réglementation prévoyant une indemnisation en cas de retard ou d’annulation d’un vol (voir notre article sur les droits des passagers), elle en fait la demande afin d’obtenir ses 600 € d’indemnisation par passager. Surprise : leur demande est rejetée par la juridiction de proximité d’Aulnay-sous-Bois, au motif qu’ils ne peuvent pas prouver qu’ils étaient bien à bord de l’avion ! Le couple décide de se pourvoir en cassation.
Dans un arrêt du 14 février 2018, publié au bulletin, la première chambre civile de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi, estimant elle aussi que « les requérants ne produisent pas d’éléments de preuve tangibles attestant qu’ils aient embarqué et subi le retard prétendu de 5 heures à l’arrivée ».
Lors de leur demande d’indemnisation, la famille X a adressé à la compagnie aérienne une copie de sa réservation électronique, ainsi qu’une attestation de retard du vol concerné, qui n’est pas nominative. Or, « si les billets électroniques établissent le droit au transport avec une réservation qui a été acceptée et enregistrée […], ils n’établissent pas pour autant la preuve qu’ils se soient présentés à l’aéroport ou aient emprunté l’aéronef sur le vol litigieux », explique la Cour.
Concrètement, pour être indemnisé, les passagers auraient dû prouver qu’ils avaient bien embarqué dans l’avion. Or, dans le cas d’un vol sans bagage en soute, aucun document ne peut l’attester. Puisqu’il est désormais possible chez la majorité des compagnies de s’enregistrer par Internet ou sur une application mobile (l’enregistrement est même parfois automatique), les cartes d’embarquement ne sont pas une preuve de présence à l’aéroport. Seules les compagnies aériennes disposent et archivent – notamment pour des raisons de sécurité et de lutte antiterroriste – de la liste des passagers ayant effectivement embarqué dans leurs avions.
Avec cet arrêt, la Cour de cassation ouvre aux compagnies aériennes la possibilité de refuser l’indemnisation à un très grand nombre de passagers, au motif qu’ils ne peuvent prouver leur présence à bord. C’est un très mauvais coup porté aux droits des passagers, puisqu’il leur est demandé de fournir une preuve à laquelle ils ne peuvent avoir accès… ce qu’admet d’ailleurs la Cour, qui précise « que seul le transporteur aérien détient le listing informatique de cet enregistrement » !
Pour se protéger d’abus rendus possible par cette décision étonnante, en attendant une évolution de la réglementation, les passagers vont donc devoir faire preuve d’humour ou sortir le porte-monnaie pour prouver leur présence lors de l’embarquement. Quelques possibilités :
Morgan Bourven
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