Loi de modernisation de l'économieDes mesures libérales aux vertus douteuses pour les consommateurs
Alors que les consommateurs font face au retour de la grande inflation des étiquettes, l'UFC-Que Choisir constate que rien dans le projet de loi de modernisation de l'économie, adopté aujourd'hui en Conseil des Ministres, ne permet de dynamiser la concurrence dans les hypermarchés.
Sur l'urbanisme commercial, mesure théoriquement phare de ce projet, le gouvernement se contente d'un quasi statu quo.
En effet, les lois Royer et Raffarin, ayant favorisé des situations de monopole local dans la grande distribution, ne sont pas remises à plat. Les Commissions Départementales d'Equipement Commercial (CDEC), pourtant condamnées par l'Europe, sont ainsi maintenues et aucun verrou à la création de nouvelles surfaces concurrentes, quand elles sont nécessaires, n'est supprimé. Quant au contrôle de l'intensité concurrentielle dans les zones de chalandises, réclamé par les autorités (Conseil de la Concurrence, rapport Attali, rapport Hagelsteen), il ne figure pas dans le projet.
Le projet de loi de modernisation de l'économie n'a comme seul angle le renforcement des libertés des plus puissants, et omet totalement de renforcer les droits des consommateurs. Dans une société libérale, le plus de libertés des uns, doit être équilibré par un plus de responsabilités et donc plus de droits pour les autres !
Or, le projet de loi ne contient aucun volet consommation et les très rares dispositions intéressant à la marge les consommateurs, ne sont que des réformes à minima. Pourtant des engagements consuméristes ambitieux avaient été pris par le Président de la République et le gouvernement(1). La LME devait les concrétiser en matière de prix dans les grandes surfaces, de mobilité bancaire, de lutte contre les clauses abusives, et, bien sûr, traduire la promesse présidentielle d'introduire dans notre droit une « action de groupe à la française ».
Devant le mutisme et les insuffisances du texte gouvernemental, l'UFC-Que Choisir constate donc avec amertume que la clause de rendez-vous n'a pas été respectée et que les consommateurs sont une nouvelle fois les grands perdants des arbitrages ministériels. La déception est à la hauteur de l'attente : immense !
Pour que ce projet n'omette pas l'intérêt des consommateurs, l'UFC-Que Choisir appelle donc aujourd'hui les parlementaires à assumer leurs responsabilités, c'est à dire :
- leur mission de contrôle en rappelant au gouvernement les engagements consuméristes pris devant eux,
- leur mission législative en usant largement de leur droit d'amendement pour que les mesures libérales de ce projet de loi ne soient pas au seul bénéfice des plus forts.
(1) En effet, dans le cadre de la lettre de mission qu'il a adressée à Christine LAGARDE en juillet 2007, Nicolas SARKOZY avait clairement indiqué que « la loi de modernisation de l'économie prévue pour la fin de l'année 2007 devra comprendre pour sa part un certain nombre de dispositions renforçant la protection des consommateurs et protégeant le pouvoir d'achat. Avec le secrétaire d'Etat chargé de la Consommation et du tourisme, vous serez particulièrement vigilants en ce qui concerne les prix dans les grandes surfaces, les pratiques bancaires, les nouveaux services. Vous créerez une action de groupe à la française »... Cet engagement présidentiel a été relayé à maintes reprises par le gouvernement. Ainsi Christine LAGARDE, Ministre de l'Economie a-t-elle pu indiquer que « le Président de la République et le Premier ministre ont-ils souhaité que, pour la fin 2007, dans le cadre d'une « loi de modernisation de l'économie » devant comprendre un certain nombre de dispositions renforçant la protection des consommateurs et protégeant le pouvoir d'achat, puisse être créée une « action de groupe à la Française ». ». (Réponse publiée au JO le 04/09/2007 page, 5453). Le Garde des Sceaux s'est également fait l'écho de cette préoccupation : « les réflexions et les consultations seront menées dans la perspective du projet de loi de modernisation de l'économie prévu au printemps 2008. » (Réponse publiée au JO le 22/01/2008 page, 549). En décembre, lors de la discussion du projet de loi relatif au développement de la concurrence au service des consommateurs, Luc CHATEL, a, à plusieurs reprises, affirmé qu'il soumettrait ses propositions sur l'action de groupe « au Parlement à l'occasion de l'examen du projet de loi sur la modernisation de l'économie » (JO des Débats de l'Assemblée nationale, Année 2007. - No 70 [2] A.N. (C.R.)).