ACTUALITÉ
Pouvoir d’achat (mai 2023)

Les prix de l’alimentation se stabilisent

L’inflation semble enfin atteindre un palier pour les produits du quotidien, après une hausse ininterrompue depuis début 2022. Pour autant, on est encore loin d’un retour à la situation d’avant-crise. Explications.

L’été arrive, mais le porte-monnaie des Français n’est pas au beau fixe. Sur 1 an, l’inflation globale est encore soutenue, à +7 % en mai par rapport à mai 2022. Et elle reste à deux chiffres pour les achats en grande surface, avec +19 % dans l’alimentaire, et +9 % pour le rayon hygiène-beauté, selon nos calculs.

Les produits d’épicerie, les produits laitiers, le poisson, la charcuterie et le rayon traiteur restent les plus inflationnistes depuis 1 an, de même que l’alimentation animale. Pour affronter cette perte de pouvoir d’achat, une majorité de Français ont modifié le contenu de leur panier de course : moins de viandes, de fromages, de fruits et légumes frais, davantage de marques de distributeur (MDD) et surtout de produits premier prix. Soulignons que les prix des MDD ont davantage augmenté (+25 %) que les grandes marques (+18 %) mais, démarrant d’un prix initial plus faible, ils restent concurrentiels.

Néanmoins, une accalmie s’annonce peut-être pour l’été, avec une hausse des prix en grande surface qui semble enfin s’essouffler : entre début avril et début mai, elle s’est limitée à +1,1 % sur 1 mois, et même +0,3 % sur la 2e quinzaine d’avril. D’après nos relevés de prix, c’est par exemple le cas pour le jambon (et plus largement les viandes), le yaourt nature ou encore le lait. La tendance pour des produits comme les spaghettis, le beurre ou les sodas semble même s’inverser, avec de légers reculs des étiquettes pour certaines références (des baisses d’environ -0,3 % à -0,6 % ont été observées sur 1 mois). L’huile de tournesol, dont la filière a été bouleversée par la guerre en Ukraine, baisse plus nettement (-2,3 %), mais n’oublions pas que les tarifs ont doublé depuis mars 2022 !

Pour autant, les produits resteront encore onéreux de longs mois – sans même espérer qu’ils redescendront aux niveaux d’avant-crise. Ainsi, pour un même panier de courses en grande surface, il vous faut débourser 126,70 € en mai, contre 100 € en janvier 2021 et 101 € en janvier 2022. Et certains produits, à l’instar du café, restent sur une tendance haussière.

Face aux difficultés rencontrées par les ménages modestes, le gouvernement maintient la pression sur les acteurs de la filière alimentaire, pour tenter de faire refluer les prix en rayons. Les ministres de l’Économie, de l’Industrie et du Commerce ont successivement reçu les représentants de l’industrie agroalimentaire et de la grande distribution pour les inciter à baisser les tarifs, sans grand succès (lire l’encadré).

Cette cherté persistante des denrées suscite de plus en plus d’incompréhension, alors que les prix des matières premières refluent depuis maintenant plusieurs mois sur les marchés mondiaux. Des voix s’élèvent, de la part d’économistes, de politiques, mais aussi, plus discrètement, d’institutions internationales telles que la Banque centrale européenne ou l’OCDE, face aux marges réalisées par des multinationales de divers secteurs (énergie, transport, banques, négoce de matières premières agricoles, agroalimentaire, etc.). Des entreprises ont en effet engrangé des bénéfices colossaux depuis 2 ans. Une partie des majors de l’alimentaire et de l’hygiène-beauté s’en sortent bien, comme Coca-Cola, Nestlé, Danone ou encore Unilever, l’Oréal et Procter & Gamble.

Hausses répercutées, marges reconstituées

Lors des négociations commerciales annuelles avec la grande distribution, clôturées le 28 février dernier, les fournisseurs avaient pu négocier des augmentations. « La revalorisation des prix [d’achat] sur 1 an, de mars 2022 à mars 2023, est de l’ordre de +16 % », confirme le médiateur des relations commerciales. Depuis, ces hausses ont été répercutées jusqu’aux consommateurs, ce qui explique ce récent ralentissement de l’inflation.

Mais l’industrie agroalimentaire se trouve désormais sous le feu des critiques, accusée de reconstituer ses marges sur le dos des consommateurs, à la suite de divers rapports d’institutions telles que l’Inspection générale des finances en France ou la Banque centrale européenne. Sous la pression du gouvernement, les fédérations d’industriels de l’agroalimentaire (Ania, Ilec) ont donc appelé « les 75 plus grands industriels » à rouvrir ces négociations rapidement, afin de faire reculer les prix en rayon d’ici la fin de l’année. Plusieurs secteurs seraient potentiellement concernés, comme la volaille, les huiles végétales (principalement colza et tournesol, mais pas l’huile d’olive), la panification… 

« Aujourd’hui, c’est de l’intérêt de tout le monde de baisser les prix. On dit OK à cette renégociation, comme c’est prévu dans les clauses des contrats de vente – mais les distributeurs ne peuvent pas nous demander n’importe quelle baisse », avertit néanmoins Richard Panquiault, directeur général de l’Ilec, qui représente les plus grosses entreprises et 75 % des produits de grande consommation. Refusant d’endosser le rôle du profiteur de crise, il précise que « sur 2022-2023, les hausses acceptées par les distributeurs ne couvrent que 40 à 70 % de nos surcoûts ».

Méthodologie

Que Choisir évalue le taux d’inflation mois par mois, à partir de ses propres observations. Pour près de 40 % des dépenses de consommation, nous disposons de données permettant d’évaluer des variations mensuelles de prix, basées sur nos relevés effectués en grandes surfaces (pour l’alimentation, la boisson et l’hygiène-beauté), ainsi que sur les offres tarifaires tirées de nos comparateurs de prix (énergie, carburants, mutuelles, forfaits mobiles, fournisseurs d’accès à Internet, assurances habitation, banques, équipements électroménagers). Chaque prix est ensuite pondéré par la fréquence d’achat et agrégé dans une moyenne générale.

Pour les autres postes de dépenses (loyer, dépenses de logement et de transport, hôtels et restauration, loisirs, habillement et santé), Que Choisir se réfère aux évaluations de l’Insee.

Attention : par convention, les variations de prix sur une période (par exemple pour le mois de mai 2022) sont calculées par rapport à la même période de l’année précédente (le mois de mai 2021). Ceci afin de s’affranchir des mouvements saisonniers des tarifs (par exemple ceux des fruits et légumes, très dépendants de la saison et des conditions de récolte).

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