Laurence Delain-David
Assurance vieLe palmarès des rendements 2014
Plombé par un environnement de taux obligataires historiquement bas, le cru 2014 des fonds en euros s’annonce médiocre. Mais quelques offres tiennent encore le cap des 3 %.
Il est encore un peu tôt pour avoir les chiffres exacts, mais le rendement moyen 2014 des fonds en euros devrait céder environ 0,30 point par rapport à son niveau de 2013 (2,8 %). Et s’afficher « dans une fourchette variable de 2,20 % et 2,60 % en moyenne pour le gros des encours », calcule Cyrille Chartier-Kastler, président fondateur du cabinet indépendant Facts & Figures.
Certes, rapportée à une inflation quasi nulle et comparée à un taux du livret A bloqué à 1 %, cette performance n’est pas si mauvaise pour un produit d’épargne au capital garanti et récupérable à tout moment. En valeur nette d’inflation, l’assurance vie en euros rapporte d’ailleurs autant qu’il y a dix ans (en 2004, le taux moyen était de 4,4 %, mais l’inflation de 2,3 %). Il n’empêche, de nouveau plébiscité par les épargnants (plus de 100 milliards d’euros de collecte l’an passé), ce placement va faire des déçus.
Dispersion des taux
Les fonds en euros sont encore massivement investis en obligations d’État (environ un tiers des portefeuilles des compagnies qui pèsent plus de 1 510 milliards d’euros !). Or depuis plusieurs mois les assureurs composent avec une situation de taux souverains historiquement bas. Entre janvier 2014 et 2015, le taux de l’OAT (obligations assimilables du Trésor) 10 ans qui est l’indice de référence du secteur a fondu de 2,40 % à 0,7 % (il s’est à nouveau dégradé depuis). Cette chute inédite, associée à une Bourse ultra-volatile, réduit sensiblement les marges de manœuvre financières des acteurs du marché.
Pourtant, confrontés aux mêmes contraintes, tous ne réagissent pas de la même façon. Une fois de plus, l’écart se creuse entre d’un côté les produits standards des banques et des compagnies traditionnelles qui se rapprochent du seuil des 2 %. Et de l’autre, les offres promues par les mutuelles, les associations d’assurés (Afer, Gaipare, Asac Fapes...) ou encore les courtiers Internet, qui tiennent le cap des 3 % (voir tableau). Quelques supports plus récents et atypiques baptisés « europierre » (car investis en immobilier) font même mieux.
Stratégies différenciées
Plusieurs facteurs expliquent cette disparité parmi lesquels sont régulièrement citées la taille et l’ancienneté des contrats concernés. « On ne pilote pas un paquebot comme un catamaran », se plaisent à rappeler les assureurs. C’est vrai, mais le volume n’explique pas tout comme en témoignent par exemple les 3,20 % servis par le fonds en euros de l’Afer, l’un des plus gros du marché (46 milliards d’euros d’encours). Les bancassureurs qui ont des actionnaires à rémunérer ménagent davantage leurs marges. Et la pertinence des arbitrages financiers effectués par les équipes de gestion ne profitent pas toujours en priorité aux assurés.
Attention aux bonus
« Il faut bien décrypter les communiqués qui passent souvent sous silence les taux des "vieux" contrats fermés aux nouvelles souscriptions mais très lourds en encours et braquent le projecteur sur des taux bonus lorsqu’ils existent », note Cyrille Chartier-Kastler.
Soucieux de pousser leurs clients à souscrire davantage de supports en UC (unités de compte), investis sur les marchés financiers, plusieurs réseaux (Axa, Groupama, MMA Crédit Agricole, Swiss Life, etc.) font en effet le choix de bonifier la rentabilité des fonds en euros des contrats les plus diversifiés. Chez Axa par exemple, le taux de base servi sur les fonds en euros est de 2,55 %, il grimpe à 3,05 % pour les contrats d’au moins 50 000 € contenant 25 % d’UC. Mais attention, l’assuré ne doit jamais oublier que ces UC ne bénéficient d’aucune garantie en capital. « Nous préférons continuer d’assumer les risques pour nos adhérents en privilégiant pour nos fonds en euros une gestion de conviction au long cours », tranche Gilles Dupin, président et directeur général de Monceau Assurances. L’an dernier, ce groupe mutualiste a dégagé des rendements supérieurs à 3 % pour l’ensemble de ses contrats, tout en respectant un strict cantonnement des actifs (les bénéfices générés par la gestion d’un contrat reviennent aux seuls souscripteurs de ce contrat).
Quid des PPE ?
Pour lisser le rendement de leurs fonds en euros dans le temps, les assureurs ont une botte secrète : la PPE (provision pour participation aux excédents). Alimentée par les surplus de bénéfices financiers engrangés lorsque les marchés sont bien orientés, cette réserve doit être redistribuée aux assurés dans les huit années qui suivent sa constitution. Or en 2014, pratiquement toutes les compagnies ont renforcé cette PPE. Estimée à environ 3 % des encours sous gestion, cette provision devrait, à défaut de l’empêcher, contribuer à freiner la baisse des taux pour les prochaines années.