ACTUALITÉ
Œufs de poulaillers domestiques

Trop pollués en Île-de-France !

Ni durs, ni au plat, ni en omelette, et pas plus dans les gâteaux : les propriétaires de poulaillers domestiques ne doivent plus consommer les œufs de leurs poules jusqu’à nouvel ordre, recommande l’Agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France. La raison : une contamination de ces aliments par des dioxines, des furanes et des PCB ‒ pour certains jusqu’à 50 fois la dose maximale réglementaire.

La pollution des œufs – mais aussi des sols et plus largement de « l’environnement urbain » ‒ par ces trois polluants organiques persistants (POP) nocifs pour la santé est « potentiellement » généralisée en Île-de-France, soulignait l’Agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France, ce 19 avril, au vu des résultats d’une étude menée sur les sols et les œufs de 25 poulaillers répartis dans les zones urbanisées de la région, dont 21 ne sont pas consommables. Pourquoi les œufs ? Riches en lipides, ils s’avèrent être de bons marqueurs de la pollution par les dioxines, furanes et PCB, ces substances se concentrant dans les corps gras.

Une pollution généralisée

Parmi les 25 sites étudiés, 11 sont éloignés des incinérateurs, qui constituent la principale source de pollution. Pourtant, eux aussi sont contaminés par ces POP, et deux d’entre eux le sont même à des doses 40 à 50 fois supérieures aux seuils réglementaires en vigueur pour les œufs commercialisés ! L’ARS estime donc que la contamination de l’environnement urbain est généralisée en région parisienne, et n’est pas uniquement due aux incinérateurs. Elle enquête pour en déterminer l’origine, mais on peut déjà en avoir une idée.

Contactée, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a expliqué à Que Choisir que cette pollution était produite lors des processus de combustion, et qu’elle était donc « liée aux industries (dont les incinérateurs), au trafic routier, et surtout au chauffage domestique qui est source de rejets atmosphériques en dioxines et en furanes, et donc en contamination des sols après dispersion atmosphérique ». Mauvaise nouvelle pour les habitants des autres régions, « les autres métropoles sont également concernées ».

Des effets nocifs pour la santé

Les conclusions de l’ARS seront livrées fin juin. D’ici là, il est recommandé à tous les habitants d’Île-de-France de ne plus consommer d’œufs issus de petits élevages de basse-cour. Il est également préconisé de ne pas consommer la chair des poules et poulets élevés sur un sol nu. En effet, les dioxines, furanes et PCB sont particulièrement délétères à long terme pour la santé : augmentation du risque de cancer, de troubles de la fertilité et de la grossesse ou encore de diabète, et effets perturbateurs endocriniens. Or, « il n’existe aucun traitement pour éliminer ces substances de l’organisme », rappelle l’Agence.

Éviter de consommer des aliments gras

Seule prévention possible : éviter de consommer des produits contaminés. L’alimentation est en effet la principale voie de contamination, car ces POP s’accumulent tout au long de la chaîne alimentaire. Les dioxines, furanes et PCB se dégradent peu, et se stockent dans les graisses. Ils se retrouvent donc particulièrement dans les viandes, les poissons, les crustacés, le lait et les produits laitiers, et les œufs. Les fruits et légumes sont quant à eux faiblement contaminables, du fait de l’absence de graisses.

Les œufs du commerce ne sont pas concernés : ils sont soumis à des normes réglementaires qui plafonnent les teneurs en POP et à un plan de surveillance géré par le ministère de l’Agriculture, censés garantir leur qualité. Par ailleurs, les œufs de poules élevées en claustration sont souvent moins contaminés que ceux de plein air, fermiers ou bio, car les animaux, ne sortant pas, sont moins exposés aux rejets. Mais ils sont moins favorables au bien-être animal et à la biodiversité. Un dilemme pour les consommateurs soucieux d’acheter des produits plus vertueux.

Comment limiter la casse

Si vous voulez malgré tout continuer à consommer les œufs de vos poules, l’Anses recommande de limiter votre exposition en adoptant quelques bonnes pratiques :

  • éviter de laisser les poules picorer le sol (ce qui leur fait ingurgiter de la terre, de l’herbe et des insectes contaminés), en leur apportant une alimentation équilibrée ;
  • leur distribuer la nourriture dans des mangeoires ;
  • éviter de brûler des déchets verts à proximité du poulailler ;
  • éviter d’amender le sol du poulailler avec les cendres ;
  • diversifier vos sources d’approvisionnement en œufs en alternant avec des œufs du commerce. Ces derniers sont encadrés par des valeurs réglementaires en concentration de dioxines/furanes.

D’où proviennent ces contaminants ?

• Les dioxines et furanes proviennent de la combustion des déchets (incinération des ordures ménagères, brûlage de déchets verts…) ou de procédés industriels (blanchiment des pâtes à papier par exemple). Ils se dispersent dans l’atmosphère avant de retomber au sol.

• Les PCB (polychlorobiphényles) peuvent aussi être rejetés par les incinérateurs, mais leur présence dans l’environnement est principalement due aux anciens usages (adhésifs, huiles, peintures, isolants électriques…) et à des pollutions accidentelles. Leur production est désormais interdite en France.

Comme leur nom l’indique, les polluants organiques persistants (POP) ont une durée de vie longue dans l’environnement, et peuvent y rester pendant des décennies. C’est l’ingestion, par les poules ou les vaches par exemple, de terre et de faune des sols contaminés par les retombées de dioxines ou de furanes, qui conduit à la contamination des œufs ou du lait.

Comment faire analyser ses œufs

La recherche de polluants organiques persistants dans les œufs peut être réalisée par quelques laboratoires spécialisés dans l’analyse des denrées alimentaires. Le ministère de l’Agriculture tient à jour un annuaire des laboratoires officiels et reconnus en alimentation. En voici quelques-uns (liste non exhaustive) :

Le coût unitaire de l’analyse est de l’ordre de 400 € d’après l’ARS.

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