
par Marie-Amandine Stévenin
par Marie-Amandine Stévenin
Trop souvent, les banques tentent d’échapper à leur obligation de rembourser les consommateurs victimes d’opérations frauduleuses en arguant du non-respect d’un prétendu délai de 13 mois dans lequel leurs clients seraient, selon elles, obliger non seulement de leur signaler le caractère non autorisé ou mal exécuté de l’opération bancaire, mais aussi, face à leur refus injustifié de recréditer les fonds (malheureusement devenu légion), de saisir la justice dans ce même laps de temps. Or, il s’agit là d’une exigence fallacieuse, puisque juridiquement infondée, et parfaitement inacceptable pour les consommateurs !
En réalité, ce délai procédural de 13 mois – prévu à l’article L.133-24 du Code monétaire et financier – n’oblige le consommateur qu’à signaler, préalablement à sa banque, l’existence d’un débit frauduleux, et non d’avoir à saisir les tribunaux en cas de résistance fautive de l’établissement. Et c’est bien logique puisque cette démarche permet, d’une part, d’informer la banque afin de pouvoir obtenir la correction de l’opération litigieuse et, d’autre part, de réduire les risques et conséquences de la passation d’une telle opération. Telle est la position que l’UFC-Que Choisir a toujours défendue et continue de prôner fermement, en s’appuyant notamment sur les dispositions de la DSP1, la DSP2, et les textes fondateurs issus de leur transposition, puisque aucune de ces sources ne vient imposer au consommateur un quelconque délai spécifique et dérogatoire pour agir effectivement en justice.
Plusieurs juridictions partagent notre raisonnement en la matière : TJ de Paris, Pcp jtj proxi fond, 17 avril 2025, n°24/03327 ; TJ Paris 12 mars 2025, n°24/04190 ; CA Aix-en-Provence, chambre 3 3, 13 février 2025, N°24/07172 ; CA Paris, Pôle 5 chambre 6, 10 mai 2023, N°21/07764 ; Cass. com., 28 mars 2018, n°16-26.381. Dans d’autres cas d’espèces, c’est d’ailleurs uniquement parce que le consommateur n’avait pas signalé l’opération sous 13 mois qu’il a été jugé irrecevable, et non en raison du délai dans lequel il avait initié son action judiciaire (notamment : Cass.com., 27 mars 2024, n°22-21.200 ou CA Versailles, 13 septembre 2018, RG n° 17/10666).
Et je ne peux que me réjouir que la Cour de cassation soit venue très récemment, par un arrêt du 2 juillet 2025 (n°24-16.590), rappeler que ce délai de 13 mois de l’article L. 133-24 du CMF ne s’entendait que d’un simple délai de réclamation préalable auprès de la banque, et non d’un délai d’exercice de l’action en justice contre celle-ci, laquelle pouvant donc librement se faire ensuite dans le délai de prescription de droit commun (autrement dit, et à date, 5 ans). https://www.courdecassation.fr/decision/6864c79a3355b57104228e5f
J’espère d’ailleurs que cette décision incitera les rares juridictions du fond aux positions parfois « dissidentes » à revoir leur copie dans un sens plus conforme à la philosophie des textes et plus favorable aux consommateurs…
Pour résumer : Non, le consommateur n’a pas à agir en justice dans les 13 mois ! La seule exigence étant d’avoir à signaler la fraude à sa banque dans ce délai.
J’encourage donc les consommateurs à signaler à leur banque, et systématiquement par écrit (pour se ménager une preuve), toutes opérations non autorisées dans les 13 mois du débit et de ne pas (plus) hésiter à former un pourvoi contre les décisions d’appel infondées venant leur reprocher de ne pas avoir, également, porté en justice leur litige avec la banque sous ce même délai.
Marie-Amandine Stévenin
Présidente de l'UFC-Que Choisir
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