par Arnaud Murati
Monopole des pièces de carrosserieEnfin la fin !

Un arrêt de la Cour de cassation rendu le 11 juin 2025 a mis fin à un long suspense. Les constructeurs français n’ont plus le monopole sur les pièces de carrosserie lorsque celles-ci ont 10 ans d’ancienneté. Explications.
Certains, dont l’UFC-Que Choisir, se sont longtemps battus contre le monopole des constructeurs sur les pièces détachées. Il aura fallu deux lois, un jugement en appel et sa confirmation en cassation pour que la Fédération des industries des équipements pour véhicules (Fiev) puisse enfin écrire la phrase suivante : « Désormais, il n’y a plus de doute : les équipementiers fabriquant les pièces d’origine ont la possibilité de les commercialiser librement sur le marché de la rechange automobile, sans que les constructeurs ne puissent s’y opposer. »
L’affaire remonte au 11 juin 2025 et à un arrêt de la Cour de cassation. Celle-ci était appelée à statuer sur la bonne conformité d’un arrêt de la cour d’appel de Paris prononcé le 23 mai 2023. La Cour de cassation n’a rien trouvé à y redire, rendant définitif l’arrêt des juges de la cour d’appel. Ces derniers avaient, au cours du procès en appel, infirmé le jugement de première instance. Dans cette affaire, une société espagnole, fournisseur de première monte de rétroviseurs pour différents constructeurs, avait mis sur le marché des éléments identiques à ceux proposés par le constructeur, exception faite du logo à la marque. En procédant de la sorte, l’entreprise ibérique pensait respecter à la lettre la loi dite « climat et résilience » du 22 août 2021 qui institue le fait que les dessins de pièces automobiles sont protégés 10 années durant après leur date de dépôt, et non plus 25 ans comme auparavant. La loi indique qu’au terme de ce délai, n’importe quel équipementier peut proposer des vitrages, tandis que pour tout ce qui relève des pièces de carrosserie (dont les rétroviseurs), seul l’équipementier fournisseur de la première monte a le droit de lancer une offre identique.
Interminable bras de fer juridique
Un constructeur, qui n’est pas nommé dans l’arrêt de la Cour de cassation, ne l’entendait pas de cette oreille. Puisque la loi climat et résilience est entrée en vigueur au 1er janvier 2023, le constructeur considérait que n’étaient concernés par ces nouvelles dispositions que les seuls dessins de pièces déposés postérieurement au 1er janvier 2023. La première mesure de libéralisation du marché ne serait donc intervenue qu’à partir de 2033… « Rien dans le texte ne justifiait une telle lecture », rappelle la Fiev dans son communiqué.
Les gagnants de cet interminable bras de fer juridique seront assurément les consommateurs. Dès 2011, l’UFC-Que Choisir lançait l’opération « Libère mon auto » et estimait à 34 % l’économie potentielle à réaliser sur les pièces de carrosserie en cas de libéralisation du marché. Un constat toujours valable alors que les prix des pièces détachées ne cessent d’augmenter. Selon l’association SRA qui effectue des études de coûts pour le compte des assureurs, les prix des pièces détachées de Citroën, par exemple, ont encore progressé de 8,28 % sur un an au deuxième trimestre 2025. Les pièces de Peugeot n’ont pas été en reste, avec +8,42 %.
Arnaud Murati