Fabienne Maleysson
Fast fashion, fast déco : mêmes causes, mêmes conséquences
Surexploitation des ressources planétaires, volume considérable de déchets, main-d’œuvre exploitée… les meubles et éléments de décoration vite achetés, vite jetés, constituent un fléau au même titre que la mode jetable.
Dégâts considérables sur l’environnement et exploitation éhontée des travailleurs : les ravages de la fast fashion sont désormais bien connus. Mais le secteur de la mode n’est pas seul en cause. La décoration intérieure comporte aussi son lot de conséquences désastreuses, récemment dénoncées par les associations Zero Waste France, Les amis de la Terre et le Réseau national des ressourceries et recycleries.
Notant que la période du covid a été propice à un investissement massif dans l’aménagement de nos intérieurs, elles appuient ce constat par des chiffres impressionnants : entre 2017 et 2022, le nombre d’éléments d’ameublement mis sur le marché en France a augmenté de 88 %, passant de 269 à 505 millions d’unités. À lui seul, le chiffre d’affaires des ventes en ligne a connu une hausse de 53 % entre 2019 et 2021, selon une étude du quotidien économique Les Échos. Parmi les éléments les plus souvent achetés figurent d’ailleurs les bougies, dont les versions parfumées sont ultra-majoritaires, or nous déconseillons depuis longtemps leur usage.
Nouvelles collections incessantes
Fast fashion et fast déco reposent sur les mêmes ressorts, soulignent les auteurs du rapport, en particulier les quantités astronomiques mises sur le marché à prix faible et le renouvellement rapide des collections. Saint-Valentin, Noël, fête des mères ou tout simplement changement de saison (3 000 nouvelles références chaque année chez Maisons du Monde !), autant d’occasions d’inciter à acheter des objets dont on n’a pas toujours besoin.
Comme la fast fashion, la fast déco fait défiler les collections au fil des saisons
Alors qu’un meuble ou un élément de déco faisait son office pendant des dizaines d’années, et était même souvent transmis de génération en génération, le jetable est, là aussi, devenu la règle. Nombre d’enseignes au départ spécialisées dans l’habillement, comme H&M, Zara, La Redoute ou Shein ont d’ailleurs décliné leur offre dans le secteur de la maison.
Surexploitation du bois
Or, comme les vêtements, tous ces objets sont le plus souvent fabriqués dans des pays où la main-d’œuvre est corvéable à merci. Concernant l’impact environnemental, la surexploitation du bois est la conséquence la plus dramatique attribuable au secteur, comme le montre le documentaire Ikea, le seigneur des forêts, disponible sur arte.tv. Sans oublier que les articles tels que coussins, plaids ou encore rideaux impliquent les mêmes dégâts sur l’environnement que le prêt-à-porter : usage de pesticides et consommation importante d’eau pour le coton, extraction de ressources pétrolières et pollution des océans pour les matières synthétiques. Autre point commun : les ressourceries constatent une baisse notable de la qualité des meubles, qui compromet leur réemploi.
La fin de vie de ces objets contribue aussi grandement à leur impact environnemental. Concernant les meubles hors d’usage, moins de la moitié sont collectés par la filière dédiée et seule 45 % de cette collecte est recyclée, le reste partant en incinération ou à la décharge. Le réemploi, quant à lui, est entravé par le fait que les associations n’ont pas toujours les moyens de collecte ni les surfaces de stockage nécessaires et par l’insuffisance des ressources financières qui leur sont octroyées. Quant aux éléments de décoration, ne bénéficiant pas d’une filière chargée d’organiser leur fin de vie, ils finissent le plus souvent dans un incinérateur. Mettre sur pied une telle filière fait partie des demandes des associations, au même titre que le soutien au réemploi et à la réparation.