par Elsa Casalegno
par Elsa Casalegno
Le tribunal judiciaire de Paris a condamné TotalEnergies, dans un jugement du 23 octobre, pour pratiques commerciales trompeuses en raison d’allégations sur son « ambition d'atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 » et « d'être un acteur majeur de la transition énergétique ».
Cette décision fait suite à une action en justice initiée en 2022 par plusieurs associations environnementales (Les Amis de la Terre France, Greenpeace France et Notre Affaire à Tous) contre une campagne de communication lancée en 2021 par la major pétrolière à l’occasion de son changement de nom, devenant TotalEnergies en remplacement de Total.
Lors de cette campagne déployée sur Internet, dans la presse, à la télévision et sur les réseaux sociaux, l’entreprise prétendait être un acteur majeur de la transition environnementale. Dans leur assignation, les associations ciblent diverses affirmations :

Pour ces associations, « ces allégations sont fausses et susceptibles d'induire en erreur le consommateur sur la portée des engagements environnementaux » de TotalEnergies. Or, « dans un contexte où les consommateurs sont de plus en plus sensibles à l'impact environnemental des produits qu'ils consomment », ces allégations sont « de nature à influencer leurs décisions sur les marchés des produits du groupe, électricité, gaz et carburant ».
La défense de TotalEnergies n’a pas entièrement convaincu les juges. Si ces derniers ont débouté les associations environnementales d’une partie de leurs demandes (sur le gaz fossile et les agrocarburants), ils ont néanmoins jugé que plusieurs affirmations du groupe pétrolier portant sur son « ambition de contribuer à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 ensemble avec la société », en proposant à ses clients « des produits énergétiques de moins en moins carbonés » et d’être un « acteur majeur de la transition énergétique » ou encore « de [placer] le développement durable au cœur de [sa] stratégie, de [ses] projets et de [ses] opérations » avec référence à l’Accord de Paris, constituaient bel et bien une pratique commerciale trompeuse. Ils l’ont condamné « à verser à chacune des associations demanderesses la somme de 8 000 € en réparation de leur préjudice moral », ainsi que 15 000 € au total au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Le tribunal a également enjoint à TotalEnergies de « cesser de diffuser la communication » litigieuse encore visible en ligne sur le site du groupe dans un délai d’un mois sous peine d’une astreinte de 10 000 € par jour de retard, et de publier ce jugement.
Pour Les Amis de la Terre, il s’agit d’un « précédent juridique majeur contre la désinformation climatique des majors pétrolières » mettant en avant une soi-disant stratégie climatique ou un objectif de zéro émission carbone. ClientEarth, organisation environnementale à but non lucratif qui soutenait les trois ONG dans leur assignation, rappelle qu’il s'agit du « premier jugement au monde qui statue qu'un grand groupe pétrolier et gazier a trompé le public en verdissant son image ».
Il s’agit de fausses allégations environnementales faites par une entreprise, de nature à laisser penser aux consommateurs, de plus en plus sensibles à la question de l’impact environnemental de leur consommation, qu'elle est plus verte qu’en réalité. Le greenwashing constitue une « pratique commerciale trompeuse ». En cas de poursuites pénales, les sanctions peuvent aller jusqu’à une peine d’emprisonnement de 2 ans et une amende de 300 000 €, qui peut être portée, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à un pourcentage du chiffre d’affaires moyen annuel ou des dépenses engagées pour la réalisation de la publicité ou de la pratique constituant le délit. Les sanctions peuvent potentiellement être alourdies dans certains cas.
Elsa Casalegno
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