Relèvement du seuil de revente à perteHalte au braquage du pouvoir d’achat des consommateurs !
Alors qu’une proposition de loi entend prolonger pendant 3 années supplémentaires le relèvement de 10 % du seuil de revente à perte (SRP) pour les produits alimentaires, l’UFC-Que Choisir s’indigne, dans le contexte d’inflation galopante, de cette ponction opérée au seul bénéfice de la grande distribution. L’incapacité de cette mesure à soutenir le revenu agricole ayant été par ailleurs largement démontrée au cours des quatre dernières années, l’Association appelle les députés à la responsabilité en votant contre sa reconduction.
En février 2019, au prétexte de défendre le revenu agricole, la loi EGAlim a relevé de 10 % le seuil de revente à perte, obligeant les enseignes de la distribution à réaliser une marge minimale de 10 % sur les produits alimentaires. L’UFC-Que Choisir avait pourtant dès l’origine souligné le caractère inflationniste de cette mesure – puis démontré qu’elle avait infligé aux consommateurs une dépense supplémentaire sur deux ans de 1,6 milliard d’euros(1) – et dénoncé le caractère illusoire d’une répercussion sur les revenus des agriculteurs de la marge supplémentaire réalisée par la grande distribution. Cette mesure, prorogée une première fois en 2021, arrivant à échéance mi-avril, une proposition de loi(2) issue de la majorité parlementaire et inspirée par le Gouvernement sera examinée à l’Assemblée nationale la semaine prochaine et prévoit notamment de la prolonger pendant encore 3 ans.
Une ponction qui aggrave l’inflation subie par les consommateurs
Alors qu’en 2021 les ménages consacraient 5 899 € par an pour l’achat de produits alimentaires(3), l’UFC-Que Choisir a calculé qu’au cours des 12 derniers mois les consommateurs ont subi sur l’alimentation une inflation considérable de 7,4 %(4), encore plus marquée en fin année. Cette forte augmentation les a obligés soit à augmenter leurs dépenses, soit à faire des arbitrages douloureux en limitant leurs achats et en se privant plus particulièrement des denrées les plus chères (viande, fromages, charcuterie, légumes…). Dans ce contexte, il est absolument inadmissible que soit reconduit le relèvement du SRP du fait de son impact inflationniste, qui frappe en premier lieu les ménages modestes pour lesquels le budget alimentaire pèse encore plus lourd (18,3 % du budget contre 16,1 % pour l’ensemble des ménages(5)).
Relèvement du SRP : un chèque en bois pour les agriculteurs
Il est d’autant plus ubuesque d’aggraver cette saignée sur le pouvoir d’achat des consommateurs que l’impact inflationniste est désormais non seulement admis par les acteurs professionnels (ILEC(6), ANIA) mais surtout par les rapports officiels(7), notamment celui du Sénat(8) demandant que les filières alimentaires qui le souhaitent puissent être exemptées du relèvement du SRP. Quant aux syndicats agricoles, ils affirment tous « ne pas avoir vu la couleur(9) » de la redistribution de cette marge, mettant en évidence les limites pourtant prévisibles de la « théorie du ruissellement » ! Prolonger cette mesure serait d’autant moins justifiable qu’avec les dispositions de la loi Egalim 2 spécifiquement dédiées au rééquilibrage des négociations commerciales, il existe désormais des outils précis qui n’ont plus qu’à être appliqués et contrôlés pour assurer à nos producteurs des rémunérations leur permettant de pérenniser leur activité.
Au vu de l’impact inflationniste avéré pour les consommateurs et de son inutilité pour défendre le revenu agricole, l’UFC-Que Choisir exhorte les députés à ne pas voter la reconduction du SRP majoré.
(2) Proposition de loi visant à sécuriser l’approvisionnement des Français en produits de grande distribution
(3) Consommation effective des ménages par produit aux prix courants et indice 001759963 -Insee décembre 2022
(4) Moyenne des évolutions de prix sur 12 mois glissants entre janvier 2022 et décembre 2022 sur un panel de 80 produits alimentaires relevés sur les sites drive de la distribution.
(5) Insee Focus n° 203 – Septembre 2020
(6) L’ILEC, le syndicat regroupant les plus grandes marques de produits de grande consommation, estime à un milliard d’euros l’inflation engendrée en 2019 sur les denrées alimentaires - Rapport d’information sur l’évaluation de la loi EGALIM – Assemblée Nationale – Février 2022
(7) Premier et deuxième rapport d’expertise du Gouvernement sur la loi EGALIM – Septembre 2020 et février 2022
(8) Rapport d’information n° 799 relatif à l’inflation et aux négociations commerciales - Commission des affaires économiques – Sénat juillet 2022
(9) Rapport d’information sur l’évaluation de la loi EGALIM – Assemblée Nationale – Février 2022