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Œufs contaminés au fipronil

Des lots livrés en France

L’affaire des œufs contaminés au produit antipoux, initialement cantonnée au nord de l’Europe, se propage désormais à la France. Des lots d’œufs exposés à l’insecticide frauduleux ont en effet été livrés à cinq entreprises spécialisées dans les produits à base d’œufs à destination de l’agroalimentaire, selon le ministère de l’Agriculture qui a lancé des investigations dans les établissements concernés. 

Ce n’est pas encore la rentrée mais les poux font déjà parler d’eux… dans les œufs ! Depuis fin juillet, l’Europe fait face à la contamination d’œufs et de viandes de volailles par un produit antipoux utilisé de manière frauduleuse : le fipronil. Le 20 juillet dernier, les autorités belges informaient la Commission européenne que des taux élevés de cet insecticide avaient été mis en évidence dans des œufs et des viandes de volailles (conventionnels et bio) en Belgique et aux Pays-Bas.

Utilisation frauduleuse

L’usage du fipronil, indiqué pour lutter contre les ravageurs de cultures et les puces d’animaux familiers, n'est pas autorisé dans le traitement des animaux destinés à la consommation humaine.

Pourtant, une enquête des autorités belges a démontré sa présence dans un produit antiparasitaire falsifié, commercialisé sous l'appellation DEGA 16 et utilisé dans les élevages de volailles. Suite à ces révélations, plus de 60 exploitations en Belgique et 180 aux Pays-Bas ont été bloquées en raison de la présence suspectée de la substance interdite.

La France également touchée

Et si notre pays semblait dans un premier temps épargné, le 5 août les autorités européennes informaient l’Hexagone que 13 lots d’œufs contaminés en provenance des Pays-Bas avaient été livrés entre le 11 et le 26 juillet 2017 à cinq établissements de fabrication d’ovoproduits, des préparations alimentaires obtenues à partir d’œufs et notamment utilisées en pâtisserie, biscuiterie et plats préparés. Parmi eux, la Samo dans la Vienne, qui fournit notamment Nestlé, et un établissement du groupe Igreca, leader mondial des ovoproduits, situé dans le Maine-et-Loire.

Opacité des contrôles

Des investigations sont actuellement menées dans ces établissements par les services de contrôle du ministère de l'Agriculture, les lots incriminés faisant l’objet d’une mise sous séquestre selon le CNPO, l’interprofession des œufs. Mais alors que les premiers œufs contaminés sont arrivés sur le territoire il y a près d’un mois, à l’heure actuelle ni les autorités ni les entreprises concernées n’ont indiqué si des produits potentiellement contaminés avait d’ores et déjà été commercialisés. Pour l’heure, 200 tonnes de produits auraient été impactés rien que dans l’usine de la Samo, selon le journal La Nouvelle République. De son côté, si Igreca déclarait mardi 8 août dans un communiqué de presse avoir identifié les lots de produits finis élaborés à partir d’œufs contaminés, soit « 30 000 œufs de fournisseurs hollandais », l’entreprise ne précisait pas ce qu’étaient devenus lesdits produits. Une goutte d’eau certes, au regard des 4,5 millions d’œufs que l’entreprise utilise quotidiennement, mais qui rappelle la nécessité d’un renforcement des contrôles nationaux et une meilleure coopération européenne alors que dans cette affaire, la Belgique a inexplicablement tardé à alerter la France. Une meilleure traçabilité des denrées alimentaires, notamment animales, ne cesse d’être réclamée par l'UFC-Que Choisir.

Substance modérément toxique

Alors que la substance est jugée modérément toxique par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le ministère de l’Agriculture rappelait dans un communiqué que « la présence de traces de fipronil ne constitue pas en soi un risque ; seules les analyses engagées permettront de déterminer si le niveau de contamination de ces produits est susceptible de présenter un risque pour la consommation ».

Le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation a toutefois saisit l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) pour obtenir un avis sur les risques pour la santé humaine liés à l’ingestion d’œufs ou de produits contaminés par le fipronil.

À ce jour, plusieurs pays européens sont concernés : la Belgique, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Suède, le Royaume-Uni, la Suisse et désormais la France.

Un produit évalué par la France

En 2004, dans le cadre de la directive 91/414/CEE qui prévoyait le réexamen systématique de toutes les substances existantes utilisées à des fins phytosanitaires en Europe, la France avait été chargée de l’évaluation du fipronil.

Le groupe de travail avait alors conclu à l’absence d’éléments indiquant que l’exposition à l’insecticide (essentiellement via les traitements antipuces des animaux de compagnie ou les produits de jardinage) constituait un risque pour la santé de l’homme, dans les bonnes conditions d’emploi. En 2012, l’Anses (agence de sécurité sanitaire) exigeait toutefois le retrait de colliers antipuces en contenant afin de limiter les risques de contaminations par contact. D’autre part, la commission française précisait ne pouvoir écarter un possible effet perturbateur endocrinien de l’insecticide et regrettait l'insuffisance des données disponibles sur la contamination via des denrées alimentaires. Les principales sources de contamination alimentaire sont les produits animaux gras (lait, viande, œuf) en raison du caractère lipophile de la molécule. 

Marie-Noëlle Delaby

Marie-Noëlle Delaby

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