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Compléments alimentaires

Mise en garde contre la berbérine

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) a analysé la sécurité d’usage des compléments alimentaires de berbérine. Verdict : cet extrait de plante agit comme un médicament, avec des risques importants et doit être déconseillé à de nombreuses personnes, dont celles constituant le cœur de cible de ces produits.

Aliment ou médicament ? C’est la question qui sous-tend le rapport de l’Agence de sécurité alimentaire (Anses), paru fin novembre 2019, à propos de la berbérine. Cette substance active d’origine naturelle est tirée de diverses plantes dont l’épine-vinette (Berberis vulgaris). Si la consommation de ses baies (séchées ou en confiture) ne pose pas de problème, il en va autrement des extraits de racines ou d’écorces vendus sous forme de gélules. « La sécurité d’emploi de ces compléments alimentaires ne peut être à ce jour garantie », tranche l’Anses.  

Un médicament qui ne dit pas son nom

Le problème est le suivant : la berbérine a une action pharmacologique, réelle, importante et diverse. Elle a des effets établis sur le système nerveux central (anticonvulsion, antidouleur), sur le système cardiaque (antihypertenseur) et réduit le taux de certains lipides dans le sang. Elle agit particulièrement sur le métabolisme avec un effet hypoglycémiant (qui fait baisser le taux de sucre dans le sang). Les vendeurs de ces compléments alimentaires promeuvent leurs produits avec des mentions telles que « Maintien d’une glycémie normale » ou « Zéro sucres » voire en les recommandant comme traitement antidiabète. C’est ennuyeux à double titre. D’une part ce genre d’allégations santé n’a pas été autorisé. D’autre part elles masquent une réalité autre : en fait, la berbérine ne maintient pas la glycémie (effet physiologique) mais elle la fait baisser (effet thérapeutique), comme plusieurs études cliniques l’ont démontré. La nuance peut sembler subtile mais c’est précisément ce qui fait la différence entre un aliment et un médicament. À partir de 400 mg, écrit l’Anses, « la berbérine agit comme un médicament et non plus comme un aliment ». Mais les experts n’excluent pas un effet à des doses inférieures.

Diabétiques, gare !

Comme un médicament, la berbérine peut donc avoir des effets indésirables. Les plus fréquents sont d’ordre gastro-intestinal : diarrhées, douleurs abdominales, nausées, etc. Plus grave encore, la berbérine interagit avec de nombreux médicaments : la carbamézépine, la ciclosporine, la digoxine, le losartan, la metformine (un antidiabétique justement) et d’autres. Les conséquences de ces interactions peuvent être graves. Or ces produits sont en vente libre, dans les rayons des pharmacies ou des boutiques alimentaires. Nul ne peut donc se douter des risques qu’implique la consommation de ce produit apparemment inoffensif. L’Anses déconseille donc la consommation des compléments alimentaires aux personnes qui prennent des médicaments. Elle recommande aussi d’éviter l’usage pour les enfants et adolescents, les femmes enceintes et allaitantes et certaines populations à risque. Parmi ces dernières, les personnes souffrant de troubles cardiaques et les personnes diabétiques… qui sont précisément le public visé par ces produits. Les mises en garde et restrictions formulées par l’Anses visent à minimiser les risques. Mais au fond, c’est le statut réglementaire de ces compléments alimentaires qui doit être revu, ces compléments n’étant à l’évidence pas de simples « aliments ». Dans divers pays européens, comme la Suède, la Grèce, la Hongrie, l’usage de berbérine dans un cadre alimentaire n’est pas autorisé.

Perrine Vennetier

Perrine Vennetier

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