CONSEILS

MielMalgré les fraudes, des repères pour bien choisir

Elsa Casalegno

par Elsa Casalegno

Ajout de sirop de sucre, mentions enjolivant la qualité, voire trichant carrément sur la provenance ou l’origine floristique… le miel est l’un des aliments les plus falsifiés. Hélas, détecter ces fraudes est impossible pour les consommateurs. Ils peuvent tout de même prendre quelques précautions lors de l’achat.

Or pâle, blond, orangé, ambré, cuivré… Derrière ses 50 nuances de jaune, impossible de savoir, d’un coup d’œil, si tel pot de miel convoité est de qualité. Son goût ne vous renseignera guère plus. Or, trafiquer ce nectar s’avère très simple, et très répandu… Les pratiques sont connues. « Falsification, dilution, substitution, mauvaise représentation de la provenance, produits non issus des abeilles présentés comme du miel, ou encore mise en avant d’allégations trompeuses relatives à l’origine ou à la qualité, énumère la direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF). Les miels vendus avec des revendications spécifiques concernant l’origine botanique, l’origine géographique ou le statut biologique sont particulièrement exposés à ces risques. » Rappelons qu’un miel, par définition, se compose uniquement de la substance sucrée produite par les abeilles de l’espèce Apis mellifera, sans aucun ajout.

Bien qu’il véhicule une image champêtre, le miel fait l’objet d’un commerce mondial – et en subit les travers. Des volumes massifs (600 000 tonnes par an, soit le tiers de la production apicole) passent d’un continent à l’autre, la majorité provenant de Chine, premier producteur et exportateur mondial, mais aussi d’Inde, d’Argentine, d’Ukraine, du Vietnam, du Brésil ou encore du Mexique. Dès lors, il est facile de perdre leur trace. La filière apicole estime que près du tiers de ces échanges portent sur du miel frelaté.

40 % des miels contrôlés non conformes

Et l’Hexagone n’est pas épargné. Jadis autosuffisant, il a subi en 40 ans un effondrement de ses populations d’abeilles, du fait du réchauffement climatique, de nouveaux prédateurs, des pesticides, de la perte de biodiversité… Il a donc fallu importer : 35 000 tonnes par an, en plus des 15 000 produites, exposant d’autant plus le marché à des risques de fraudes – sachant que les provenances lointaines n’ont pas l’exclusivité de la triche ! Une enquête menée par l’UFC-Que Choisir a révélé les mauvaises pratiques du leader français, Famille Michaud, qui francise allègrement des miels importés. Et lors de sa dernière enquête, en 2024, la DGCCRF a constaté que plus de 40 % des miels contrôlés n’étaient pas conformes. Ses prélèvements étant ciblés sur des lots suspects, ce taux est vraisemblablement supérieur à la réalité du marché, mais il illustre l’ampleur du phénomène. Et les tests menés régulièrement par Que Choisir confirment ces problèmes. Une batterie d’analyses réalisées par des laboratoires spécialisés permet de détecter la majeure partie des fraudes. Encore faut-il que les conditionneurs ou les distributeurs les fassent faire…

Alors, comment ne pas se laisser berner ? Vous pouvez a minima adopter quelques réflexes.

  • Repérez, sur l’étiquette ou le couvercle, les mentions obligatoires concernant la dénomination du produit, le pays d’origine, la date de durabilité minimale, le numéro de lot de fabrication, les informations sur le fabricant ou le vendeur.
  • L’indication du pays de récolte du miel est obligatoire depuis 2022. S’il s’agit d’un mélange de miels conditionnés et vendus en France, tous les pays doivent être mentionnés. Les miels importés portent les mentions « Mélange de miels originaires de l’UE », « Mélange de miels non originaires de l’UE », « Mélange de miels originaires et non originaires de l’UE ».
    • Du moins pendant encore quelques mois : à partir du 14 juin 2026, le règlement européen obligera à indiquer tous les pays de provenance, ainsi que le pourcentage pour les 4 premiers, a minima.
  • Évitez certaines origines, davantage sujettes à caution que d’autres (Chine, Ukraine, Espagne, Argentine, Belgique, par exemple).
  • Préférez l’origine France, ou à défaut un pays précis (pas un vague « UE » ou « non UE »).
  • Méfiez-vous du marketing. Ne vous laissez pas abuser par les drapeaux tricolores ou les termes fleurant bon le terroir. Les expressions comme « miel naturel » ou « pur miel » ne sont pas autorisées. Les mentions telles que « mis en pot par l’apiculteur » ou « sélectionné par l’apiculteur » doivent attirer votre vigilance : elles ne garantissent pas que le miel provienne exclusivement de sa propre récolte.
  • Achetez en vente directe (dans la mesure du possible) auprès d’un apiculteur dûment enregistré auprès d’une chambre d’agriculture.
  • Trop peu cher : n’espérez pas de la qualité. L’origine chinoise et l’ajout de sirop de glucose s’accroissent quand le prix baisse.
  • Trop cher : inutile de débourser des sommes folles pour un produit qui reste tout de même du sucre ! D’autant que, pour les produits « tendance » très onéreux comme le miel de manuka, les risques de fraude s’accroissent aussi.

Les principales fraudes au miel

  • L’adultération : du sirop de sucre, beaucoup moins cher, est ajouté dans le miel. La Chine surtout, mais aussi l’Inde ou encore l’Ukraine en ont fait un sport national. Une autre cause est le nourrissage des abeilles avec du sirop de sucre en période de floraison insuffisante. Cette pratique est autorisée, à condition que ce sirop ne se retrouve pas dans le produit final, ce qui arrive parfois.
  • La falsification de l’origine botanique : par exemple, un miel étiqueté « miel d’acacia » alors qu’il est en réalité issu du butinage d’autres fleurs, ou dans une proportion insuffisante de la fleur annoncée.
  • La falsification du pays d’origine : plusieurs pays sont des plaques tournantes du commerce mondial du miel, et potentiellement des étapes de « blanchiment » de l’origine – en particulier chinoise, peu vendeuse. Parmi eux, l’Argentine, l’Espagne, la Pologne…
  • La mention indue d’une certification de qualité supérieure (bio, IGP, AOP). La référence au terme géographique est interdite hors signe de qualité. Ainsi, « Provence » est réservée à la seule IGP « miel de Provence » ; l’apposer hors de l’IGP, même s’il est produit dans cette région, est interdit. Pour rappel, il existe 2 AOP (miel de Corse et miel de sapin des Vosges) et 4 IGP (miel d’Alsace, miel de Provence, miel des Cévennes et miel des Landes).
  • Les affichages trompeurs laissant croire aux consommateurs qu’ils achètent un miel produit en France, ou exclusivement issu de la récolte d’un apiculteur, alors que ce n’est pas le cas. Il suffit d’orner le pot d’un drapeau français, d’une carte de l’Hexagone, de la mention « miel de nos terroirs », « artisanal », etc.
  • Les dénominations trompeuses ou fantaisistes : « miel » est mentionné sur le pot, alors qu’il s’agit de miel mélangé à d’autres ingrédients. Ainsi, le « miel d’écureuil » est en réalité un mélange de miel et de poudre de noisette. De même, les dénominations telles que « miel de curcuma », « de safran », « aux truffes », « aux amandes », etc. sont interdites.
  • Les allégations nutritionnelles non justifiées, telles que « miel bien-être », « source de… », « riche en… » sont interdites. Par ailleurs, aucune allégation santé n’est autorisée.
  • Les problèmes de qualité sanitaire : certains miels dépassent les limites autorisées de pesticides ou d’antibiotiques.
  • Les problèmes de fraîcheur (miel trop vieux, mal conservé) : la réglementation fixe un seuil au-delà duquel le miel n’est pas conforme.

Cet article est issu de la série Label Vert, une collaboration entre Que Choisir et Vert, média indépendant d’actualité sur l’écologie. Chaque semaine, les journalistes de nos deux médias indépendants analysent des produits, décryptent des tendances et répondent de manière sourcée aux questions que vous vous posez sur la consommation. Le but : vous aider à faire des choix respectueux de votre santé et de l’environnement. Ce partenariat est 100% journalistique, il ne fait l’objet d’aucune contrepartie financière.

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