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Télévision ultra haute définition

L’UHD est encore loin

Les premiers téléviseurs ultra haute définition (UHD) ont fait leur apparition dans les rayons des distributeurs. Mais les contenus produits dans ce mode sont inexistants… Et cela risque de durer.

Dans la catégorie des très grands écrans (165 cm, 213 cm…), les téléviseurs ultra haute définition (UHD), également appelés 4K, ont fait leur apparition sur le marché. Chers (les prix commencent à 2 500 €), ils se distinguent par une résolution quatre fois supérieure à celle des téléviseurs haute définition (HD) : 8,3 Mpixels pour les premiers contre 2,07 pour les seconds.

Fin 2013, nous avons testé trois modèles (les Samsung UE 85S9, LG 84 LM960V et Sony KD-65X9005A) sur lesquels nous avons envoyé des séquences réellement tournées en UHD. Nous avons alors conclu à la réussite du pari. Image très nette et bien contrastée, absence de directivité, son de bonne facture : le « plus » qualitatif est réel. Les professionnels parlant pour leur part d’effet « waouh » lorsqu’ils font visionner des images UHD aux consommateurs lors de démonstrations en magasin.

Dans les mois à venir, des téléviseurs UHD vont d’ailleurs être proposés dans des gammes d’écrans plus modestes. Des industriels chinois se sont également lancés dans l’aventure. Ils annoncent des appareils 4 K à des « prix cassés ». « Mais ce ne sont pas de vrais téléviseurs UHD », persifle le représentant d’une grande marque…

Cela étant, il y a aujourd’hui comme un problème ! Si les fabricants de téléviseurs sont prêts, ils doivent se sentir un peu seuls. Pour qu’un appareil UHD ait un réel intérêt, encore faut-il qu’il soit alimenté par des images captées et diffusées dans ce mode. Or, de ce côté-là, on en est encore aux préliminaires…

Le premier frein tient à la diversité des normes et des standards qui coexistent. Une unification s’impose tant d’un point de vue technique que réglementaire. Des discussions sont en cours et il faudra plusieurs longs mois, voire des années avant qu’elles n’aboutissent.

Côté fabrication des programmes, des films sont déjà tournés en UHD. Mais de nombreuses boîtes de production ne sont pas en mesure de fournir des images dans ce mode. « On nous passe des commandes pour toujours moins cher. Et on nous demande de penser à l’UHD alors que tout le monde n’est même pas encore en HD », note avec ironie et amertume un producteur.

La remarque vaut notamment pour les chaînes présentes sur la TNT, la télévision numérique terrestre. Si quelques-unes sont déjà diffusées en HD (TF1, France 2, Canal +…), la majorité le sont encore en standard (SD). Il faut en effet du temps et des moyens avant d’opérer une telle bascule. Pour de nombreux opérateurs, l’UHD est, de fait, encore loin des préoccupations quotidiennes.

La diffusion des grands événements sportifs en UHD pourrait faire accélérer le rythme. Mais, là encore, on est toujours dans les starting blocks. Ainsi, à l’occasion de la prochaine Coupe du monde de football, cet été au Brésil, seule la finale devrait être filmée en ultra haute définition.

Amener des programmes UHD jusqu’au téléviseur compatible du consommateur suppose par ailleurs de lever plusieurs incertitudes. Passer par l’ADSL ? Cela pourrait être compliqué, faute de débit suffisant. La voie hertzienne (la réception se fait via l’antenne râteau) ? Les bandes de fréquences réservées à la télévision devraient être réduites dans les années à venir… alors que l’UHD a besoin de place. Et il serait suicidaire pour les pouvoirs publics d’exclure de la très haute définition tous ceux qui reçoivent encore la télévision par ce biais (60 % des foyers français)… Quelques-unes des questions qui attendent des réponses.

Le particulier sera quant à lui contraint de s’adapter, de posséder l’équipement ad hoc : téléviseur, box ou adaptateur compatible… Des changements plus ou moins « obligatoires » qui n’iront pas sans quelques grincements de dents du côté des consommateurs, « fatigués » par les sollicitations régulières (TNT, HD…) pour revoir leur installation !

Alors, pour donner un coup de pouce au marché des téléviseurs UHD, les fabricants sortent d’autres arguments… un peu tirés par les cheveux. À leurs yeux, aujourd’hui, un téléviseur ne sert pas « qu’à » regarder des chaînes de télévision. « On y visionne, par exemple, les nombreux films personnels que l’on tourne avec les caméscopes ou smartphones UHD désormais disponibles », affirme l’un d’eux, comme pour tenter de se rassurer.

Car pour le secteur, l’angoisse est de revivre avec l’UHD le fiasco de la 3D, la télévision en relief. Les industriels ont massivement mis sur le marché des modèles équipés mais la 3D n’a jamais rencontré son public, la nécessité pour le téléspectateur de devoir chausser des lunettes et l’absence de contenus adaptés lui ayant été fatales.

Malgré tous les obstacles qu’il reste à franchir, on nous promet que l’UHD devrait connaître son vrai démarrage vers 2018. Côté consommateur, il est donc prématuré de se précipiter sur un téléviseur ultra haute définition hors de prix ou sur l’autre innovation du moment, les téléviseurs à écran OLED. Même si le discours ambiant des fabricants et distributeurs va essayer de le convaincre du contraire !

Arnaud de Blauwe

Arnaud de Blauwe

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