Cyril Brosset
Des fausses promos à gogo
40, 50, 60 % de réduction voire plus, le Black Friday, c’est LE jour des bonnes affaires. En tout cas, c’est ce que cherchent à faire croire les marchands et e-commerçants qui multiplient, ce jour-là, les promotions incroyables. La réalité est toutefois bien moins reluisante.
Les marchands ont beau nous abreuver de promotions depuis plusieurs semaines, le Black Friday (« vendredi noir » en anglais), c’est aujourd’hui officiellement. À coups de publicités alléchantes et de fausses promos qui donnent le tournis, les marchands cherchent à inculquer dans les esprits que c’est le moment ou jamais de faire de bonnes affaires.
Certes, il y a bien quelques sites qui jouent plus le jeu que d’autres. Sur Amazon, Boulanger, Connexion, Pulsat ou encore Ubaldi, la majorité des promotions affichent des taux de réduction plus modestes (de l’ordre de 10 à 20 %), mais qui correspondent plus à la réalité. Toutefois, chez la plupart des marchands, le consommateur doit toujours faire preuve de méfiance. Nos enquêtes montrent systématiquement qu’au-delà de 20 % de réduction, le risque de tomber sur une fausse promotion est quasiment inévitable. Cela ne signifie pas qu’au final vous ne ferez pas une bonne affaire, mais qu’elle sera loin d’être aussi intéressante que ce que promet le marchand.
Comme nous le faisons depuis 5 ans, nous avons fait un tour des offres mises en avant par les e-commerçants ce matin. Et une fois de plus, il n’a pas fallu chercher beaucoup pour tomber sur des réductions mensongères. Voici 4 exemples pris au hasard.
Auchan : un prix de référence au doigt mouillé
Alors que les marchands sont tenus de justifier la réalité du prix de référence (ou prix barré), Auchan.fr ne prend pas cette peine. Impossible de savoir où et quand cette centrale vapeur a été vendue au prix de 299 €. En revanche, ce que l’on sait, c’est qu’on la trouve au même moment à moins de 200 € chez au moins deux autres marchands et qu’en avril-mai, Auchan.fr la vendait 202,84 €, soit une réduction de 12 %, et non de 40 %.
Cdiscount : la marketplace a bon dos
À en croire Cdiscount, ce téléviseur serait vendu en moyenne 900 € sur sa marketplace. Si plusieurs marchands le vendent en effet à ce prix-là, voire un peu plus cher, beaucoup le vendent à un tarif nettement inférieur. D’ailleurs, Cdiscount lui-même le vendait à 549,99 € depuis le 24 octobre, avant de baisser son prix à l’occasion du Black Friday, soit une réduction réelle de seulement 3,6 %.
Conforama : on ressort les vieilles références
Chez Conforama, on profite du Black Friday pour refourguer de vieux modèles, à l’image de cette table de cuisson dont la première commercialisation date d’il y a 4 ans et qu’il est aujourd’hui le seul à vendre. Du coup, il peut jouer à sa guise avec le prix d’origine, et il ne s’en prive pas. Alors que depuis 2017, elle était vendue partout entre 259 et 279 €, Conforama l’a proposée à 379,99 € 30 jours avant le Black Friday avant de la passer à 199,99 € il y a quelques jours, soit une réduction affichée de 48 %. Sauf que si l’on compare avec le prix le plus fréquemment pratiqué depuis 4 ans, on est plutôt sur du 23 % de remise.
MDA Électroménager : la ristourne fantôme
Mais d’où peut bien venir le prix d’origine de 699,99 € affiché par MDA Électroménager ? Mystère. Le site ne le précise pas. En revanche, il prend bien la peine de mettre en avant sa promotion de 29 %. Pourtant, depuis au moins 1 mois, la plupart des sites vendent ce même lave-linge au prix de 500 €, sans promotion. Bref, 500 €, c’est son prix !
Bientôt la fin des promos bidon ?
Actuellement, la législation est tellement floue qu’un marchand peut afficher le prix de référence qu’il souhaite. Sa seule obligation est de pouvoir justifier qu’il n’est pas fantaisiste. Dans la réalité, certains prennent pour référence le prix le plus élevé appliqué chez les concurrents, le prix de vente indicatif proposé par le fabricant (même si aucun site ne l’a jamais appliqué), voire vont jusqu’à relever le prix de vente sur leur site pour pouvoir ensuite afficher une baisse substantielle.
À partir de l’année prochaine, les règles du jeu vont changer. L’UFC-Que Choisir a en effet obtenu que la directive Omnibus, adoptée par l’Union européenne, intègre des dispositions plus restrictives en matière d’encadrement des promotions. Celle-ci doit encore être transposée dans le droit français pour une entrée en vigueur au plus tard en mai 2022. Si on ne connaît pas encore précisément les détails de la future législation, les marchands devraient a minima être contraints de prendre comme référence le prix le plus bas pratiqué dans les 30 jours précédant la promotion. Certes, ils risquent de pouvoir encore gonfler leurs ristournes en manipulant leurs propres prix de vente, mais au moins, ils ne pourront plus utiliser comme référence le « prix fabricant » ou celui appliqué par des concurrents.