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Rénovation énergétique

De nombreux dossiers MaPrimeRénov’ en attente depuis le début de l’année

Une fois un dossier de demande d’aide MaPrimeRénov’ déposé, l’Agence nationale de l’habitat (Anah) promet en moyenne une réponse dans les 5 semaines. Mais depuis le début de l’année, ces délais sont dans de nombreux cas nettement rallongés. Plusieurs facteurs expliquent ces retards.

Les dossiers de demande MaPrimeRénov’, principale aide publique en matière de rénovation énergétique, sont-ils bloqués depuis le début de l’année ? « En Corrèze, l’antenne locale de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) n’a pas réalisé de commission d’acceptation de demandes d’aides depuis le 1er janvier », nous alerte un artisan de ce département. Ces commissions se tiennent pourtant habituellement tous les mois. C’est à l’issue de cet examen final des dossiers de demandes d’aide que l’Anah accorde ou non sa notification d’octroi, donnant alors son aval pour lancer les travaux. Résultat : cet artisan corrézien, spécialisé dans l’isolation et habitué à travailler sur des rénovations d’ampleur de logements, dit ne pas avoir vu un seul chantier de ce type sortir depuis le 1er janvier.

Des mises à jour de logiciel qui traînent ?

Ce signalement corrobore plusieurs messages d’internautes laissés sur « MaPrimeRénov’ : le parcours du combattant », un groupe Facebook où échangent celles et ceux qui rencontrent des difficultés pour toucher l’aide. « Nous avons déposé un dossier auprès de l’Anah le 8 janvier 2024 dans le cadre d’une rénovation globale. Le dossier est toujours en cours d’instruction depuis presque 3 mois », affirmait l’une des 23 000 membres du groupe mercredi dernier. Pour rappel, l’Anah communique sur un délai moyen de 5 semaines entre la dépose du dossier et sa réponse accordant ou non les aides, sachant qu'il est « fortement déconseillé de lancer les travaux avant d’avoir obtenu ce retour de l’Anah », insiste Aurélien Déjean, chargé de mission transition énergétique à Soliha, association solidaire qui accompagne des foyers et copropriétés dans leurs rénovations.

On est largement au-delà dans ce cas précis. « Les délégations locales attendent que leurs systèmes informatiques soient mis à jour par rapport aux évolutions de 2024 », explique-t-on dans les commentaires. Aurélien Déjean confirme : « Chaque 1er janvier, il y a des évolutions dans les dispositifs d’aides MaPrimeRénov’, que ce soit au niveau des critères des travaux, du montant des aides, des plafonds de ressources pour être éligible, etc. L’Anah doit, dès lors, mettre à jour les logiciels qu’elle utilise pour instruire les dossiers. Un travail à faire à l’échelle de chacune de ses délégations locales, les aides et modalités n’étant pas toujours les mêmes d’un territoire à l’autre. » Habituellement, ces mises à jour sont bouclées en quelques semaines. « Avant fin février-début mars, précise-t-il. Cette année, d’après les échos que nous avons eus, les choses devraient rentrer dans l’ordre plutôt vers mi-avril. »

Embouteillages à craindre ?

Pourquoi tant de retard ? C’est l’une des questions que nous aurions aimé poser à l’Anah. Mais nos demandes sont restées lettre morte. On peut imaginer que la refonte importante de MaPrimeRénov’ au 1er janvier 2024, avec cette volonté de concentrer les aides sur les rénovations d’ampleur – cumulant plusieurs gestes de travaux – a pu compliquer les mises à jour de logiciel. S’est ajouté à cela le rétropédalage du gouvernement. Face à la chute de 40 % des demandes d’aides MaPrimeRénov’ sur les 2 premiers mois de l’année (par rapport à la même période en 2023), il annonçait mi-mars un réajustement en cours des dispositifs d’aides.

Reste à connaître le nombre de dossiers MaPrimeRénov’ dont l’instruction est actuellement en pause. Massif, comme le laisse entendre notre artisan corrézien, qui craint que les chantiers ne sortent tous en même temps au point de créer un embouteillage. « Une partie seulement des dossiers sont aujourd’hui bloqués, tempère Aurélien Déjean. Il s’agit de ceux concernant le parcours MaPrimeRénov’ accompagné et dont les demandeurs ont des revenus considérés comme modestes ou très modestes. C’est un héritage des dispositifs précédents mais pour ces profils, les dossiers passent par une commission de délibération au sein des délégations locales de l’Anah. Et ce sont celles-ci qui, bien souvent, n’ont pas pu se tenir depuis le 1er janvier. »

Lancer au plus vite l’année

Quoi qu’il en soit, ces délais d’instruction qui s’allongent ne sont qu’un des couacs du moment autour de MaPrimeRénov’. « Depuis l’automne dernier, puisque le gouvernement annonçait des aides massives sur ces rénovations d’ampleur au 1er janvier, de nombreux propriétaires avaient reporté leur projet de rénovation », explique Léana Msika, responsable des affaires publiques à Doremi, entreprise qui, comme Soliha, accompagne les propriétaires dans leur projet de rénovation d’ampleur. Mais pour toucher ces aides massives, MaPrimeRénov’ accompagné, le nouveau parcours dédié aux rénovations d’ampleur, impose d’être accompagné par un professionnel « Mon Accompagnateur Rénov » (MAR). Ce nouvel intermédiaire, qui peut être un opérateur public ou privé, est présenté comme un tiers de confiance neutre, présent pour accompagner les ménages à chaque étape de leur projet de rénovation. Début mars, seulement 400 structures étaient agréées MAR. Certes, elles représentaient plusieurs milliers d’accompagnateurs. « Mais c’est encore bien trop peu, reprend Léana Msika. Faute de pouvoir en trouver un, de nombreux ménages avec lesquels Doremi est en contact nous disent qu’ils ne peuvent même pas encore déposer leur dossier de demande d’aides. »

Mi-mars, le gouvernement annonçait une simplification de la procédure d’agrément pour sortir au plus vite les 650 dossiers de structures en cours de traitement. De quoi laisser espérer du mieux dans les semaines à venir ? Aurélien Déjean préfère en tout cas dédramatiser la situation : « Ce changement de paradigme – des rénovations par geste aux rénovations d’ampleur – va dans le bon sens mais implique forcément des tâtonnements au départ, estime-t-il. Sans doute, cette transition aurait pu être faite plus en douceur et mieux anticipée. Ce qu’il faut désormais est d’arrêter de tergiverser et lancer au plus vite l’année. »

Initialement, le gouvernement visait les 200 000 rénovations d’ampleur en 2024 contre 71 613 en 2023. Cet objectif a déjà été raboté à 140 000, ce qui reste ambitieux au regard du retard pris en ce début d’année.

Fabrice Pouliquen

Fabrice Pouliquen

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