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Maladie d’AlzheimerPas de distribution anticipée pour le lécanémab

Audrey Vaugrente

par Audrey Vaugrente

Il n’y aura pas de mesure d’exception pour le lécanémab (Leqembi). Cet anticorps monoclonal, autorisé dans les formes débutantes de la maladie d’Alzheimer, n’est pas assez efficace et trop risqué pour être distribué dans le cadre d’une autorisation d’accès précoce.

Le lécanémab (Leqembi) est-il susceptible de changer la donne pour les patients atteints de la maladie d’Alzheimer ? Pour la Haute autorité de Santé (HAS), la réponse est non. Elle vient de refuser au fabricant de cet anticorps monoclonal, le laboratoire japonais Eisai, une autorisation d’accès précoce. Ce traitement cible les plaques de protéines amyloïdes bêta, qui s’accumulent dans le cerveau des personnes malades. Il ne remplit pas les critères pour bénéficier de cette mesure d’exception.

Une autorisation d’accès précoce doit répondre à 4 critères : le médicament doit viser une maladie grave, rare ou invalidante qui ne dispose pas d’un traitement approprié au moment de la demande. Il n’est pas possible de différer le début du traitement évalué et celui-ci est « présumé innovant ». En cas de réponse positive, le fabricant peut distribuer son produit avant son évaluation en vue du remboursement et des négociations sur le prix.

Au vu des études disponibles, le lécanémab ne remplit pas ces 4 critères. La HAS confirme que la maladie d’Alzheimer est à la fois grave et invalidante, et qu’il n’existe aucun médicament satisfaisant (voir encadré). En revanche, le laboratoire n’a pas démontré l’intérêt de démarrer au plus vite le traitement. Lors des essais cliniques, la molécule a bien réduit le déclin des patients... mais de 2,5 % seulement. Ces tests ayant été menés chez des patients souffrant de symptômes légers et sur 18 mois, il n’est pas possible de savoir si ce petit bénéfice est durable et significatif sur le plan clinique. Difficile, au vu de ces éléments, de qualifier le traitement d’innovant.

Des complications parfois graves

Outre cette efficacité très limitée, le lécanémab est responsable d’effets secondaires pouvant être sévères. Ceux-ci ne sont pas si rares puisque les œdèmes cérébraux ont concerné 9 % des patients traités et les hémorragies ou microhémorragies du cerveau 12 %. Ces complications touchent surtout les porteurs des deux copies du gène de l'apolipoprotéine E4 (dits « homozygotes »), qui sont les plus à risque de développer une maladie d’Alzheimer. C’est pour cela que l’autorisation de mise sur le marché (AMM) les exclut du public cible.

Cette efficacité incertaine et ces risques réels sont incompatibles avec une mise à disposition précoce, conclut la HAS. Loin de porter préjudice aux patients, elle semble plutôt protectrice. Pour être remboursé, le lécanémab devra donc suivre le processus habituel, avec un délai plus long : en moyenne, 176 jours s’écoulent entre la demande de remboursement et son examen.

Des précédents peu efficaces

Divers médicaments ont été autorisés pour gérer les symptômes de la maladie d’Alzheimer par le passé. Quatre d'entre eux ont fait l’objet d’une vague de déremboursement à l’été 2018 : le donépézil (Aricept), la galantamine (Reminyl), la mémantine (Ebixa) et la rivastigmine (Exelon). La Haute autorité de Santé avait pointé l’insuffisante efficacité de ces traitements, mais aussi des effets indésirables digestifs, cardiovasculaires et neuropsychiatriques parfois graves.  L’affaire avait été portée devant le Conseil d’État, qui avait validé le déremboursement de ces médicaments.

Audrey Vaugrente

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