ACTUALITÉ
Vaisselle en bambou mélaminé

Interdite après des années de commercialisation

La vaisselle réutilisable en bambou mélaminé, qui comprend notamment nombre d’articles destinés aux enfants, n’est plus autorisée à la vente.

C’est par une note d’information de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) que l’information vient d’être diffusée : la vaisselle en plastique et bambou (bentos, bols, saladiers, etc.) ne peut pas être mise sur le marché. Ou du moins ne peut plus, puisque depuis des années les autorités ont laissé les consommateurs en acheter sans lever le petit doigt. Rien n’a pourtant changé dans la règlementation qui explique ce revirement.

Les matériaux destinés à entrer en contact avec les denrées alimentaires font l’objet d’un encadrement spécifique qui énonce un principe d’inertie : ils ne doivent pas relarguer de substances susceptibles de nuire à la santé. Par ailleurs, un règlement européen datant de 2011 énonce la liste des substances que les fabricants peuvent ajouter aux matières plastiques. Or, constate la DGCCRF, le bambou ne figure pas au nombre de ces composés. Pire, ajoute-t-elle, différentes analyses ont montré que l’utilisation de bambou dans les matières plastiques a pour effet de déstabiliser le produit fini menant ainsi à des migrations (notamment en formaldéhyde ou mélamine) supérieures à celles observées dans les produits en plastique conventionnels. Une note de la Commission européenne précise qu’il y a eu plus de 50 notifications dans le cadre du Système d’alertes rapides pour les produits alimentaires avec, dans 10 % des cas, un dépassement flagrant (d’un facteur de plus de 10) de la limite de migration en formaldéhyde.

Chez Ekobo, le pionnier de ce genre de vaisselle, qui commercialise ses produits depuis 2012, on parle d’un « tremblement de terre ». « La règlementation n’a pas changé, souligne Bruno Louis, le fondateur. Le règlement européen de 2011 spécifie qu’on a le droit de mélanger le plastique à des "farines et fibres de bois". (1) Nous avons toujours dit clairement que nos articles étaient faits de bambou et de mélamine et payé les droits de douane en conséquence. Après près de dix ans de commercialisation, on nous dit stop soudainement. De fait, nous avons vu arriver de nombreux concurrents qui, pour des questions de rentabilité, ont pu faire l’impasse sur la sécurité. Quant à nous, malgré de nombreuses analyses menées par des autorités européennes, on ne nous a jamais signifié que nous n’étions pas dans les clous. » L’entreprise nous a effectivement fourni plusieurs bulletins d’autocontrôle ne montrant aucun dépassement des limites de migration. « Plutôt que d’interdire une matière qui évite d’utiliser du plastique, les autorités devraient demander aux opérateurs de prouver l’innocuité de leurs articles », ajoute Bruno Louis.  

Pas de procédure de retrait ou de rappel

De fait, la DGCCRF ne semble pas convaincue que ce soit le bambou en lui-même qui pose problème. Pour preuve, elle invite les entreprises qui souhaiteraient continuer à le commercialiser à déposer un dossier de demande d’autorisation. Il sera alors évalué par l’Agence européenne de sécurité alimentaire et, en cas d’avis positif, autorisé pour une utilisation en mélange avec les matières plastiques au contact avec les denrées alimentaires. Pour l’heure, bien que sa note évoque un danger pour la santé, l’administration n’a pas entamé de procédure de retrait ou de rappel et on peut toujours acheter les articles dans les magasins et sur Internet. À la lecture de la note, il est difficile de mesurer le risque éventuel que courent les consommateurs à continuer à utiliser cette vaisselle s’ils en possèdent. D’après un rapport de l’agence sanitaire allemande, c’est à haute température que les migrations sont constatées. On réservera donc ces articles à une utilisation pour des denrées consommées froides.

Cette prise de position de la Répression des fraudes soulève encore une fois la question des nouveaux matériaux utilisés pour fabriquer de la vaisselle, qu’elle soit jetable ou réutilisable : les allégations sur leur caractère durable ne doivent empêcher les consommateurs de s’interroger ni sur leur véritable impact environnemental, ni sur leur innocuité.

(1) Certes, le bambou, du point de vue de la nomenclature botanique, n’est pas du bois. Mais Ekobo nous a fourni un bulletin d’un laboratoire réputé et qui, analysant la composition d’un de ses articles, conclut : bois majoritaire. 

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