ACTUALITÉ

Médicaments à l’hôpitalLa chasse au gaspi peut commencer

FM

par Fabienne Maleysson

Les établissements hospitaliers jettent un volume colossal de médicaments. Une récente étude en détermine les raisons. Reste à passer à l’action pour endiguer ce gaspillage déplorable pour les finances publiques et l’état de la planète.

Pourquoi jette-t-on tant de médicaments à l’hôpital ? C’est la question à laquelle ont tenté de répondre le Comité du développement durable en santé (C2DS) et le RésOmédit, deux structures engagées dans la maîtrise de l’impact environnemental du système de soins (voir encadré). Deux cent dix établissements de santé – sur 3 000 environ – ont accepté de participer à leur étude consistant à collecter tous les médicaments jetés en 1 semaine et à caractériser les raisons de cette mise au rebut.

Bilan : sur ce petit échantillon et en seulement 7 jours, 2 tonnes de médicaments ont été jetés, pour une valeur de 700 000 € et une empreinte carbone de 122 tonnes équivalent CO2 (celle de 13 Français en 1 an). Et ce pour trois motifs principaux : dans environ un tiers des cas, les médicaments étaient périmés. Viennent ensuite deux autres explications (20 % des volumes chacune) : la non-remise en stock dans la pharmacie centrale de l’établissement des retours des services et l’élimination des médicaments appartenant aux patients.

Médecine de ville et hôpital

Pourquoi les comprimés et autres flacons issus des différents services ne sont-ils pas toujours réintégrés dans les stocks des pharmacies ? « Fréquemment pour des raisons économiques, explique Gilles Piriou, pharmacien, responsable de l’Omedit de Bretagne. Souvent, un comprimé ne coûte que quelques centimes. Or, pour le réintégrer, il faut vérifier son intégrité, sa date de péremption, le réétiqueter, renseigner la base de données informatique pour matérialiser son retour en stock : cela peut coûter plus cher en salaire. » Quant aux médicaments appartenant aux patients, on est dans le cas d’une personne traitée pour une maladie chronique qui est hospitalisée pour une autre pathologie. Parce qu’il existe une séparation stricte, du point de vue budgétaire, entre médecine de ville et hôpital, mais aussi parce que l’établissement ne peut prendre la responsabilité de délivrer à un patient un remède dont il ignore les conditions de conservation, on n’utilise pas, en principe, les boîtes apportées par ce dernier. On en commande donc pour lui et on jette les siennes. Ce qui peut vite chiffrer : « Un patient arrive avec une chimiothérapie par voie orale à 4 000 € la boîte, on lui en commande une autre et on jette les comprimés restant dans sa boîte, déclare Gilles Piriou. Il faudrait trouver des solutions pour que le patient gère son traitement de fond comme à la maison et qu’on ne s’occupe que de la raison de son hospitalisation. » Pour cela, une remise en cause de la séparation entre médecine de ville et hospitalière sera nécessaire.

Mutualiser les produits les plus coûteux

Cela dit, lorsqu’on raisonne en valeur et non plus en volume, les médicaments périmés pèsent encore plus lourd : plus de la moitié du total. « À l’hôpital, on jette beaucoup de produits bon marché, mais on est aussi obligé d’avoir en stock des spécialités relativement onéreuses, comme des antidotes contre diverses intoxications, du sérum antivenimeux, etc. Il faudrait mutualiser les stocks entre établissements pour avoir moins de gaspillage. » Idem pour tous les traitements particulièrement chers. C’est quelque chose que l’on sait faire, l’expérience du Covid l’a montré. « En cas de crise, si tout le monde a du mal à s’approvisionner, ça marche. Sinon, ce n’est pas une priorité, constate Gille Piriou. Or, on pourrait le faire au moins sur les produits les plus coûteux à une échelle régionale. »

Reste la pertinence des dates de péremption dont nous avons montré, suivant en cela plusieurs études d’ampleur, qu’elle était toute relative. Même si chaque spécialité a ses particularités, il semble que l’on pourrait augmenter la durée de vie de nombre d’entre elles tout en assurant la sécurité des patients. Les laboratoires pharmaceutiques s’astreindront-ils enfin à étudier la question ? Les auteurs de l’étude doivent très prochainement rencontrer leur organisation professionnelle, le Leem, pour les convaincre de l’intérêt d’ouvrir ce chantier. Aussi bien pour des raisons budgétaires qu’environnementales.

C2DS et RésOmédit

Le C2DS est un réseau de 940 établissements de santé qui « œuvre à réduire les empreintes carbone, hydrique, chimique et sociale » du système de santé.

Le RésOmédit représente les 14 Observatoires régionaux ou interrégionaux des médicaments, dispositifs médicaux et innovations thérapeutiques (Omédit), des structures dont l’objectif est d’améliorer la pertinence et la sécurité des soins.

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