ACTUALITÉ
Cancers gynécologiques

Faut-il consulter tous les ans ?

Via deux spots vidéo postés sur Youtube, l’association Imagyn exhorte toutes les femmes à une consultation gynécologique annuelle, pour « aider à prévenir » les cancers de l’ovaire, de l’utérus et du col de l’utérus. Problème, se rendre tous les ans chez un médecin pour un examen gynécologique n’est, selon les données scientifiques actuelles, d’aucune utilité pour repérer ces trois cancers. Le dépistage du cancer du col se réalise tous les trois ans. Pour les deux autres cancers, il n’y a pour le moment pas de moyen sûr d’avancer le diagnostic. 

Mademoiselle Agnès, Enora Malagré, Chantal Thomass, Emma de Caunes, Aure Atika, etc. : l’association Imagyn a recruté parmi le gratin des personnalités féminines du showbiz français pour porter sa cause, la lutte contre les cancers gynécologiques. Dans deux vidéos diffusées depuis mai dernier sur Youtube, la brochette de stars s’évertuent à convaincre les femmes de tous âges de se faire examiner, une fois par an, « l’abricot », la « marguerite », la « zézette », le « pompon » ou encore, la « tarte aux poils ». Au-delà de la forme volontairement provocatrice, le message incitant à une consultation annuelle part d’une bonne intention. D’autant qu’en France, beaucoup de femmes ont déjà pour habitude de se plier à une visite rituelle chez le ou la gynécologue. D’un point de vue médical, pourtant, aucune donnée scientifique ne permet aujourd’hui d’affirmer qu’une surveillance annuelle fait reculer les principaux cancers de l’appareil génital féminin. 

Extrait de la vidéo de l’association Imagyn avec la styliste Chantal Thomass.

Pour le cancer du col de l’utérus, il est même bien établi que le frottis de dépistage des lésions précancéreuses n’a besoin d’être réalisé qu’une fois tous les trois ans, à partir de l’âge de 25 ans, car c’est un cancer qui se développe très lentement. Le dépistage est désormais organisé au plan national, et il sera calé sur ce rythme. L’enjeu : une plus large adhésion des femmes, et non pas une plus grande fréquence. 

Dans le cancer de l’utérus, le plus fréquent des cancers gynécologiques avec 8 000 nouveaux cas par an, une consultation annuelle n’est pas plus justifiée. Pour une raison simple : le toucher vaginal réalisé en routine ne le détecte pas. En plus, quand il survient, le cancer de l’utérus se manifeste rapidement par des symptômes clairs, à savoir des saignements entre les règles ou après la ménopause. Les femmes concernées consultent en général dès qu’elles constatent ces anomalies, les examens – échographie pelvienne et biopsie – sont réalisés sans délai, et aucun retard de diagnostic n’est à déplorer. Enfin, il touche surtout les plus de 60 ans. Convoquer toute la gent féminine chaque année chez le praticien quand seulement une partie est concernée est un peu excessif. 

Reste le cancer de l’ovaire, 4 500 cas par an. En raison de symptômes très discrets, il est la plupart du temps découvert à un stade avancé et disséminé. La survie à 5 ans ne dépasse pas les 40 %. Avancer le diagnostic constitue un véritable enjeu. Mais y parviendrait-on avec un examen annuel ? Malheureusement non. Car là encore, le toucher vaginal n’est pas suffisant. Une étude américaine sérieuse montre qu’il ne détecte que 4 % des cancers de l’ovaire. Quant à la réalisation ou à la prescription systématique d’une échographie pelvienne, elle n’est pas dans les habitudes des professionnels de santé. Et selon les études disponibles, elle n’a pas d’impact sur la mortalité du cancer de l’ovaire. 

Au final, même si l’association Imagyn conteste vigoureusement notre analyse, les données actuelles montrent qu’un examen gynécologique annuel n’améliore ni le diagnostic ni la prise en charge des cancers de l’appareil génital féminin. Seule la prévention du cancer du col de l’utérus impose un frottis régulier, mais tous les 3 ans. Il existe d’autres raisons de consulter régulièrement, comme la contraception ou la surveillance éventuelle des seins. Mais c’est selon les besoins de chacune. Et l’examen gynécologique, avec frottis et toucher vaginal, n’est pas un passage obligé à chaque fois. Gardez aussi en tête qu’une telle consultation peut également se faire chez un médecin généraliste ou chez une sage-femme libérale.

Anne-Sophie Stamane

Anne-Sophie Stamane

Rédactrice

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