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Amende record contre la banque UBS

Des sanctions enfin dissuasives ?

La sanction, très sévère, prononcée contre la banque suisse UBS par le tribunal correctionnel de Paris, mardi 19 février 2019, amorce-t-elle un tournant ? Jusqu’à présent, les condamnations des infractions financières ont toujours, sauf rares exceptions, représenté des montants négligeables pour les grands établissements financiers. Ce qui ne se révèle guère dissuasif !

Le tribunal correctionnel de Paris vient de provoquer une onde de choc en condamnant la banque suisse UBS à 4,5 milliards d’euros pour « démarchage bancaire illicite » et « blanchiment de fraude fiscale ». Une première en France, contrairement à la situation outre-Atlantique.

On sait en effet que la justice américaine n’hésite pas à frapper fort en cas d’infraction bancaire. Les amendes se comptent souvent en milliards de dollars. Plusieurs grandes banques françaises ont d’ailleurs eu l’occasion de le vérifier encore récemment. La Société générale a ainsi dû s’acquitter, au mois de novembre dernier, d’une amende de 1,3 milliard de dollars pour avoir violé l’interdiction par les États-Unis de réaliser des opérations financières dans des pays sous embargo pour des raisons liées à la lutte contre le terrorisme. Quatre ans auparavant, la BNP avait dû s’acquitter de 9 milliards de dollars pour le même type d’infraction.

La sévérité des juges américains apparaît également importante à l’encontre des délits contre les particuliers, avec des dommages et intérêts qui peuvent atteindre plusieurs centaines de millions de dollars. Rien à voir, jusqu’à présent, avec la situation en France. Les condamnations pécuniaires (lorsqu’elles ne se limitent pas à l’euro symbolique) sont souvent très faibles. Deux exemples récents : l’amende de 2 millions d’euros à verser au Trésor public par le Crédit agricole pour évasion fiscale en 2017 ; ou encore les 3 000 euros de dommages et intérêts auxquels a été condamnée BNP Paribas par le tribunal correctionnel pour ses pratiques dolosives dans l’affaire des prêts en francs suisses Helvet’Immo, en 2017 ! « Ces pénalités, notamment la seconde, sont minimes au regard du bilan des établissements financiers dont on parle. Comment cela pourrait-il avoir un quelconque effet dissuasif ?, commente Me Hélène Féron-Poloni, avocate associée au cabinet Lecoq-Vallon & Féron-Poloni, spécialiste des sujets financiers. Si l’on veut voir refluer le nombre d’affaires bancaires qui sont portées devant les tribunaux, il faut de véritables sanctions. »

Changement d’ère ?

La sévère condamnation prononcée par le tribunal correctionnel de Paris fera-t-elle jurisprudence ? La présidente a en tout cas suivi les réquisitions du parquet national financier (PNF) qui avait dénoncé une fraude d’une particulière gravité. En plus de la sanction financière contre la banque, cinq ex-dirigeants ou cadres d’UBS ont également écopé d’une peine de prison avec sursis.

Dans cette affaire, la banque encourageait des particuliers, possédant des ressources financières importantes, à échapper au fisc, en pratiquant l’évasion fiscale vers la Suisse. Le PNF a notamment pointé que la fraude trouvait « sa source dans une organisation structurée verticalement, systématique et ancienne ». Une caractéristique organisationnelle que l’on pourrait reconnaître dans certaines autres « affaires bancaires » en France aboutissant à léser de nombreux particuliers. On pense notamment au scandale des fonds en francs suisse Helvet’Immo de BNP Paribas ou à celui des marges cachées des fonds à formule de Natixis ! L’avenir dira si les tribunaux français ont décidé d’adopter des sanctions plus dissuasives. En attendant, la banque UBS a fait appel de la décision du tribunal correctionnel de Paris, refusant de reconnaître la moindre infraction dans ce dossier. Mais pourquoi avait-elle alors failli signer une transaction avec la justice française en vue d'une « comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité » ? Cette transaction était tombée à l’eau, UBS avait estimé excessive la pénalité de 1,2 milliard d’euros exigée par le parquet !

Élisa Oudin

Élisa Oudin

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