DÉCRYPTAGE
Pollution de l'air intérieur

Identifier les 4 types de polluants

Il existe plusieurs grandes causes de pollution qui dégradent la qualité de l’air d’un logement. Revue de détail et moyens de s’en débarrasser.

Les produits chimiques

On y trouve la grande famille des COV, pour composés organiques ­volatils, leur caractéristique commune étant d’être relargués dans l’air. Elle compte des substances a priori sans risques pour la santé, mais aussi des irritants, des allergènes, des composés cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction. Les COV sont émis par les produits que nous utilisons au quotidien, les matériaux, les meubles, les travaux de décoration, de bricolage, ainsi que par les parfums d’intérieur et les sprays assainissants. Ces COV nous font respirer un air intérieur plus pollué que l’air extérieur même si, paradoxalement, l’intérêt médiatique se focalise sur la qualité de l’air en milieu urbain. Il y a aussi la famille des aldéhydes, avec le formaldéhyde, un gaz très irritant, allergisant et, plus grave, cancérogène par inhalation. C’est d’ailleurs le polluant le plus préoccupant de l’air intérieur. Malheureusement, il n’est pas interdit et une multitude de produits et de matériaux en émettent. Dans les dernières analyses d’air intérieur effectuées par Que Choisir en 2010, 100 % des locaux en contenaient, dont 78 % à plus de 10 µg/m3, une teneur inquiétante pour un composé aussi nocif. S’y ajoutent les composés organiques dits semi-volatils, qu’on trouve surtout dans les poussières et sur les meubles. Phtalates des plastiques en PVC, retardateurs de flammes des ordinateurs, des téléviseurs, pesticides des antimites, des antipoux, des colliers ou sprays antipuces des chiens ou chats, des insecticides et des pulvérisateurs pour plantes d’intérieur. Les analyses de poussières que nous avons réalisées dans dix logements en 2012 ont montré que les phtalates étaient omniprésents.

Une étude inquiétante sur les produits ménagers

La peinture émet des composés organiques volatils (COV).

Dans une étude portant sur les produits ménagers et la qualité de l’air intérieur, le CSTB (Centre scientifique et technique du bâtiment) et l’Ineris (Institut national de l’environnement industriel et des risques) ont testé 54 produits ménagers grand public, des multi-usages et des nettoyants spécifiques. Poudres, crèmes, produits à diluer, lingettes, grandes marques, marques de distributeurs, marques vertes, l’ensemble du marché est représenté. Les analyses se sont d’abord déroulées en laboratoire. En tête des polluants émis, le formaldéhyde, pour 91 % des références, suivi du d-limonène (43 %). Puis le test s’est poursuivi dans des conditions réelles d’emploi, en maison expérimentale, sur les 20 produits les plus émissifs. Leur utilisation fait toujours augmenter les ­concentrations en COV de l’air intérieur et, dans la plupart des cas, la concentration en aldéhydes. De plus, les polluants réagissent chimiquement au contact de l’air, notamment avec l’ozone, et provoquent la formation d’autres polluants, dits « secondaires », parmi lesquels le formaldéhyde et les particules très fines de taille critique pour la santé, parfaitement calibrées pour pénétrer dans les alvéoles des poumons. Ces mesures réalisées en maison expérimentale prouvent que la pollution réelle est supérieure aux résultats des analyses de polluants effectuées en laboratoire.

Que faire ?

  • Limiter le nombre de produits ménagers au strict nécessaire et aérer quand on nettoie.„

  • Se passer des produits d’entretien parfumés, des désodorisants en tous genres. Ils émettent des terpènes, qui sont employés comme parfums. Beaucoup sont irritants ou allergisants.„

  • Éviter les sprays assainissants aux huiles essentielles. Vendus en pharmacie, en parapharmacie ou en magasin bio, ils inspirent confiance mais notre test de sprays et de désodorisants démontre qu’ils ne sont pas moins polluants que les désodorisants industriels.

  • Utiliser un chiffon légèrement humidifié plutôt que la bombe dépoussiérante ou les lingettes parfumées.

  • Passer l’aspirateur de façon régulière, puis la serpillière humide sur les sols lisses.„

  • Plus que jamais, tenir compte du classement des produits dans nos tests et renoncer à employer ceux qui émettent des substances nocives lors des analyses en laboratoire car, à domicile, ça risque d’être pire.„

  • Aérer très généreusement quand on bricole, et pendant plusieurs jours, voire plusieurs semaines, après des travaux ou l’installation d’un meuble neuf.

Meubles en bois aggloméré : ça s’améliore

Les fabricants de meubles en bois aggloméré ont fait de nets progrès, leurs produits émettent bien moins de formaldéhyde et de COV.

Les meubles en bois aggloméré ont mauvaise réputation, car ils ont longtemps émis en quantité du formaldéhyde, ce gaz irritant, allergisant et cancérogène. La faute aux colles à base de formol, qui lient à bas coût les particules de bois. Mais les tests de Que Choisir, les labels et les progrès de la réglementation ont fait évoluer la plupart des fabricants. Pour preuve, nos tests sur des commodes pour chambre d’enfant. En 2006, nos résultats étaient catastrophiques. Les 12 meubles analysés étaient éliminés ou déconseillés en raison de la pollution de l’air qu’ils provoquaient. Tous émettaient beaucoup trop de formaldéhyde. Nous avons à nouveau testé des commodes pour enfants en 2010, 13 modèles en panneaux de particules, panneaux MDF avec fibres de moyenne densité, ou associant bois massif et placages. Ce fut une bonne surprise. À deux exceptions près, les émissions de formaldéhyde avaient chuté très nettement, et celles de composés organiques volatils (COV) aussi. On peut donc acheter du mobilier en panneaux de particules très peu polluant. Hélas, le choix demeure assez aléatoire en magasin car la classe E1, souvent mentionnée comme un gage de qualité pour le formaldéhyde, autorise des taux trop élevés. La classe E0,5 en exige deux fois moins. C’est préférable, mais pas encore parfait.

Monoxyde de carbone : des intoxications évitables

Entretenez avec soin votre chauffe-eau, il y va de votre sécurité.

Chaque année, le monoxyde de carbone provoque des centaines ­d’intoxications mortelles. À moindre concentration, il cause des maux de tête chroniques, des nausées, une fatigue inexpliquée, autant de problèmes de santé qu’on ne pense jamais à lui imputer. À tort car, à petites doses, il empoisonne lentement. Inodore et incolore, ce gaz se révèle d’autant plus dangereux qu’il est indétectable. Il est refoulé dans la pièce par les appareils à combustion quand la combustion se fait mal.

Que faire ? Pour assurer une bonne ­combustion, il faut faire ramoner les conduits de fumée, entretenir la chaudière et le chauffe-eau.

Les moisissures

Les moisissures ne sont pas seulement inesthétiques, elles sont malsaines. Pour les éviter, il faut bien ventiler le logement.

Quand on n’aère pas après la douche ou le bain, quand on fait sécher le linge dans une pièce mal ventilée, l’air se charge en vapeur d’eau. Si les murs sont froids, c’est la condensation immédiate et, peu à peu, l’apparition de moisissures. C’est inesthétique et malsain. Les moisissures émettent des spores qu’on inhale en respirant. Elles peuvent être allergisantes, et parfois même toxiques. « Je rencontre souvent ce problème de moisissures dans les logements équipés d’un chauffage électrique, témoigne Martine Ott. Les gens coupent les radiateurs en partant le matin, les murs se refroidissent dans la journée, dès qu’on génère de la vapeur d’eau le soir, elle condense sur les murs. Baisser la température c’est bien, mais il ne faut surtout pas couper le chauffage. »

Que faire ?

Dans l’urgence, les moisissures de surface s’enlèvent à l’eau de Javel. Dans la durée, il faut limiter les risques de condensation par son comportement au quotidien.„

  • Aérer à chaque fois qu’une activité dégage de la vapeur d’eau, juste après la douche ou le bain, et pendant qu’on cuisine.„

  • Éviter d’étendre le linge dans les pièces humides, préférer l’extérieur quand c’est possible ou le sèche-linge.„

  • Entretenir la ventilation. Si c’est une VMC, les entrées d’air et les bouches d’extraction doivent être nettoyées régulièrement. Pour vérifier qu’elle fonctionne, approchez une feuille de papier de la bouche d’extraction, elle doit l’attirer. Si ce sont des grilles hautes et basses, il faut veiller à les laisser dégagées.„

  • Chauffer régulièrement sans surchauffer. Chauffer car l’air froid sature plus vite que l’air chaud, ne pas surchauffer car plus l’écart est important entre la température de l’air ambiant et celle des murs, plus la vapeur d’eau condense sur les parois.„

  • Dans certains cas, l’humidité excessive peut provenir d’infiltrations ou de remontées capillaires, il faut alors traiter le bâti.

Les acariens

Ils sont si microscopiques qu’on ne les voit pas, mais leur responsabilité est écrasante dans les allergies. Leur univers de prédilection, ce sont nos lits douillets. Bien au chaud, ils s’y développent et s’y régalent des particules de peaux mortes dans un microclimat idéal.

Que faire ?

  • Avoir le réflexe d’ouvrir grand le lit et la fenêtre tous les matins pour enrayer leur prolifération.„

  • Créer un environnement hostile, avec un taux d’humidité inférieur à 60 % et une ­température maxi de 19 °C.„

  • Aspirer régulièrement la poussière, dépoussiérer le matelas et les couvertures.„

  • Préférer les matières synthétiques à la plume ou à la laine, le sommier à lattes au sommier en tissu, le sol lisse à la moquette, le ménage au chiffon humide plutôt qu’au plumeau.„

  • Laver fréquemment les couettes, les oreillers, les coussins, et les peluches si c’est une chambre d’enfant.

  • Se méfier de la mention antiacariens, elle n’est pas une garantie d’efficacité. Il arrive même que des substances allergisantes soient utilisées !„

  • Éviter les produits acaricides, souvent irritants. D’ailleurs, les allergènes se trouvent dans les déjections et les cadavres d’acariens, qu’on élimine plus sûrement à l’aspirateur qu’avec une bombe aérosol ou un pulvérisateur.

Les animaux domestiques

Quelques précautions sont à prendre avec les animaux de compagnie.

Les animaux domestiques peuvent être impliqués dans les allergies, le chat plus souvent que le chien, et les particules allergisantes qu’ils émettent ont la vie dure. « On a eu le cas d’un patient qui développait une allergie au chat alors qu’il n’avait pas de chat, se souvient le Pr de Blay. C’était incompréhensible. On a cherché, on a fait des tests à son domicile et on a découvert que le problème provenait de la moquette. L’ancien locataire avait déménagé avec son chat, mais des allergènes de l’animal restaient stockés dans la moquette. »

Que faire ?

  • Interdire l’accès des chambres à l’animal.„

  • Le brosser dehors.

  • Le shampouiner de temps en temps, ou passer un gant humide sur son pelage s’il s’agit d’un chat.

Élisabeth Chesnais

Élisabeth Chesnais

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