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E-santé

64 % des applis ne sont pas bien évaluées

Une majorité des applications utilisées dans le cadre du suivi médical, de télésurveillance notamment, n’ont pas fait l’objet d’études cliniques ad hoc avant leur mise sur le marché. Ce sont les enseignements préoccupants d’une étude parue dans le Journal of Medical Internet Research.

En 2020, quelque 250 applications d’e-santé sont apparues chaque jour, soit 90 000 nouveaux outils en un an ! Plus ou moins sérieuses, plus ou moins utiles… Comment faire le tri ? Partant de cette question, les instigateurs d’une étude française (1) – parmi lesquels le Pr Fabrice Denis, président de l’Institut national de l’e-santé – ont mis au point un questionnaire de 26 items afin de comparer la pertinence clinique de ces applis, sur la base des recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS), de la Société européenne d’oncologie et des associations de patients.

Ils ont ainsi passé au crible 68 applis, concernant majoritairement le suivi de patients atteints d’un cancer ou d’une pathologie cardiaque, mais aussi ceux souffrant de douleurs chroniques. Ces applis surveillent à distance l’observance des traitements ainsi que leurs effets secondaires et délivrent des messages de prévention. Citons par exemple, mais sans possibilité de dévoiler leurs notes, Résilience ou Cureety dans la surveillance des traitements anticancéreux ; Bliss, un casque de réalité virtuelle à visée antidouleur, ou encore Présage pour détecter le risque d’hospitalisation chez les personnes âgées. Il ne s’agit pas d’applis de bien-être (type Petit Bambou) ou de tracking de l’activité physique, mais bien d’outils utilisés par des personnes malades.

« Une nette marge d’amélioration »

Les résultats sont préoccupants : seules 21 % de ces applis ont fait l’objet d’études randomisées, considérées comme le niveau de preuve maximal pour démontrer leur efficacité, avant leur commercialisation ; 15 % d’entre elles ont étudié des données de santé en vie réelle, une méthodologie d’évaluation moins « béton », mais qui reste néanmoins utile. Et pour les 64 % restantes, aucune étude clinique pertinente n’a été réalisée ! Ces résultats posent question sur la qualité et l’utilité de ces nouvelles « solutions ».

« Notre étude montre qu’il y a une nette marge d’amélioration ! Les associations de patients veulent des informations transparentes sur l’utilité clinique de ces outils et elles ont bien raison. Il faut que les évaluations soient renforcées, notamment pour les développeurs qui demandent le remboursement de leur appli », souligne le Pr Denis. Des conclusions qui rejoignent celles du Conseil numérique en santé de novembre 2021.

D’autre part, cette étude montre que parmi les critères retenus par les développeurs, seuls 5 % intègrent le taux de survie globale à long terme. C’est pourtant le critère n1 dans le suivi des patients atteints d’un cancer ou d’une pathologie cardiaque.

Les développeurs misent plutôt sur la satisfaction des utilisateurs (ergonomie de l’outil, fréquence d’utilisation…) et l’amélioration (ressentie) de leur suivi médical. Des critères importants, certes, mais insuffisants sans indication médicale pertinente. À quand des évaluations dignes de ce nom sur le marché de l’e-santé ?

(1) https://www.jmir.org/2022/7/e39590

Sophie Cousin

Sophie Cousin

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