
par Boris Cassel
par Boris Cassel
Dans un rapport non public, l’Inspection générale des finances (IGF) et l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) dressent un panorama des tarifs que souhaitent pratiquer les organisateurs des Jeux olympiques d’hiver de 2030. Selon ce document, que nous avons pu consulter, il faudra débourser, en moyenne, 136 € pour s’offrir une place. Seul un billet sur trois coûtera moins de 50 €. Les tarifs grimperont jusqu’à 1 300 €. Les organisateurs escomptent vendre 2 millions de places lors des Jeux olympiques et paralympiques, soit 43 % de plus que lors des précédentes olympiades d’hiver…
Les Jeux olympiques et paralympiques d’hiver se dérouleront respectivement en février et mars 2030 dans les Alpes françaises. Puisque la candidature française a été déposée par deux régions (Auvergne-Rhône-Alpes et Sud-Paca), les épreuves seront éclatées sur quatre sites distants de 450 km, un terrain de jeu allant du lac Léman à la mer Méditerranée. Les spectateurs des JO d’hiver devront prévoir un joli budget transport ! Il leur faudra, en plus, mettre pas mal d’argent de côté pour acheter leurs places. C’est en tout cas ce que l’on peut déduire de la lecture d’un rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR), intitulé « Mission d’appui à la consolidation budgétaire des Jeux Alpes 2030 ».
Rendu au gouvernement en mars 2025 mais jamais publié, ce rapport qui « vise à établir les conditions de la soutenabilité financière des Jeux olympiques » – que nous avons pu consulter – décrit, entre autres, la stratégie des organisateurs en matière de billetterie. Espérant récupérer 283 millions d’euros grâce à la vente de tickets et « d’hospitalités » (formules haut de gamme, incluant des événements spéciaux), les organisateurs planchent sur la mise sur le marché de 2 millions de places. C’est, selon ce rapport, 43,54 % de plus que la moyenne des précédentes olympiades d’hiver. Joli défi ! À quel prix trouverons-nous ces billets ? Le tarif moyen serait de 136 € pour les Jeux olympiques et 30 € pour les Jeux paralympiques. Des prix que les inspecteurs qualifient de « réalistes, voire peu ambitieux ». Pour une famille de quatre personnes, il faudra donc mettre en moyenne 544 € sur la table pour assister à une épreuve des JO. Pas sûr que tout le monde trouve cela « peu ambitieux »…
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Entrons un peu dans le détail car, en la matière, le prix moyen d’un billet tout sport et toutes catégories de places confondus ne signifie pas grand-chose. Pour évaluer la grille tarifaire, les rapporteurs ont regardé celle des Jeux olympiques de Milan-Cortina qui se dérouleront à quelques kilomètres de là, en février 2026. Ils ont fait de même avec les Jeux olympiques d’été de Paris 2024, dont la tarification avait fait polémique. En 2030, le prix le plus bas devrait être de 15 €. Il s’agit de places pour « voir » une épreuve de bobsleigh, sport qui consiste, rappelons-le, à dévaler une piste à 150 km/h caché dans une caisse à savon… Les inspecteurs notent qu’aux Jeux olympiques de Milan-Cortina, en Italie en février 2026, le premier prix sera à 20 €, plus élevé donc que pour Alpes 2030. Ensuite, indiquent-ils, « 17 % des billets d’Alpes françaises 2030 sont sous la barre des 24 €, contre seulement 10 % pour Paris 2024 ». Enfin, pointent-ils, en gras dans le texte, « pour les JO de Paris 2024, 50 % des 10 millions de billets coûtaient 50 € ou moins, contre 32 % pour les Alpes françaises 2030 ». Bref, les petits prix vont être difficiles à dénicher.
Remontons encore un peu dans la grille tarifaire. « S’agissant de la proportion de billets inférieurs à 100 €, elle s’élève à 66 % pour Alpes françaises 2030, contre 57 % pour Milan-Cortina 2026 ». Résumons. Un tiers – environ – des billets coûteront 50 € ou moins. Un tiers entre 50 € et 100 €. Dans le tiers restant (ceux à plus de 100 €), les prix pourront s’envoler. « Le billet le plus cher atteint 1 300 € et concerne la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques dans la catégorie A. D’autres sessions se distinguent également par des prix élevés, notamment la cérémonie de clôture, avec un billet à 1 000 € en catégorie A. Ce tarif, bien qu’élevé, est significativement inférieur à celui pratiqué pour Paris 2024, où les billets atteignaient jusqu’à 2 700 € », expliquent les rapporteurs. Regardons du côté des sports. « Les épreuves sportives les plus onéreuses incluent assez logiquement la finale de hockey masculin (900 € en catégorie A) et le patinage artistique (660 € en catégorie A). » Considérant que les prix sont plus élevés à Milan, notamment pour le hockey, les rapporteurs estiment qu’un « rehaussement des tarifs des billets les plus élevés apparaît envisageable ».
L’enjeu autour de la billetterie est central. Car plus les JO ramènent de recettes de billetterie, moins les fonds publics seront sollicités, dans un projet de Jeux olympiques qui devrait laisser une ardoise conséquente aux finances publiques. Le budget de l’organisme chargé d’organiser les JO (Cojop) devrait, selon ce rapport, atteindre les 2,19 milliards d’euros, qu’ils proviennent de recettes privées (partenariats, billetteries, redevances, etc.) ou publiques. Alors que les promoteurs du projet évoquaient jusqu’ici une contribution publique (État et régions organisatrices) de 462 millions d’euros, le « besoin de financement » – en clair, l’ardoise laissée aux contribuables – serait en réalité de 724 millions d’euros, soit 57 % plus élevé…
Créé en février dernier par l’État, le Comité national olympique et sportif français, le Comité paralympique et sportif français, et les régions à l’origine de la candidature française (Auvergne-Rhône-Alpes et Sud-Paca) pour organiser concrètement ces festivités sportives, le Cojop aura, entre autres, la lourde charge d’affiner le budget de l’événement. Contacté par Que Choisir, le Cojop ne nie pas l’existence des scénarios financiers cités dans le rapport de l’IGF. Mais il en relativise la portée, le projet étant encore amené à évoluer. « Les chiffres présentés jusqu’ici étaient des estimations basées sur l’expérience française dans l’organisation de grands événements, notamment Paris 2024 mais aussi de nombreuses compétitions internationales de sports d’hiver », explique-t-on au Cojop. Avant de préciser : « Si des estimations ont été réalisées dans la phase de candidature, le Cojop, récemment constitué, travaille à valider et préciser les premières hypothèses budgétaires. » Objectif : disposer d’un budget plus élaboré « dans le courant de l’automne ». D’ailleurs, les questions de billetterie seront aussi amenées à être peaufinées : « Les hypothèses de revenus concernant notamment la billetterie vont être étudiées et approfondies par les équipes du Cojop, en cours de recrutement. D’ici à l’arrivée d’un responsable billetterie, le Cojop s’appuie sur des experts de Paris 2024 et du Comité international olympique (CIO). Nous sommes confiants sur le succès des Jeux de 2030 et sur notre capacité à définir une stratégie pour créer un engouement populaire et permettre une bonne accessibilité de la billetterie tout en maximisant les revenus. »
Boris Cassel
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