Pascale Barlet
Un an après, un sentiment d’abandon
Dans la nuit du 25 au 26 septembre 2019, à Rouen (Seine-Maritime), un violent incendie se propageait dans l’usine Lubrizol, classée Seveso seuil haut, plongeant la ville sous un épais nuage noir et toxique. Un an après l’accident, les Rouennais se plaignent encore des odeurs nauséabondes et se sentent abandonnés par les pouvoirs publics.
Un an après l’incendie de Lubrizol, de nombreuses questions restent en suspens. Quel impact sur la santé des citoyens de Rouen et sa région qui ont respiré durant des mois ces vapeurs toxiques ? Quelles conséquences sur l’environnement ?
Remis le 2 juin 2020, le rapport de la commission d'enquête chargée d'évaluer la gestion des conséquences de cet incendie dénonce un certain nombre de « négligences » de la part des responsables du site industriel, mais également des collectivités locales et de l’État, d’abord dans la gestion de l’information des citoyens, mais également dans le suivi sanitaire et écologique.
Une population mal informée
La commission souligne notamment le manque criant de culture de la sécurité et du risque industriel. Pourtant, les PPRT (plans de prévention des risques technologiques) ont été mis en place pour appliquer des mesures préventives aussi bien sur les zones habitées que sur l’ensemble des sites industriels, afin de protéger les vies humaines en cas d’accident. Encore faut-il que ces mesures soient appliquées à temps, par l’usine classée Seveso comme par les représentants de l’État ! Ainsi, ce 26 septembre 2019, les sirènes, invitant la population à rester chez elle, n’ont retenti que vers 8 heures du matin, soit très tardivement.
L’UFC-Que Choisir demande l’indemnisation des habitants
À peine trois mois après l’incendie, l’usine de Lubrizol était autorisée à reprendre partiellement son activité, suscitant l’incompréhension de la population. « Pour calmer les esprits, l’usine a pris l’initiative d’indemniser certains riverains, notamment des agriculteurs touchés par le nuage. Mais cette démarche ne s’est bien entendu pas appliquée à l’ensemble des citoyens, rapporte Alain Rouzies, représentant de l’UFC-Que Choisir au Conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst). L’association a demandé l’indemnisation par l’État de la population impactée, notamment par des nuisances écologiques, ainsi que la mise en place d’un outil de mesure des risques sanitaires et environnementaux dans le temps. Pour l’heure, pas de résultat. Mais l’UFC-Que Choisir se félicite tout de même de la prise en compte du contrôle de la qualité de l’air dans un arrêté préfectoral. »
Le jeudi 24 septembre, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili et le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin ont détaillé à Rouen les mesures pour la sécurité des sites industriels. Un an après l'incendie de Lubrizol, le gouvernement a reconnu des « couacs » dans l'accès à l'information. Aujourd’hui, les rouennais attendent des actes.