ACTION UFC-QUE CHOISIR

Halte à la supercherie bancaire

L'UFC-Que Choisir dénonce une charte qui détourne les principes de la loi Murcef, et pérennise les pratiques douteuses et illicites. Michel Pébereau, président de la Fédération bancaire française (FBF) et de BNP-Paribas, et Jean-Paul Bailly, président de La Poste, ont signé le 9 janvier dernier une charte d'engagement relative aux conventions de compte en présence de Francis Mer, ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie... une charte "visant à renforcer les droits des consommateurs", précise le communiqué officiel publié sur le site Internet du ministère des Finances. De qui se moque-t-on ?... Des consommateurs. Cette charte ne renforce nullement les droits des clients, au contraire. Elle pérennise les pratiques opaques et douteuses, voire illégales, qui permettent aux banques de ponctionner plusieurs centaines de millions d'euros chaque année... désormais avec l'aval du gouvernement.

De la loi Murcef à la charte creuse

La signature de cette charte fait suite à la décision du ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie de reporter la promulgation de l'arrêté de la loi Murcef de dix-huit mois. La loi Murcef prévoit que chaque client des banques, sans exception, doit recevoir une convention de compte qui définit l'ensemble du service bancaire à sa disposition, ses droits et devoirs, ainsi que les obligations de sa banque. Le ministre s'est appuyé sur les arguments des établissements bancaires. À savoir : l'impossibilité "technique" d'envoyer une nouvelle convention à tout possesseur de compte. La charte est appelée à remplacer l'arrêté qui devait préciser le contenu des conventions de compte (fonctionnement du compte, conditions d'accès et moyens de paiement disponibles, conditions de clôture, gestion des incidents, etc.). L'UFC-Que Choisir, et la totalité des associations de consommateurs, dénoncent ce pis-aller. La charte ne remplit pas son rôle. Au lieu de préciser le contenu des conventions de compte, elle se contente de lister les rubriques devant y figurer. Les établissements bancaires peuvent ainsi ressortir leurs vieilles conventions poussiéreuses et continuer de plus belle, sans rien changer à leurs "bonnes vieilles" habitudes. En fait, cette charte n'apporte aucun changement à la situation actuelle, que nous dénonçons depuis des années. Ce qu'elle propose - une convention de compte pour les nouveaux clients et pour ceux qui la demandent - est d'ores et déjà fourni par les banques aujourd'hui, voire depuis plusieurs années pour certaines. Cette "contractualisation" de la relation banque-client n'est donc que poudre aux yeux.

Des droits légitimes bafoués, un esprit détourné

Et pourtant, les clauses abusives foisonnent dans les conventions de compte que nous avons étudiées il y a six mois. Les frais financiers, invisibles mais pas indolores, se multiplient. Les agents des guichets et leurs supérieurs continuent de mépriser le client en refusant de répondre, notamment, aux demandes d'explications légitimes qui leur sont adressées, et ce en toute impunité. La responsabilité civile et juridique des contrevenants passe elle aussi à la trappe. Une charte, c'est en principe un engagement mutuel entre différents partenaires visant à améliorer une situation ou un processus. Les banquiers pouvaient profiter de cette charte non seulement pour mettre fin à ces dysfonctionnements, mais également pour améliorer la relation banque-client en précisant, entre autres, le contenu du service bancaire gratuit. Il n'en ont rien fait. L'ouverture d'un compte en banque reste un acte obligatoire mais aucun service minimal - accès au compte gratuit et mode de paiement gratuit - n'existe à ce jour. Au contraire, les plus démunis représentent une proie facile, et juteuse. Passez par la case "banque" et payez vingt mille francs ! Pire, les pratiques de rallongement occulte de découvert (dates de valeur) sont officialisées : les banques espèrent ainsi continuer à subtiliser à leurs clients, de manière invisible, des millions d'euros d'agios indus. Et ce encore une fois avec l'aval du gouvernement, alors que l'UFC-Que Choisir a interpellé Francis Mer le 12 décembre dernier sur les dates de valeur appliquées de manière illégale par vingt-huit établissements bancaires sur notre territoire.

Le pouvoir de dire non

Cette action du lobby bancaire pour empêcher la publication de l'arrêté d'application de la loi Murcef, pourtant votée à l'unanimité par le parlement en décembre 2001, n'est pas la première. Ses propositions d'édulcoration de l'arrêté avaient tout bonnement amené l'UFC-Que Choisir à quitter la table des négociations, auxquelles elle participait au sein du comité consultatif des usagers bancaires, au printemps 2002. Cette fois encore, la ficelle est un peu grosse. La charte des banques ne mérite qu'un traitement : la poubelle. L'UFC-Que Choisir estime que la convention de compte peut devenir pour le client un véritable "bouclier" contre les abus de sa banque. Encore faut-il que cette convention soit équilibrée, dépourvue de toute disposition illégale ou abusive, qu'elle préserve le droit du client d'accéder gratuitement à son argent, et surtout qu'elle soit respectée par la banque ! Il y a encore un long chemin à parcourir. L'UFC-Que Choisir a entamé une action en justice à l'encontre des établissements bancaires qui continuent d'appliquer des dates de valeur totalement injustifiées. Elle part en chasse aujourd'hui contre les clauses abusives dans les conventions de compte. D'autres actions suivront, afin que la relation banque-client obéisse enfin à des règles saines. À bientôt donc.

Marie-José Nicoli

Marie-José Nicoli

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