par Adeline Lorence
Maintien à domicilePas si facile de bénéficier de MaPrimeAdapt’
Depuis près de 2 ans, MaPrimeAdapt’ aide les personnes en perte d’autonomie à financer l’aménagement de leur logement. Une aide précieuse mais qui nécessite de remplir certaines conditions et de suivre un parcours bien défini.
Jean-François ne regrette pas son choix. Devenu lourdement handicapé à la suite d’un accident cérébral, le sexagénaire a fait adapter sa salle de bains grâce à MaPrimeAdapt’. Accompagné tout au long de son projet par une société spécialisée dans le maintien à domicile et un ergothérapeute, il a pu réaliser 13 000 € de travaux, dont seulement 4 000 € sont restés à sa charge. Son cas est loin d’être isolé : plus de 37 000 personnes ont perçu MaPrimeAdapt’ en 2024. Lancé le 1er janvier 2024, ce dispositif, géré par l’Agence nationale de l’habitat (Anah), aide au financement des travaux destinés à adapter le logement à la perte d’autonomie.
Pour en bénéficier, plusieurs conditions doivent être remplies. L’âge d’abord : vous ou un membre de votre foyer devez être âgé de 70 ans ou plus. Il est aussi possible d’être éligible à cette aide si vous êtes plus jeune : entre 60 ans et 69 ans si vous justifiez d’un niveau de GIR (groupe iso-ressources permettant de déterminer le niveau de perte d’autonomie) de 1 à 6, et sans condition d’âge si vous présentez un taux d’incapacité supérieur ou égal à 50 % ou si vous êtes éligible à la prestation de compensation du handicap (PCH). Ainsi, les parents d’un enfant handicapé peuvent demander cette aide financière.
Les ressources du foyer entrent aussi en compte. Deux niveaux sont distingués : « modestes » et « très modestes ». Pour les « très modestes », les travaux peuvent être pris en charge à hauteur de 70 %. Le niveau de revenu retenu dépend du nombre de membres du foyer ainsi que du lieu d’habitation. Par exemple, pour un couple vivant hors de l’Île-de-France, y compris outre-mer, le revenu fiscal de référence (RFR), figurant sur l’avis d’imposition, ne doit pas dépasser 25 115 €. Pour être considéré comme « modestes » et profiter d’une prise en charge des travaux de 50 %, dans la même situation, les revenus ne doivent pas excéder 32 197 €. Dans tous les cas, la prise en charge ne peut pas dépasser 22 000 € hors taxes. Enfin, dernier critère : être propriétaire occupant ou locataire du parc privé, à condition d’avoir l’accord du bailleur.
L’assistant à maîtrise d’ouvrage : le guide indispensable
Pour constituer votre dossier, un accompagnement par un assistant à maîtrise d’ouvrage (AMO) est obligatoire. Architecte, ergothérapeute ou encore spécialiste du maintien à domicile, vous pouvez trouver ce professionnel, habilité par l’Anah, dans un annuaire disponible sur le site france-renov.gouv.fr ou directement dans un espace conseil France Rénov'. Il existe sur le territoire plusieurs structures spécialisées dans cet accompagnement comme l’acteur public Soliha ou encore des structures privées telles que BelAvie, Logiadapt' ou Merci Julie. « L’AMO est une porte d’entrée sécurisée pour vous accompagner tout au long de votre démarche », résume Louise Faure, adjointe au responsable service Politiques d’adaptation et de rénovation énergétique de l’Anah. Ce professionnel se rendra chez vous pour analyser vos besoins, vous aidera à constituer votre dossier, à choisir les artisans et à obtenir votre financement. Une aide financière vous est versée pour vous aider à couvrir les frais de l’AMO et le reste à charge peut parfois être compensé par des aides locales.
Pour vos travaux, vous pouvez choisir l’artisan que vous souhaitez mais, attention, pas de travaux avant l’accord de l’Anah, sous peine de ne pas toucher l’aide. Les labels existants comme Qualibat ou Handibat peuvent vous orienter dans votre décision, mais ils ne sont pas obligatoires. Gardez aussi en tête plusieurs points de vigilance. « Regardez par exemple depuis combien de temps l’entreprise existe, car certaines ont pu être créées en même temps que MaPrimeAdapt’ uniquement pour capter cette aide. N’oubliez pas non plus que ni l’AMO ni l’entreprise ne vous démarcheront par téléphone », rappelle Alima Ihrab, directrice administrative et financière d’Indépendance Royale, spécialiste de l’équipement de maintien à domicile.
Plusieurs points d’attention pour le devis
Contrairement à d’autres dispositifs, MaPrimeAdapt’ ne repose pas sur une liste de travaux fermée. Si le remplacement d’une baignoire par une douche reste l’intervention la plus fréquente, les demandes peuvent porter sur des interventions aussi variées que l’installation d’un monte-escalier, de chemins lumineux pour éviter les chutes nocturnes ou l’élargissement des portes. Tout est possible tant que cela facilite bien le maintien à domicile. « Nous pouvons décider de ne pas financer les travaux s’il n’y a pas une approche globale de la rénovation de votre logement. Ce sera le cas, par exemple, si vous arrivez avec un dossier uniquement pour motoriser vos volets », prévient Louise Faure.
Pour éviter ce type de mauvaises surprises, mieux vaut continuer à solliciter l’AMO. Il vous donnera son avis sur les devis reçus. « Nous établissons le devis à partir de l’audit du professionnel. Nous pouvons échanger avec lui s’il faut procéder à certains ajustements, comme sur la hauteur d’une barre de maintien », témoigne Alima Ihrab. L’AMO vérifiera aussi qu’il n’y a pas d’abus. « Lors de l’instruction du dossier, nous pouvons décider d’écarter le financement d’une partie des travaux si nous estimons qu’il y a clairement eu un gonflement des prix », avertit Louise Faure. Selon l’Anah, le coût moyen des travaux est de 9 500 €, pour une prise en charge avoisinant 6 000 €.
Un financement versé en fin de parcours
Une fois les devis envoyés, rappelons encore qu’il faut attendre l’accord de l’Anah avant de commencer les travaux. Ce processus peut parfois sembler long, notamment pour les personnes en situation d’urgence. « En tant qu’entreprise, nous faisons preuve de pédagogie et nous précisons à nos clients que, dès la validation du financement, nous lancerons les travaux. En cas de fragilité, par exemple lors d’une sortie d’hospitalisation, nous avons constaté une compréhension humaine de l’AMO qui peut pousser ce dossier en priorité », indique Mickaël Cohen, cofondateur de Dometvie, une autre entreprise spécialisée dans le maintien à domicile.
Après les travaux, l’AMO en vérifie la conformité et les factures sont transmises à l’Anah, qui déclenche alors le paiement. Dans certains cas, vous pouvez demander une avance ou un acompte. Selon les territoires, la réception du financement peut prendre entre 1 et 3 mois. « Nous attendons que le client ait reçu sa prime pour lui demander les fonds. À la fin des travaux, nous lui demandons seulement le reste à charge », précise Mickaël Cohen. Au total, entre le premier rendez-vous avec l’AMO et le versement de MaPrimeAdapt’, il faut compter entre 6 et 12 mois.
Adeline Lorence