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Hôpital

Des réclamations toujours plus nombreuses

Année après année, la fréquence des réclamations en responsabilité civile médicale contre les hôpitaux et cliniques continue d’augmenter, de même que le montant des indemnités décidées par la justice à destination des patients. Il a atteint en moyenne près de 270 000 € en 2015.

La tendance ne faiblit pas : en 2015 encore, le nombre de réclamations adressées aux hôpitaux a progressé de 7 % par rapport à l’année précédente, selon le « panorama du risque » présenté le 4 octobre par le groupe Sham, premier assureur en responsabilité civile médicale en France. Depuis 1998, ce nombre a progressé en moyenne de 5 % par an, soit un doublement sur la période.

Lorsque ces réclamations sont portées devant les tribunaux, elles aboutissent à des condamnations dans plus d’un cas sur deux, observe la Sham. Cela s’explique, selon l’assureur, par « une sévérité accrue du juge à l’égard des établissements hospitaliers et […] des évolutions jurisprudentielles en faveur des patients ».

Seules 46 % des réclamations sont liées à un préjudice corporel, mais elles comptent pour 98 % du coût. Les causes sont principalement médicales (90 %) mais aussi liées à la vie hospitalière (7 %), ou encore aux dispositifs médicaux et produits de santé (2 %). Le coût moyen par condamnation s’est établi en 2015 à 269 258 €, un niveau équivalent à celui de 2013 et 2014. « Il y a une recherche par le juge d’une indemnisation de plus en plus complète », relève Dominique Godet, dirigeant de la Sham.

Un peu plus d’un tiers (37 %) des réclamations ont été portées devant une commission de conciliation et d’indemnisation (CCI). Celles-ci, à l’instar de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (Oniam), continuent à se développer. La justice se concentre, elle, sur les litiges les plus graves.

Cette hausse des réclamations traduit en partie les avancées de la jurisprudence. Récemment encore, le Conseil d’État a estimé dans un arrêt du 16 juin 2016 qu’il y a une présomption de souffrance morale lorsque le patient découvre les conséquences d’une intervention sans y avoir été préparé. Auparavant, le patient devait apporter la preuve de ce préjudice moral, rappelle l’Agence de presse médicale (APM).

La judiciarisation, un « espoir » pour les patients

Ces chiffres le montrent : le secteur de la santé fait face à une « judiciarisation » de plus en plus prégnante. Cette problématique était d’ailleurs le thème central d’Hopitech, un congrès organisé du 4 au 6 octobre à Saint-Étienne par quatre associations d’ingénieurs et techniciens hospitaliers.

Pour Jean-Marc Morin, directeur juridique et fiscal du groupe Caisse et dépôts et ancien directeur des affaires juridiques de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), de 2003 à 2011, le basculement vers plus de justice a eu lieu après l’affaire du sang contaminé. C’est depuis cette période que le patient ne veut plus entendre la formule « responsable mais pas coupable ».

En ouverture du congrès, Jean-Marc Morin a estimé que la judiciarisation a été un progrès car elle a permis « une prise de conscience » du secteur, qui s’est notamment traduite par de nouveaux protocoles et normes. En France, « il n’y a que le pénal qui fait bouger les lignes », a-t-il regretté.

« La judiciarisation est plutôt une bonne nouvelle » pour les patients, a abondé Christian Saout, secrétaire général du Collectif inter-associatif sur la santé (Ciss), car « il n’y a pas de raison que l’hôpital échappe à la responsabilité de la chose publique ». Il estime que la judiciarisation est aussi une manière de donner l’alerte quand le dialogue ne fonctionne pas. « Il y a les hôpitaux où l’on a pu se parler et où l’affaire ne prend pas une tournure polémique, et celui où le dialogue n’a pas fonctionné et le problème se retrouve au journal télévisé. » Un diagnostic partagé par Jean-Marc Morin, pour qui « quand on dit la vérité au patient, il y a beaucoup moins de problèmes ».

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