Florence Humbert
Les lacunes de l'évaluation
Une enquête de l'Afssaps montre que les études réalisées par les fabricants de cosmétiques pour bébés afin d'évaluer les risques liés à l'utilisation de leurs produits ne sont pas suffisantes. Un gel moussant pour bébé a été retiré du marché et d'autres produits pourraient subir le même sort.
En septembre dernier, le Comité pour le développement durable en santé (C2DS) mettait en cause la sécurité sanitaire des cosmétiques pour bébés, qui contiennent entre autres des parabens ou du phénoxyéthanol dont les effets cancérogènes ou reprotoxiques sur l'animal ont été démontrés par de nombreux travaux scientifiques).
À la suite de cette alerte, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) a chargé un groupe de travail d'évaluer les produits incriminés. Depuis l'automne, 18 inspections ont ainsi été réalisées en liaison avec la Direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Elles ont porté sur 39 références de cosmétiques (gels douche, lingettes, crèmes, laits nettoyants, etc.). Les premiers résultats, rendus publics mardi 10 février, montrent que certains d'entre eux n'ont pas fait l'objet, de la part des fabricants et avant leur mise sur le marché, d'une évaluation suffisante des risques liés à leur utilisation.
Un mois pour se mettre en conformité
Depuis 2004, pourtant, les fabricants sont censés tenir à disposition des autorités sanitaires un dossier spécifique démontrant la sécurité des produits cosmétiques à destination des enfants de moins de 3 ans. Mais cette obligation n'est pas toujours respectée. Ainsi, à la suite de ces contrôles, un gel moussant corps et cheveux de Cattier-Dislab a été retiré du marché, faute de document sur les risques liés à son utilisation.
D'autres fabricants ont fourni des données jugées trop parcellaires et insuffisantes par l'Afssaps. En particulier, elles ne présentaient pas de conclusions étayées quant à leur innocuité en fonction du mode d'utilisation sur des bébés (nombre d'applications journalières, surface concernée, application sous le système semi-occlusif que constitue la couche, etc.). Ces fabricants ont 1 mois pour compléter leurs études et démontrer que leurs produits ne sont pas toxiques, faute de quoi ils risquent à leur tour d'être retirés du marché.
Ce bilan peut paraître surprenant étant donné que la composition des 39 cosmétiques analysés respecte la réglementation européenne. En effet, ils ne comportent ni substances interdites, ni quantité trop importante de composants soumis à restriction, et leur qualité sur le plan microbiologique est satisfaisante.
Le problème réside dans l'exposition régulière et répétée à ces substances sur une longue durée ainsi que sur les effets de possibles interactions entre elles, rarement prises en compte dans les dossiers d'évaluation des fabricants. La question de leur dangerosité à long terme est donc loin d'être réglée. D'autant que l'Afssaps souligne leur efficacité en tant que conservateurs (en particulier pour les parabens). Des qualités qui rendent très difficile leur remplacement par d'autres substances sans augmenter les risques d'allergies ou de contaminations microbiennes. Ainsi des analyses réalisées sur certains cosmétiques « bio » ont-elles révélé plusieurs cas de non-conformités sur le plan sanitaire. À suivre...