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E Télécom, 7 Télécom, A Télécom

Une vague de démarchages abusifs

Elles s’appellent 7 Télécom, E Télécom, A Télécom ou arborent un autre nom se terminant par « Télécom ». Depuis des mois, ces sociétés n’hésitent pas à se faire passer pour France Télécom et à cacher la facturation de coûts de connexion pour inciter des personnes âgées à souscrire à leurs offres. La justice devrait bientôt se pencher sur leur cas.

Le manège n’a que trop duré. Depuis plusieurs mois, des sociétés de télécommunications téléphonent à des personnes âgées pour tenter de les abonner à leurs services. Elles s’appellent A Télécom, E Télécom, 7 Télécom ou autre et nos forums de discussion débordent de messages de colère les concernant (ici pour 7 Télécom et ici pour d’autres opérateurs comme 11 Télécom ou B Télécom).

L’argumentaire de leurs vendeurs est si bien rodé que nombre de personnes finissent par donner leur accord. Et quand elles ne le donnent pas, il n’est pas rare qu’elles reçoivent quand même un courrier de bienvenue. C’est le cas de Marcelle, qui a vu arriver une facture de téléphone de plus de 60 € provenant de la société 11 Télécom, dont elle avait pourtant toujours refusé les avances malgré plusieurs appels. Bernard, lui, a accepté la proposition de son interlocuteur uniquement parce qu’il pensait avoir affaire à France Télécom et que les tarifs lui semblaient vraiment intéressants. Ce n’est qu’en recevant son courrier de bienvenue qu’il s’est aperçu que la proposition émanait de la société E Télécom et que des coûts de connexion de 0,55 € ainsi qu’un droit d’entrée de 29,90 € lui seraient facturés. Si Bernard s’est fait avoir, c’est aussi, assure-t-il, parce que son interlocuteur disposait de ses coordonnées bancaires, ce que d’autres victimes confirment. « C’est surprenant, mais possible, explique un enquêteur proche du dossier. On sait que des fichiers contenant des coordonnées bancaires circulent, généralement constitués sur la base de données transmises il y a très longtemps à des entreprises ou des associations. »

Aucune vérification effectuée

A Télécom, 7 Télécom et les autres sont de véritables opérateurs dûment enregistrés auprès de l’Autorité de régulation des télécoms (Arcep). Toutefois, ils ne possèdent pas de lourdes infrastructures, encore moins de réseau. En fait, ces sociétés s’appuient sur la présélection, une option technique apparue au moment de la libéralisation du marché des télécoms, qui leur permet de gérer les appels et la facturation pour le compte de leurs propres clients, sans que ces derniers ne changent quoi que ce soit à leurs habitudes. Conformément à la procédure mise en place par l’Arcep, chaque présélection est réalisée par Orange à la demande de l’opérateur tiers qui est présumé avoir obtenu l’accord du client. Aucune vérification n’est effectuée.

Pour parvenir à leurs fins, ces sociétés profitent aussi de la toute nouvelle réglementation SEPA visant à harmoniser les modes de paiement dans l’Union européenne. Jusque-là, pour mettre en place un prélèvement, le titulaire du compte devait obligatoirement remettre à sa banque une autorisation de prélèvement. Mais avec le SEPA, il revient désormais au professionnel d’effectuer les démarches auprès de l’établissement bancaire. Là encore, le professionnel est censé avoir obtenu l’accord écrit du client. Force est de constater que certains professionnels peu scrupuleux n’hésitent pas à se passer de ces autorisations, comme le craignait l’UFC-Que Choisir.

La plupart des sociétés incriminées étant basées dans le département de la Gironde (33), la Direction départementale de protection des populations (DDPP) de Bordeaux a longtemps centralisé les plaintes. Mais désormais, l’affaire est entre les mains du procureur de Bordeaux, qui a lancé une procédure à laquelle s’est joint Orange. L’opérateur a déposé plainte pour escroquerie et usurpation d’identité.

De son côté, le patron de France Communication, la société qui gère les marques A, B et E Télécom, se veut serein. Tout juste reconnaît-il quelques cas litigieux survenus en début d’année. « Mais depuis le 1er avril, on ne peut plus être abonné à E Télécom sans avoir renvoyé son contrat signé », assure Mathieu Lietard, déplorant par ailleurs un amalgame entre sa société et des concurrents basés aussi en Gironde. Il jure par ailleurs que les seules coordonnées bancaires en sa possession proviennent de ses clients et qu’aucun ciblage n’est réalisé de façon à toucher en priorité les personnes âgées. La justice tranchera.

Victimes, vous pouvez réagir

Si vous avez été victime de ce type d’agissement, contactez votre banque afin de faire cesser les prélèvements. Conformément à la nouvelle réglementation SEPA, vous disposez de 13 mois pour contester un prélèvement intervenu sur votre compte. La banque est alors tenue de procéder au remboursement immédiat des sommes (article L. 133-24 du code monétaire et financier). Attention : la contestation ne vous exonère pas de vos éventuelles obligations de paiement. Il faut donc régler aussi le problème avec le créancier. Vous pouvez également déposer plainte auprès du procureur de Bordeaux.

Sachez par ailleurs qu’en cas de démarchage par téléphone, le professionnel est tenu de vous faire parvenir une confirmation de l’offre. Le contrat n’est valable que si un exemplaire de l’offre a été retourné signé ou que le consommateur a donné son consentement par voie électronique (article L. 121-20 du code de la consommation (1)). Après avoir accepté l’offre, vous disposez de 14 jours à compter de la conclusion du contrat pour vous rétracter, soit en utilisant le formulaire type qu’a dû vous transmettre le professionnel, soit par tout autre moyen vous permettant de prouver que vous avez bien cherché à vous rétracter (par courrier recommandé, de préférence). Toutefois, si le professionnel a omis de vous fournir les informations liées au droit de rétractation, ce délai est prolongé de 12 mois à compter de l'expiration du délai initial de 14 jours. Si le délai de rétractation a été dépassé, vous pouvez également entamer des poursuites pour pratiques commerciales trompeuses, voire abus de faiblesse. Dans tous les cas, n’hésitez pas à vous rapprocher de l’association locale de l’UFC-Que Choisir la plus proche de chez vous.

(1) Mise à jour de novembre 2017 : l’article L. 121-20 du code de la consommation est devenu l’article L. 221-16.

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