Cyril Brosset
La Fnac n’a pas fait ce qu’il fallait
Le spécialiste des produits culturels doit indemniser un particulier qui avait été victime du piratage de sa market place sur Fnac.com. La justice vient de reconnaître que le marchand n’avait pas pris les mesures suffisantes pour assurer la protection de ses clients.
Au cours du second semestre 2017, la market place (place de marché) de la Fnac faisait l’objet d’une grande vague de piratage. Des escrocs avaient réussi, en prenant le contrôle des comptes de plusieurs marchands, à détourner des commandes et à encaisser les paiements. Résultat : des dizaines, peut-être même des centaines de clients n’avaient jamais reçu l’article qu’ils avaient commandé et payé. S’estimant victime elle aussi et assurant avoir pris toutes les mesures nécessaires pour endiguer le phénomène, la Fnac avait refusé de procéder au moindre remboursement, se contentant de distribuer quelques bons d’achat au cas par cas. Deux ans plus tard, cette défense est mise à mal par la justice. Dans un jugement du 1er avril dernier, le tribunal d’instance d’Oloron-Sainte-Marie (64) vient en effet de condamner la Fnac à rembourser un client victime de cette vague de piratage.
Le 6 juin 2017, Nicolas avait acheté sur la market place de la Fnac une plancha à gaz à 500 € qu’il n’a jamais reçue. Comprenant qu’il avait été victime d’une escroquerie, il s’était tourné vers le service client de la Fnac. En l’absence de réponse satisfaisante, Nicolas avait fini par porter l’affaire devant la justice, qui vient de lui donner raison et obliger la Fnac à lui rembourser les 500 € liés à l’achat de la plancha ainsi qu’à lui verser 500 € supplémentaires au titre des frais de procédure.
Au-delà de la seule condamnation, le jugement souligne plusieurs points importants. Tout d’abord, il reconnaît que le piratage a été « habilement mené » et donc que les victimes n’ont pas fait preuve d’une extrême naïveté, contrairement à ce que laissait parfois entendre la Fnac. Mais surtout, la juge note que le marchand n’a pas pris toutes les mesures nécessaires pour limiter le nombre de victimes, confirmant les doutes que Que Choisir avait émis à l’époque. En effet, selon des documents présentés à l’audience, la Fnac daterait au 30 mai 2017 le début des actes de piratage. Au moment où Nicolas passait sa commande, le 6 juin, le marchand était donc au courant que sa market place était le théâtre d’actes de piratage. Pour autant, l’enseigne n’a « pris aucune mesure pour avertir les clients attirés par les propositions promotionnelles », note la juge avant de suggérer une explication à ce manque de réactivité : « Il est clair que la société a eu l’intention de privilégier ses intérêts commerciaux au détriment de ses clients qui ont été soumis à un risque évident de piratage. » Ce jugement, qui n’a fait l’objet d’aucun pourvoi en cassation, pourrait faire jurisprudence.