CONSEILS
Droits de succession

Comment obtenir un délai pour le paiement des droits ?

Six mois, c’est le délai dans lequel les héritiers doivent, à compter du décès, déposer la déclaration de succession et payer les droits. Ils peuvent demander des facilités de paiement à l’administration fiscale. Paiement fractionné, différé, étalement… Tour d’horizon des solutions possibles.

Comment faire si les héritiers n’ont pas les fonds nécessaires pour payer ?

Exceptionnellement, et sous conditions, le paiement peut être différé ou fractionné, c’est-à-dire, payé à crédit. Pour les demandes déposées en 2023, le taux d’intérêt appliqué pendant toute la durée du crédit est fixé à 1,7 %. Attention, dans la mesure où les héritiers sont solidaires pour le paiement des droits (voir ci-dessous), ceux qui souhaitent payer à crédit ne peuvent le faire qu’avec l’accord de ceux qui payent comptant.

Le paiement fractionné permet un étalement du paiement sur quel délai ?

Le paiement fractionné revient à payer les droits en plusieurs versements égaux étalés dans le temps, sur une période maximale de 1 an. Le premier paiement doit être effectué en même temps que le dépôt de la déclaration de succession ; les deux suivants doivent intervenir à intervalles réguliers, la période entre deux versements ne devant pas dépasser 6 mois.

Par exemple, si les droits de succession s’élèvent à 45 000 €, le 1er tiers de 15 000 € est versé lors de l’enregistrement de la déclaration de succession, sans intérêts à payer. Les deux autres tiers sont payés à 6 mois d’intervalle, augmentés des intérêts calculés sur les droits restants dus, en proratisant sur 6 mois le taux annuel. Ainsi :

  • pour le 2e tiers, il conviendra de verser 15 000 € majorés de 255 € d’intérêts (30 000 x 1,7 % x 6/12) ;
  • pour le 3e tiers, 15 000 € majorés de 127,50 € d’intérêts (15 000 x 1,7 % x 6/12).

Un étalement plus important dans le temps peut-il être accordé ?

Oui, le délai de 1 an peut être porté à 3 ans lorsque la succession comprend au moins la moitié de biens « non liquides », c’est-à-dire des biens qui ne peuvent pas, par nature, être vendus rapidement, tels que des biens immobiliers, des parts de société de personnes, des droits d’auteur, des objets d’antiquité, d’art ou de collection… Il est alors possible de faire 7 versements.

Si ce délai est insuffisant, dans quelles conditions les héritiers peuvent obtenir un différé de paiement ?

Le paiement différé est réservé aux héritiers qui recueillent des biens en nue-propriété. Ils sont alors autorisés à payer les droits de succession dans les 6 mois qui suivent le décès de l’usufruitier. Cette situation est fréquente lors du décès du premier parent. Le veuf ou la veuve, c’est-à-dire, le survivant, opte souvent pour recevoir l’usufruit de la succession. Il peut ainsi continuer à occuper les biens immobiliers, en percevoir les revenus tout en étant exonéré de droits de succession. Les enfants recueillent quant à eux la nue-propriété et sont soumis au paiement au-delà de l’abattement personnel de 100 000 €. Cette facilité de paiement est toutefois plus coûteuse et surtout aléatoire.

Deux possibilités sont offertes pour le paiement des intérêts :

  • soit un paiement d’intérêts tous les ans jusqu’au décès de l’usufruitier ;
  • soit un différé sans intérêts mais les droits de succession sont alors calculés sur la pleine propriété des biens (et non que sur la nue-propriété).

Selon l’âge de l’usufruitier ce choix n’est pas facile, cela revient à parier sur son espérance de vie. Il est évident que lorsque l’usufruitier est jeune, payer un intérêt annuel peut s’avérer fort coûteux. À l’inverse, s’il est âgé, choisir le calcul des droits sur la totalité de la valeur des biens de la succession s’avère onéreux.

Comment se calcule précisément le coût du différé de paiement ?

Imaginons la succession d’un homme qui s’élève à 500 000 €. Elle est recueillie par son épouse, âgée de 78 ans, qui choisit de la recevoir en usufruit et par les deux enfants qui se partagent la nue-propriété. La veuve est exonérée de droits de succession. Les enfants sont quant à eux redevables de droits calculés sur un pourcentage de la valeur totale des biens, variable selon l’âge de leur parent usufruitier, en fonction d’un barème défini à l’article 669 du Code général des impôts.

Dans notre exemple, cette valeur s’élève à 70 % compte tenu de l’âge du parent survivant. Si l’on poursuit notre exemple et que l’on suppose que la mère décède 10 ans plus tard, les enfants peuvent :

  • choisir de verser 1,70 % d’intérêts par an pendant 10 ans. Les droits sont calculés sur la nue-propriété de la succession (70 % de 500 000 €), soit 26 388 € à payer auxquels s’ajoutent 4 486 € d’intérêts pour un total de 30 874 € ;
  • ou préférer ne pas payer d’intérêts mais accepter que les droits de succession soient calculés sur 100 % de la succession (500 000 €), soit un total de 56 388 €.

Attention, la vente du bien met fin au différé de paiement.

L’administration fiscale est-elle tenue d’accepter la demande de crédit ?

Elle peut accepter ou refuser la demande qui doit être formulée par écrit lors du dépôt de la déclaration de succession, sur le formulaire ou sur une lettre jointe. Il convient de fournir une offre de garanties, telles qu’une hypothèque sur un bien immobilier de la succession par exemple, une caution personnelle, le nantissement d’un portefeuille de valeurs mobilières ou d’un fonds de commerce... Tous les héritiers ne sont pas obligés d’adopter la même attitude. Certains peuvent choisir de payer immédiatement ce qu’ils doivent, tandis que d’autres peuvent préférer payer à crédit.

En cas de refus de crédit et de retard de paiement, quelles pénalités sont à craindre ?

À partir du premier jour du 7e mois suivant le décès, il est appliqué automatiquement un intérêt de retard au taux mensuel de 0,20 % sur toutes les sommes dues. Passé le 12e mois après le décès, une pénalité de 10 % s’ajoute. Enfin, si les héritiers reçoivent une mise en demeure par lettre recommandée et que la situation n’est pas régularisée dans le délai imposé par l’administration fiscale, la majoration peut atteindre 40 % de la totalité des droits de succession dus. Mieux vaut alors anticiper les difficultés et obtenir un crédit bancaire ou revendre certains biens pour financer les droits à payer.

Les droits de successions doivent-ils obligatoirement être payés en numéraires ?

Oui par chèque, virement, carte bancaire. Toutefois, au-delà de 10 000 € de droits de succession, les héritiers peuvent demander à payer via la remise d’œuvres d’art, de livres, d’objets de collection, de documents ayant une haute valeur artistique ou historique, ou via certains immeubles situés dans les zones d’intervention du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres ou encore via des bois et forêts ou espaces naturels pouvant être incorporés au domaine forestier de l'État (art. 1716 bis du Code général des impôts).

Les héritiers sont-ils solidaires du paiement des droits de succession ?

Oui sauf le conjoint ou le partenaire de pacs survivant qui sont exonérés de droits de succession. En conséquence, l’administration fiscale peut réclamer la totalité de l’impôt à l’un quelconque d’entre eux. Seule condition, elle doit notifier à celui des cohéritiers contre lequel elle exerce son droit de poursuite un avis de mise en recouvrement préalable (1). En revanche, il n’y pas de solidarité entre les héritiers et les légataires (c’est-à-dire ceux qui héritent en vertu d’un testament), ni entre les légataires.

À noter. En cas de succession d’une entreprise individuelle ou de titres d’une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, les héritiers peuvent demander à bénéficier d’un différé de paiement pendant 5 ans (pendant lequel ils ne paient, en principe, que les intérêts) puis d’un paiement fractionné sur les 10 années suivantes, à raison d’un vingtième des droits tous les 6 mois.

Bon à savoir. Un simulateur en ligne permet d’estimer les droits de succession à la suite du décès d’un proche en fonction du montant hérité et du lien de parenté.

(1) Cass. Com., 8/11/2005, pourvoi n° 03-19570.

Rosine Maiolo

Rosine Maiolo

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