Élisa Oudin
Prêts en francs suisses Helvet ImmoBNP Paribas gagne du temps pour éviter de payer
BNP Personal Finance, filiale de la BNP, a fait appel de la décision du tribunal correctionnel de Paris la condamnant dans l’affaire des prêts en francs suisses vendus aux particuliers. Elle demande aussi la suspension de l’exécution immédiate du jugement.
Si la situation n’était si grave pour certains emprunteurs étranglés par les mensualités de remboursement de leur prêt immobilier Helvet Immo, on pourrait en sourire. BNP Personal Finance (BNP-PF) justifie sa décision de contester l’exécution provisoire (décidée par le tribunal correctionnel de Paris) d’indemniser les victimes… par souci de leur intérêt financier ! « Notre démarche est justifiée par le fait que si le jugement en appel inverse celui de première instance, les parties civiles seraient tenues de restituer les sommes versées à titre provisoire, ce qui pourrait entraîner des difficultés considérables », avance-t-elle.
Jouer la montre
BNP-PF vient en effet de faire appel du jugement du tribunal correctionnel de Paris du 26 février 2020 la condamnant à verser près de 150 millions d’euros de dommages et intérêts aux victimes des prêts en francs suisses et aux associations de consommateurs dont l’UFC-Que Choisir. Surtout elle demande la suspension de l’exécution provisoire pour ne pas avoir à rembourser les consommateurs et les associations concernées. La loi (article 515-1 du code de procédure pénale) prévoit, en effet, lors d’une procédure d’appel, la possibilité de saisir en référé le premier président de la cour d’appel pour demander en accéléré la suspension de l’exécution provisoire. Mais cela n’ôte en rien le caractère indécent de la demande faite par BNP Paribas qui, comme de nombreux autres établissements financiers dans de telles circonstances, joue la montre pour décourager les victimes.
En l’espèce, BNP Personal Finance refuse toujours de reconnaître la moindre responsabilité dans cette affaire, malgré l’accumulation des preuves évidentes et malgré le fait que certains de ses clients sont dans des situations financières dramatiques, avec intervention d’huissiers et menaces de saisie pour certains. Pour le service juridique de l’UFC-Que Choisir, cette demande de suspension semble principalement motivée par des intérêts purement financiers au détriment des parties civiles : « Si l’argent reste chez BNP Paribas, cette dernière pourra continuer à le faire fructifier (via des prêts et investissements). En outre, l’argent devant être versé aux consommateurs doit leur permettre de rembourser leurs prêts Helvet Immo et de réduire leurs échéances. Tout en réclamant la suspension de l’exécution, la banque peut continuer à demander l’exécution de contrats de prêts ruineux pour les emprunteurs. Y aurait-il deux poids, deux mesures ? »