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Téléphones mobiles

Free à l’origine d’une vague de blocages

De nombreux consommateurs ont vu leur téléphone s’arrêter de fonctionner du jour au lendemain ! Leur mobile aurait été bloqué à distance par l’opérateur Free Mobile, dans le but de rendre inutilisables des téléphones qu’on lui avait loués mais pas restitués. Des centaines de victimes se retrouvent dans l’impasse.

Mise à jour du 28 novembre 2018

Depuis la publication de cet article, la responsabilité de Free dans cette vague de blocages a été avérée. Dans la nuit du 31 octobre au 1er novembre, l’opérateur a inscrit sur la plateforme mondiale de gestion des téléphones volés ou perdus les numéros IMEI de plusieurs dizaines de milliers de mobiles (on parle de 300 000 !) dont il revendique la propriété, obligeant ainsi les autres opérateurs à bloquer les modèles fonctionnant sur leur réseau. Orange et SFR se sont exécutés immédiatement. Quant à Bouygues Télécom, s’il ne l’a pas fait aussitôt, il les a imités 3 semaines plus tard, après avoir adapté ses équipements pour faire face à l’afflux de demandes. Désormais, les téléphones bloqués ne fonctionnent plus sur aucun réseau.

Les consommateurs impactés par cette vague de blocage font non seulement les frais d’un système de location mal ficelé et d’un manque de contrôle évident de la part de Free, mais ils sont aussi les victimes collatérales d’une bataille qui oppose depuis plusieurs années la filiale d’Iliad à ses concurrents au sujet du subventionnement des téléphones. Deux procédures judiciaires ont en effet été lancées à ce sujet par Free à l’encontre de SFR et d’Orange qui voient dans la vague de blocages du 1er novembre une bonne occasion de montrer que le système de location mis en place par Free n’est pas non plus la panacée.

Le 1er novembre dernier aurait-il signé l’arrêt de mort de centaines de téléphones ? Toujours est-il que de nombreux consommateurs racontent avoir découvert, ce matin-là, que leur smartphone avait brusquement cessé de fonctionner. « Mon iPhone 8 ne captait plus le réseau de mon opérateur Sosh », se souvient Virginie qui, après quelques recherches, a fini par découvrir le pot aux roses : « C’est en entrant mon numéro IMEI [un numéro propre à chaque téléphone, ndlr] sur un site Internet que j’ai découvert qu’il avait été blacklisté par Free Mobile ! »

De fait, Free aurait procédé ce jour-là au blocage à distance de nombreux téléphones. Ces mobiles auraient tous la particularité d’avoir été confiés, dans le cadre de son offre de location, à des abonnés qui auraient arrêté de payer les mensualités sans rendre le téléphone. Les considérant comme volés, l’opérateur aurait décidé de les blacklister.

L’ennui, c’est qu’entre-temps, certains de ces téléphones ont changé de main, voire d’opérateur. Virginie, par exemple, dit avoir acheté son iPhone 650 € à un particulier via Leboncoin : « Le téléphone était neuf, sous blister. Le vendeur ne m’a pas remis de facture mais, à la place, il m’a donné un bon de livraison fourni par Free, sur lequel figuraient ses coordonnées. » Si, comme elle, la plupart des personnes concernées ont acheté leur téléphone via la plate-forme de petites annonces, d’autres assurent les avoir acquis dans des magasins de produits d’occasion (comme Easycash, Cash Converters, etc.), sur des sites Internet renommés (Amazon, CDiscount, etc.), voire dans la boutique d’un opérateur. Qui plus est, si certains l’ont acheté quelques mois auparavant, d’autres le possèdent depuis bien plus longtemps. « Cela fait plus de 2 ans que je l’ai acheté et à aucun moment je n’ai été alertée sur le fait qu’il y avait un problème avec ce téléphone », explique Sophie dont la page Facebook "Free m'a blacklisté" compte déjà plus de 500 victimes.

Les conséquences concrètes, elles, varient selon l’opérateur auquel est abonné le nouvel utilisateur. Les clients Bouygues et SFR sont les plus chanceux. Dans les jours qui ont suivi ce blacklistage, leur téléphone a été débloqué et ils ont pu l’utiliser comme avant. « Mon portable fonctionne, mais jusqu’à quand ?, se demande une abonnée SFR. Qui plus est, mon IMEI est toujours blacklisté. Je ne peux donc ni revendre mon téléphone, ni changer d’opérateur comme je le veux ! »

Les abonnés utilisant les réseaux Free et Orange, eux, ne peuvent toujours pas utiliser leur téléphone. Si certains ont réussi à le rendre au vendeur à qui ils l’avaient acheté, la plupart se retrouvent dans une impasse. « La seule solution que j’ai, c’est de changer d’opérateur », soupire Virginie.

Free, que nous avons contacté, n’a pour l’instant pas donné suite à notre demande.

Des recours limités

Malheureusement, les possibilités d’action des personnes dont le téléphone a été bloqué sont restreintes. Et pour cause : les conditions générales du service de location de mobiles de Free précisent que le téléphone demeure la propriété exclusive de Free et ne peut être ni cédé, ni loué, ni prêté à un tiers par l’utilisateur (article 3.1 des conditions générales de vente [CGV] d’octobre 2008 et de juin 2014). Le fait de payer une pénalité pour non-restitution ne vaut pas non plus transfert de propriété. Free reste donc dans tous les cas le propriétaire des mobiles loués et, à ce titre, est fondé à faire ce qu’il veut de ses terminaux, y compris les bloquer, quand bien même cette possibilité n’est pas évoquée dans les CGV.

Dans ces conditions, le consommateur se retrouvant avec un mobile blacklisté n’a d’autre choix que de se retourner vers le vendeur du téléphone.

S’il s’agit d’un particulier, il peut potentiellement faire jouer la garantie des vices cachés (articles 1641 et suivants du code civil), mais les conditions d’application sont très restreintes. Cette solution n'est pas forcément adaptée.

Dans le cas où le vendeur est un professionnel, le consommateur a tout intérêt à se prévaloir de la garantie légale de conformité (articles L. 217-4 et suivants du code de la consommation) afin d’obtenir le remplacement ou le remboursement du téléphone. Attention toutefois, cette garantie ne peut être activée que dans les 2 ans suivant l’achat. Si vous êtes dans ce cas, n’hésitez pas à saisir le vendeur en lui envoyant un courrier recommandé.

Par ailleurs, que le vendeur soit un particulier ou un professionnel, le consommateur est en droit de demander la nullité de la vente car le vendeur lui a cédé un bien qui ne lui appartenait pas (article 1599 du code civil sur la vente de la chose d'autrui). Il faut néanmoins qu'il soit en mesure d'identifier le vendeur et de pouvoir le contacter. Enfin, des poursuites pénales peuvent être envisagées à l’encontre du vendeur. Selon les circonstances, l’acquéreur peut porter plainte pour escroquerie (article 313-1 du code pénal), tromperie (article L. 441-1 du code de la consommation) ou recel de vol (article 321-1 du code pénal). Bien sûr, ces deux dernières possibilités n’empêchent pas de tenter de trouver avec lui une solution amiable.

De son côté, l’UFC-Que Choisir va continuer à travailler sur le sujet afin d’élaborer la meilleure solution pour les consommateurs victimes de ce blocage.

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