Audrey Vaugrente
Les traitements vendus à des prix exorbitants
Soigner son diabète est de plus en plus coûteux. Même des traitements anciens, comme l’insuline, voient leur prix exploser. Des tarifs plus raisonnables sont pourtant possibles.
En France, les soins liés au diabète ont coûté 9,6 milliards d’euros en 2021, soit 2 milliards de plus qu’en 2015. L’explosion des prix des médicaments est en partie responsable de cette hausse. Pourtant, ils pourraient être vendus bien moins cher tout en restant rentables pour les fabricants, comme le montre une étude de Médecins sans frontières (MSF) (1).
En partant du coût de production et de distribution, mais aussi des marges et des taxes, les chercheurs ont évalué le prix de vente de plusieurs traitements injectables du diabète : insulines, agonistes du GLP-1 (sémaglutide [Ozempic], liraglutide [Victoza], dulaglutide [Trulicity]) et gliflozines (canagliflozine [Invokana], dapagliflozine [Forxiga], empagliflozine [Jardiance]).
Premier constat : les insulines pourraient être distribuées à des tarifs allant de 2,4 à 55 $ (2,2 à 50,7 €), en fonction du type d’insuline et du mode d’injection… soit 1,3 à 38,9 fois moins que le prix de vente constaté dans les différents pays analysés. L’insuline, découverte en 1921, a pourtant été rentabilisée depuis longtemps.
Exclusivité jusqu’en 2040
Plus récent, l’exemple du sémaglutide (Ozempic) reflète bien cette recherche effrénée du profit. En intégrant les coûts de production, de distribution et une marge confortable, il serait possible de vendre ce médicament injectable entre 0,89 et 4,73 $ par mois. En France, un stylo contenant 4 doses s’écoule à 77,60 € alors qu’aux États-Unis, il coûte 963 $ (environ 868 €). Ces tarifs élevés ne pèsent pas seulement sur les dépenses publiques. Dans certains pays, dont les États-Unis, ils empêchent certains patients de recevoir un traitement essentiel.
L’apparition de génériques pourrait changer la donne, affirme MSF. Mais comme le soulignent les auteurs de cette étude, 3 fabricants se sont taillé la part du lion : à eux seuls, Novo Nordisk, Eli Lilly et Sanofi représentent 90 % du marché mondial. Pour les médicaments les plus récents, l’exclusivité est susceptible de durer jusqu’à 2040, notamment grâce à divers brevets. Dans ces circonstances, difficile pour un concurrent d’émerger.
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(1) « Estimated Sustainable Cost-Based Prices for Diabetes Medicines », M. Barber et al., JAMA Network Open, 27/03/2024.