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Emprunt bancaire

Le taux effectif global à la trappe ?

La loi impose que le taux effectif global (TEG) soit mentionné par écrit dans tout contrat de prêt. Mais un amendement actuellement en discussion menace de réduire son champ d’application en excluant les acceptations faites par fax ou par courriel. Un préjudice considérable pour la protection des consommateurs.

Les consommateurs seront-ils les victimes collatérales d’un débat qui, a priori, ne les concerne pas directement ? Le gouvernement semble résolu à réduire la portée de la protection posée par les articles L 313-1 et 2 du code de la consommation. Cet article impose que le TEG, taux effectif global, soit mentionné par écrit dans tout contrat de prêt. Le TEG est un élément essentiel d'une offre de prêt, car il intègre tous les frais que le client devra verser au banquier : non seulement les intérêts, mais aussi les frais de dossier, frais d’assurance, etc. C’est donc la seule information qui, avec la durée du prêt, permet de réellement comparer le coût d’offres différentes. Le législateur avait donc conféré une portée très générale à cette protection. En pratique, cette disposition a souvent été mise en œuvre par les tribunaux civils pour sanctionner des prêts préjudiciables aux particuliers.

Affaire d’État

Le gouvernement semble aujourd’hui résolu à exclure du champ d’application de la loi les acceptations faites par télécopie (fax) ou par voie électronique (courriel). Et voudrait aller très vite : « avant l’été », selon les propos de Pierre Moscovici, ministre des Finances, mercredi 4 juin 2013 à l’Assemblée nationale, lors de la discussion d’un amendement en faveur de la mesure (rejeté cette fois), déposé par le député Gilles Carrez.

Derrière la volonté de l’État, se cache en fait une question de gros sous… De nombreux prêts toxiques conclus entre les banques et les collectivités locales ne sont pas dans les clous, car les offres de prêts effectuées par fax ne mentionnent pas le TEG. Une décision du tribunal de Nanterre a déjà sanctionné plusieurs de ces prêts souscrits par le Conseil général de Seine-Saint-Denis (93). Mais l’État a hérité d’une partie de ces prêts (depuis la faillite de la banque Dexia) et… du risque financier.

Précédent risqué

Mais si l’on décide aujourd’hui que la loi ne s’applique pas (pour l’avenir, mais aussi pour le passé) aux offres de prêts renvoyées par télécopie (fax) ou par voie électronique (Internet), il n’y a plus d’infraction et plus de risque financier ! « Problème, en faisant cela, on introduit le ver dans le fruit », dénonce Maître Hélène Féron-Poloni, avocate au cabinet Le Coq-Vallon/Poloni, spécialisé dans la défense des épargnants. « Cela crée un très mauvais précédent pour réduire la portée de cet article protecteur que le législateur avait voulu sans limites ». L’exclusion de la voie électronique, au moment où Internet prend une telle ampleur, pose une autre question : un prêt contracté via Internet ne pourrait donc pas bénéficier de la même protection qu’un prêt effectué en direct ? « L’amendement proposé par Gilles Carrez pourrait procurer une opportunité aux banques de contourner la loi. Il suffirait de demander aux emprunteurs de renvoyer l’offre de prêt par voie électronique, pour ne plus avoir à mentionner le TEG », insiste Maître Hélène Féron-Poloni.

Élisa Oudin

Élisa Oudin

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