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Copie privée

La commission vole en éclat

Les industriels qui siégeaient à la commission pour la rémunération de la copie privée ont démissionné collectivement, pour protester contre les hausses de taxes que les sociétés de gestion des droits veulent imposer au nom des artistes.

Daté du 13 novembre, le communiqué est clair. « Excédées par les dérives répétées de la commission pour copie privée, les organisations professionnelles du collège des industriels décident de ne plus être prises en otage par des décisions conduisant à augmenter de manière continue les prix des appareils électroniques proposés aux consommateurs » (1).

La commission pour la rémunération de la copie privée a été créée en 1985. Elle fixe des taxes sur les supports numériques visant à compenser le préjudice causé par la copie privée. Le problème est que sa composition est déséquilibrée. Les représentants des artistes, ou plus exactement des sociétés de gestion de droits et des industriels de la culture, occupent la moitié des sièges, soit 12 sur 24. Ils ont en face d’eux six industriels et six représentants des consommateurs. Hélas, parmi ces derniers, souligne le collectif des industriels, on trouve des associations « aux positions ambivalentes (organisateurs de festivals) qui votent systématiquement avec les ayants droit ». On arrive ainsi « à une situation ubuesque où les ayants droit peuvent décider de leur propre rémunération », résume Maxence Demerlé, du Syndicat de l’industrie des technologies de l’information (SFIB). Le produit des redevances, en effet, n’est pas versé au budget de l’État, mais directement aux sociétés de perception des droits.

Hausse des taxes invraisemblable

L’UFC-Que Choisir ne siège plus dans cette commission, estimant que les cartes y sont biseautées. Le départ des industriels lui donne rétrospectivement raison. Il a été motivé par des propositions de hausse du barème qui porteraient les taxes à des niveaux invraisemblables (plus de 50 € pour un disque dur de 64 Go), alors que nos redevances copie privée sont déjà les plus chères d’Europe. Elles représentent 75 % du prix d’un DVD vierge, ce qui fait dire à Maxence Demerlé que « le mégaoctet est plus taxé en France que le litre d’essence ». Des études ont montré que le préjudice causé par la copie privée était en rapport avec le niveau des redevances, mais elles ont toutes été financées par les ayants droit et reposent sur des hypothèses très contestables.

Juridiquement, le départ des industriels crée une situation inédite. Selon Olivier de Chazeaux, représentant du Simavelec, « la commission ne peut plus travailler, elle n’est plus valablement composée ». Le barème actuel expire le 20 décembre. Après cette date, la redevance copie privée n’a plus de base légale. Un commerçant pourrait donc refuser de l’appliquer…

On peut toutefois imaginer que le gouvernement prorogera les taxes. Les décisions de la commission, en effet, n’ont pas force de loi. Elles doivent toujours passer par un arrêté pour être applicables. Et c’est peut-être là que réside le véritable scandale. Il est compréhensible, à défaut d’être légitime, que l’industrie de la culture tente d’élargir indéfiniment ses ressources, au détriment des consommateurs.  Mais pourquoi, depuis des années, les gouvernements successifs entérinent-ils ses demandes sans sourciller ?

(1) Fédération de l’e-commerce et de la vente à distance (Fevad), Syndicat des entreprises de commerce international de matériel audio, vidéo et informatique (Secimavi), Syndicat de l’industrie des technologies de l’information (SFIB), Syndicat des industries de matériels audiovisuels électroniques (Simavelec), Syndicat national des supports d'image et d'information (SNSII).

Erwan Seznec

Erwan Seznec

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