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Parc éolienPas de trouble anormal de voisinage

L’éolien, source de production d’énergie électrique en plein développement, n’est pas sans dérangement pour les riverains. Dans une affaire récente, la Cour de cassation a écarté l’action de propriétaires en affirmant que la présence des éoliennes litigieuses n’était pas à l’origine d’un trouble dépassant les inconvénients normaux de voisinage.

La jurisprudence n’est pas encore clairement établie quant à la reconnaissance des éoliennes comme trouble anormal de voisinage. Dans un arrêt récent, la Cour de cassation refuse de reconnaître l’anormalité du préjudice subi après avoir apprécié le trouble in concreto (arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, 17 septembre 2020, pourvoi n° 19-16.937).

Nul n’a de droit acquis à son environnement

Dans cette affaire, des propriétaires ont attaqué une société de parc éolien en réparation des préjudices occasionnés par l’installation, à proximité de leurs résidences secondaires, d’éoliennes générant selon eux des troubles anormaux de voisinage. Les juges d’appel admettent qu’il existe un trouble paysager pouvant avoir des conséquences en termes de revente éventuelle des biens. Ils reconnaissent également un préjudice du fait d’une atteinte à l’environnement général dans lequel se situent les propriétés se traduisant par une difficulté à trouver des acquéreurs potentiels. Ils admettent une diminution de la valeur vénale des maisons dont la décote est estimée de 10 à 20 %. Pour autant, les juges concluent à une absence de trouble anormal de voisinage car « les modifications apportées à l'environnement du bien ne peuvent donner lieu à réparation faute de droit acquis à le conserver ».

Un préjudice d’une gravité insuffisante

La Cour de cassation, saisie à son tour, confirme l’arrêt d’appel et rejette le pourvoi des propriétaires. Les hauts magistrats rappellent que selon le rapport d’expertise et le constat d’huissier, « le volume des émissions sonores générées par les éoliennes, de nouvelle génération, était, de jour comme de nuit, inférieur aux seuils prévus par la réglementation en vigueur et que le bois situé entre les propriétés et le parc éolien, installé à distance réglementaire des habitations, formait un écran sonore et visuel réduisant les nuisances occasionnées aux habitants d'un hameau, certes élégant et paisible, mais situé dans un paysage rural ordinaire ». Ils réaffirment le principe selon lequel « nul n'a un droit acquis à la conservation de son environnement » et que le trouble s’apprécie au cas par cas. En l’espèce la dépréciation modérée, « dans un contexte de morosité du marché local de l'immobilier, ne dépassait pas, par sa gravité, les inconvénients normaux du voisinage, eu égard à l'objectif d'intérêt public poursuivi par le développement de l'énergie éolienne ».

Appréciation au cas par cas

Cet arrêt ne signifie absolument pas qu’aucune action en justice pour trouble anormal de voisinage ne peut aboutir en présence d’un parc éolien à proximité de sa propriété. Il réaffirme le principe selon lequel les juges doivent apprécier la situation au cas par cas. Ainsi, la solution aurait pu être tout autre si le parc éolien était plus visible, si les nuisances sonores étaient plus fortes, si la dévaluation immobilière était plus importante.

Indemnisation oui, démantèlement non

En revanche, le juge judiciaire n’est pas compétent pour ordonner le démontage et l’enlèvement des éoliennes sur le fondement des troubles anormaux de voisinage. Le fait que les éoliennes soient soumises au régime des installations classées implique la compétence du juge administratif (arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, 25 janvier 2017, pourvoi n° 15-25.526). En conséquence, une action pour trouble anormal de voisinage, si elle aboutit, peut aboutir à l’attribution de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ou même à l’obligation de prendre des mesures pour faire cesser les nuisances (par exemple des travaux), mais pas au démantèlement des éoliennes. Il n’est possible de l’obtenir que devant le juge administratif si l’installation n’est pas réglementaire.

L’éolien en France

Le parc éolien français se classe aujourd’hui au quatrième rang européen derrière l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne. Trois régions de l’Hexagone totalisent 60 % de la production d’électricité française d’origine éolienne : le Grand-Est, les Hauts-de-France et l’Occitanie. Et si l’éolien français est essentiellement implanté sur terre, il existe 7 parcs éoliens en mer (un 8e est prévu à l’horizon 2022). La France s’est fixé pour objectif d’atteindre 32 % d’énergies renouvelables dans la consommation totale d’énergie à l’horizon 2030 (loi n° 2015-992 du 18 août 2015).

Rosine Maiolo

Rosine Maiolo

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