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Pénuries de médicaments

Un énième plan gouvernemental

Depuis plus de 15 ans, les ruptures de stocks de médicaments s’aggravent. Le gouvernement tente de limiter les dégâts avec un nouveau plan, mais sans reprendre complètement la main.

Malgré les multiples plans d’action et autres feuilles de route, les pénuries de médicaments que connaît l’Europe, et la France en particulier, prennent de plus en plus d’ampleur. Près de 5 000 signalements de spécialités en tension ou en rupture totale ont été enregistrés en 2023, soit 30 % de plus qu’en 2022, selon les chiffres de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). L’an dernier, 37 % des usagers ont été confrontés à au moins une pénurie de médicament. Les difficultés ont culminé en pleine épidémie hivernale quand il est devenu impossible de trouver de l’amoxicilline au dosage enfant.

De nouvelles mesures viennent d’être détaillées pour les 4 années à venir. Elles relèvent avant tout de l’adaptation face à la catastrophe en cours. Car pour ce qui est de la réindustrialisation, les candidats ne se bousculent pas pour produire sur notre territoire les 147 spécialités pour lesquelles une vulnérabilité particulière a été identifiée. Un bilan doit être fait dans les mois qui viennent. Pour limiter les arrêts de commercialisation, une disposition a déjà été votée pour contraindre l’industriel à trouver un repreneur, sans quoi l’Autorisation de mise sur le marché (AMM) est cédée à un opérateur public.

Mieux informer médecins et patients

Faute de mieux, l’ambition est avant tout de mieux informer les acteurs de la chaîne du médicament. Notamment les médecins : qu’ils sachent, via leur logiciel d’aide à la prescription, si le traitement envisagé est disponible, et s’il ne l’est pas, comment le substituer.

La communication envers les patients, que la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités appelle de ses vœux, paraît plus difficile à mettre en œuvre. Mais il est prévu de les sensibiliser au bon usage du médicament, en encourageant par exemple les médecins à rédiger des ordonnances de non-prescription, c’est-à-dire expliquant noir sur blanc pourquoi l’état de santé ne nécessite pas de traitement.

Dans les périodes de fortes tensions, susceptibles de déclencher un « plan blanc médicaments », la dispensation à l’unité, ou encore conditionnée à la réalisation d’un test rapide, serait obligatoire. L’objectif est clairement de réserver les antibiotiques aux seules situations qui en relèvent.

Les pharmaciens, de leur côté, auraient le feu vert pour fabriquer eux-mêmes en officine les médicaments manquants. Reste à définir le délai d’indisponibilité au-delà duquel ils pourraient se lancer. Un décret le précisera. S’il est trop long, la mesure a toutes les chances d’être sans effet ! Parallèlement, l’établissement pharmaceutique de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, qui a les moyens de mettre en production de gros volumes, serait mis à contribution.

Charte de bonne conduite 

Et les industriels ? La nouvelle feuille de route les épargne largement. Les ministères en charge du dossier attendent la fin de l’hiver pour voir si les hausses de prix qui leur ont été accordées en contrepartie d’un bon approvisionnement du marché ont fonctionné. La seule contrainte qu’ils pourraient subir est déjà inscrite dans la loi, qui autorise désormais l’ANSM à prendre des mesures de police pour garantir l’approvisionnement. Elles s’ajoutent à l’obligation depuis 2021, pour les fabricants des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (MITM), d’avoir 2 mois de stocks d’avance, voire 4 si l’agence l’estime nécessaire. Pour le reste, tout repose sur une charte de bonne conduite conclue entre l’ANSM, les grossistes-répartiteurs, exploitants, pharmaciens et industriels, par laquelle ils s’engagent à une meilleure répartition possible des médicaments sur le territoire. Sans aucune sanction en cas de manquement.

Méthylphénidate (Ritaline) en tension

L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) vient de donner des instructions de substitution aux pharmaciens en raison d’une pénurie de méthylphénidate, le principe actif de la Ritaline, prescrite dans le trouble de déficit de l’attention (avec ou sans hyperactivité) et la narcolepsie. Les médicaments actuellement en rupture sont Quasym LP, Ritaline LP 10 mg et 20 mg, et son générique Méthylphénidate Arrow LP 10 mg, 20 mg, 30 mg et 40 mg (tous les dosages). Ils peuvent être remplacés, sans avoir à repasser chez le médecin pour obtenir une nouvelle ordonnance, par Medikinet (plusieurs dosages disponibles), dont les stocks sont suffisants d’après l’ANSM pour couvrir les besoins. La spécialité Concerta ne connaît pas de difficulté d’approvisionnement, mais les dosages en méthylphénidate sont différents.

Anne-Sophie Stamane

Anne-Sophie Stamane

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