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Logement basse consommation

Déception

La construction d’immeubles à haute performance énergétique près de Grenoble devait permettre des économies d’énergie substantielles. Mais entre la théorie et la pratique : une différence de 35 %.

Pendant une année, la consommation d’énergie de huit immeubles de logements construits en 2008 et 2009 dans la ZAC de Bonne, à Grenoble, a été enregistrée en détail, à raison de 400 à 700 mesureurs par bâtiment. L’objectif assigné à ces logements était de 42 kilowatts par an et par mètre carré de surface habitable (kWh/an/m2Shab). La consommation réelle est nettement supérieure puisque, en moyenne, elle atteint 53 kwH, soit 35 % de plus que prévu. En certains points, l’objectif est tout proche, mais en d’autres points, on atteint les 73 kWh, soit un écart de 70 % avec la théorie.

La première cause mise en avant par le cabinet Enertech, en charge de l’étude, n’est pas technique, mais humaine. La température intérieure devait être de 19 °C. En pratique, les appartements sont chauffés à 21 °C, avec des pointes à 25 °C ! Sachant que les derniers degrés sont les plus coûteux, passer de 19 à 21 °C en plein hiver augmente la consommation de 25 à 30 %. S’ajoutent à cela des défauts techniques : étanchéité et ponts thermiques ignorés, régulations à revoir, ventilation double flux à revoir, etc. Point assez troublant : les concepteurs des bâtiments, pour définir l’objectif de 42 KWh/an/m2, avaient anticipé la surchauffe. Ils étaient partis de l’idée que les habitants, ignorant les 19 °C préconisés, chaufferaient à 21 °C. Bien vu, mais l’impact a apparemment été mal évalué. Quant au système de ralenti de nuit, qui doit abaisser la consommation pendant les périodes de sommeil, il est mal utilisé.

Trop de sous-estimations

Les résultats sont plus conformes aux modèles en ce qui concerne la régulation des températures en été. Les logements dépassent en moyenne rarement les 28 °C, température définie comme le seuil de confort, avec toutefois de gros écarts en fonction de l’orientation. Les pièces ouvertes sur le sud, bien entendu, chauffent davantage. Toutefois, la chaleur dégagée par l’électroménager brun et blanc joue aussi un rôle dans la surchauffe, que les modèles avaient sous-estimé.

Autre point à revoir, selon le rapport : le système de panneaux solaires chauffant un ballon d’eau d’appoint. À la ZAC de Bonne, l’ensemble a viré un peu Shadock : « La production solaire a juste permis de compenser les pertes de température de l’eau stockée dans le ballon d’appoint sans élévation de la température. » Bref, il n’a servi à rien. L’installation d’eau chaude sanitaire affiche un rendement global de 45 % : 55 % de la chaleur produite se dissipe dans le réseau. Pas terrible. La consommation d’électricité des parties communes est, quant à elle, supérieure de 39 % aux prévisions du modèle.

Autant dire que celui-ci est malmené. Une consommation de 53 kWh/an/m2Shab est une fabuleuse performance par rapport à de l’ancien, mais elle est très éloignée de celle d’un bâtiment passif (consommation équilibré par la production d’énergie), sans parler des bâtiments à énergie positive dont la généralisation dans le neuf est envisagée en 2020. Pour que ce calendrier reste crédible, il faudra améliorer les constructions mais aussi – et ce sera sans doute plus difficile – convaincre les résidents de moins chauffer en hiver et de moins utiliser leurs appareils électroménagers en été. 

Erwan Seznec

Erwan Seznec

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