Anne-Sophie Stamane
Étranges honoraires de dispensation
Depuis le 1er janvier 2015, des honoraires de dispensation s’appliquent en pharmacie pour l’achat des médicaments remboursables : 0,82 € pour les boîtes simples, 2,21 € pour les conditionnements de 3 mois. En réalité, quand ces produits sont délivrés sans ordonnance, ce forfait ne devrait pas être facturé.
Les consommateurs paient-ils certains médicaments plus cher qu’ils ne le devraient ? La question se pose sérieusement. En effet, la lecture minutieuse de la réglementation montre que, sur le papier, la délivrance de médicaments remboursables achetés sans ordonnance (dits « de prescription facultative ») ne devrait pas occasionner d’honoraires de dispensation. Ces honoraires, censés rémunérer le rôle de conseil des pharmaciens, s’appliquent depuis le 1er janvier dernier, sans hausse de prix final pour le consommateur car ils remplacent, grosso modo, la marge du pharmacien. Ils s’élèvent à 0,82 € par boîte, sauf pour un conditionnement de 3 mois, qui autorise un honoraire de 2,21 €.
Or, en pratique, dans les officines, les honoraires de dispensation sont facturés indifféremment sur tous les médicaments remboursables, qu’ils fassent l’objet d’une ordonnance ou non. En clair, les consommateurs s’acquittent d’une somme indue lorsqu’ils achètent sans ordonnance un produit remboursable ! Par exemple, ils déboursent 1,94 € pour une boîte de Doliprane alors qu’ils devraient, si l’on applique strictement la réglementation, la payer 1,12 €.
Il serait cependant injuste d’accuser les pharmaciens de surfacturer ces médicaments et de braver délibérément la loi. Ils perçoivent ces honoraires de bonne foi, et même avec la bénédiction de l’Administration. Ainsi, les documents explicatifs de l’Assurance maladie qui leur sont destinés notent sans détour qu’ils doivent facturer les honoraires de dispensation sur tous les médicaments remboursables, avec ou sans ordonnance. L’information en direction du public n’est pas plus fiable : le site Medicaments.gouv.fr affirme que « cette réforme s’applique à l’ensemble des médicaments remboursables, qu’ils aient été prescrits ou non ».
Il y a donc un hiatus difficilement compréhensible entre des dispositions réglementaires, pourtant claires, et leur application par le ministère de la Santé et la Sécurité sociale. Il est clair que l’objectif était effectivement d’appliquer, à terme, ces honoraires à tous les médicaments remboursables quel que soit le mode de délivrance, mais pour une raison inconnue, le texte les mettant en œuvre n’a pas pris en compte cette évolution.