Perrine Vennetier
Toujours pas remboursé
Depuis le 1er mars, un décret autorise les médecins à prescrire une activité physique adaptée aux malades. Mais les contraintes sont nombreuses, sans qu’un remboursement ne soit prévu pour autant.
L’activité physique est un remède dont l’efficacité n’est plus à prouver. En prévention comme en traitement, elle offre des bienfaits comparables à de nombreux médicaments – sans leurs effets secondaires. L’entrée en vigueur du décret du 30 décembre 2016 « relatif aux conditions de dispensation de l’activité physique adaptée prescrite par le médecin traitant » était donc attendue. Mais changera-t-il vraiment quelque chose ?
Les conditions dans lesquelles le médecin pourra rédiger une ordonnance d’activité physique sont très strictes. Le dispositif est réservé aux personnes atteintes de maladies graves ou chroniques (ALD), comme les cancers, diabètes, insuffisances respiratoires, etc. Le médecin devra faire un bilan médical complet préalable. Il devra ensuite remplir un formulaire spécifique, en précisant la fréquence, l’intensité et la durée de la pratique – formulaire qui n’était toujours pas mis à disposition à la mi-mars. Il devra enfin adresser le patient à un intervenant, désigné en fonction des handicaps dont peuvent souffrir le patient. Ainsi, seuls les professionnels de santé (kinésithérapeutes, ergothérapeutes, etc.) pourront prendre en charge les personnes atteintes de limitations fonctionnelles sévères. Pour leur part, les titulaires d’un diplôme d’activité physique adaptée (APA) pourront prendre en charge les malades de moindre handicap. Les encadrants sportifs classiques sont, eux, un peu mis sur la touche.
Le décret impose donc de nombreuses contraintes, restreignant le sport sur ordonnance au domaine médical, sans pour autant prévoir un remboursement. En effet, aucune prise en charge par l’assurance maladie n’est prévue. Dans ces conditions, on peut légitimement mettre en doute l’intérêt pratique de ce décret. Rien n’interdisait jusque-là un médecin de prescrire de l’activité physique (il peut écrire sur son ordonnance tout type de soin). Dans certains rares cas, c’était même devenu un pilier de la prise en charge. La réadaptation physique après un infarctus du myocarde, programme bien établi (et remboursé) offre un bon exemple. Mais les obstacles qui l’empêchaient de le faire plus largement, dans d’autres pathologies, à plus long terme, n’ont pas disparu : l’absence de remboursement bien sûr mais aussi le manque de formation des médecins à ce sujet, le manque de temps, la méconnaissance ou l’absence de structures adaptées… « Le décret ajoute plus de freins que d’avantages et provoque de grandes incompréhensions, constate le Dr Patrick Bacquaert de l’Institut de recherche de la médecine, du bien-être et du sport santé (Hauts-de-France) qui anime une formation intitulée « Prescrire le sport sur ordonnance » en ligne pour les médecins. Peut-être que son seul intérêt, c’est de faire parler du sport santé. »